Hollande sera-t-il le seul président sous lequel les candidats de gauche sortants n'arrivent pas à se qualifier au second tour dans des partielles ?<!-- --> | Atlantico.fr
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François Hollande, le gouvernement, sa politique et le Parti socialiste sont santionnés par les élections partielles.
François Hollande, le gouvernement, sa politique et le Parti socialiste sont santionnés par les élections partielles.
©Reuters

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Depuis l'élection de François Hollande, le Parti socialiste a subi une série de défaites aux élections partielles avec l'élimination de plusieurs candidats de la majorité dès le premier tour.

Jérôme Fourquet

Jérôme Fourquet

Jérôme Fourquet est directeur du Département opinion publique à l’Ifop.

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Atlantico : Depuis l’élection de François Hollande à la tête du pays, le Parti socialiste a subi une série de défaites aux élections législatives partielles, voyant même plusieurs fois ses candidats éliminés dès le premier tour. Dans quelle mesure l'impopularité de François Hollande explique-t-elle ces résultats ? Est-ce l'ensemble du parti qui est rejeté avec lui ?

Jérôme Fourquet : Ceque l’on constate effectivement depuis l’élection de François Hollande, c’est qu'il y a eu très rapidement une baisse non seulement de la popularité présidentielle mais aussi de celle du Premier ministre, ainsi qu'une très grande insatisfaction quant à la politique menée par ces derniers. La principale répercussion en a naturellement été la très mauvaise tenue des candidats de gauche aux différentes élections partielles depuis. Toutes les circonscriptions ont été perdues et on s’aperçoit de quelque chose de nouveau depuis peu : des candidats socialistes sont éliminés dès le premier tour.

Il n’est pas possible de séparer la personnalité de François Hollande du Parti socialiste puisqu’il est lui-même l'ancien dirigeant du parti, que presque tous les membres du gouvernement appartiennent également au PS de même que la majorité parlementaire. C’est donc l’ensemble qui est sanctionné : François Hollande, le gouvernement, sa politique et le Parti socialiste.

Évolution de la popularité de François Hollande depuis l'élection présidentielle de 2012

Niveau de satisfaction des Français à propos de François Hollande (octobre 2013)

Source : Ifop

La France a-t-elle déjà connu une situation de désaveux politique d'une telle ampleur sous la Vème République ? De candidats du parti en place éliminé au premier tour d'une législative partielle ? 

Pour être mesuré et juste, il faut bien souligner que, traditionnellement, toutes les élections intermédiaires sont en général mauvaises pour le parti en place. Ce fut par exemple le cas sous la présidence Sarkozy durant laquelle la droite a perdu toutes les élections locales. Celant étant, la sanction dans la situation actuelle semble particulièrement massive et proportionnelle à l’impopularité dont souffre François Hollande. Rappelons en effet qu’il est bien moins populaire que Nicolas Sarkozy à la même époque, il est même recordman de l’impopularité sous la Vème République d’après le baromètre Ifop-JDD. Face à ces chiffres hors-normes, il est probable que le vote sanction soit encore plus fort que d’habitude et dans le cas présent, il se matérialise surtout sous la forme d’une non mobilisation de l’électorat de gauche qui a tendance à rester chez lui. C’est une grève des urnes jamais vue qui donne lieu à ces défaites répétées des candidats portant l’étiquette PS et à ces éliminations de candidats de la majorité dès le premier tour d'élections législatives partielles.

Source : Ifop

L’impopularité du PS est-elle structurellement limitée par le calendrier politique à venir ou peut-elle continuer au point de remettre en cause la stabilité du régime de la Vème République ?

Il est encore possible pour le président de la République de franchir des paliers d’impopularité puisqu’il est pour l’instant crédité de 23% de bonnes opinions et pourrait donc encore un peu baisser. Devant nous, se trouvent désormais des élections municipales ayant une dimension locale bien plus forte que les législatives, ce qui pourrait effectivement limiter cette série noire. Les pouvoirs d’un maire et de ses équipes sur différents aspects de la vie des Français a de bonnes chances d’attirer vers les urnes plus surement que les législatives partielles. Historiquement, les municipales sont mêmes les scrutins les moins abstentionnistes avec l’élection présidentielle.

De plus, la gauche est sortante dans de nombreuses agglomérations importants et l’est avec un bilan qui n’est pas mauvais, notamment à Paris mais aussi en province. Néanmoins, on voit dans nos enquêtes que la volonté de vote sanction est beaucoup plus forte qu’elle a pu l’être en 2008 où la situation s’était mal terminée pour la droite. Tous ces éléments permettent donc de penser que malgré des facteurs limitant, la sanction sera rude pour le Parti socialiste. Deux forces peuvent espérer tirer parti de cette volonté la sanction, l’UMP d’une part et le FN d’autre part. Ce dernier pourrait d'ailleurs permettre à certaines équipes de gauche de se maintenir à cause du ralentissement de la dynamique UMP qu'il provoque dans certaines circonscriptions.

Nombreux ont été les « couacs » gouvernementaux depuis l’élection de François Hollande mais avec l’affaire Leonarda on a l’impression qu’une nouvelle étape a été franchie. Jusqu’à présent, l’origine de ces dissonances était des ministres en mal de visibilité, de l’aile gauche ou des alliés verts un peu remuants du PS, mais là on a eu l’impression que c’était le cœur de la machine socialiste qui était touché. Quand Harlem Désir, premier secrétaire du parti, prend position en opposition flagrante avec le président, quand une sénatrice PS laisse dimanche soir après les résultats de la primaire marseillaise être hués un long moment les noms du président de la République et du Premier ministre, on comprend bien que la légitimité et surtout l’autorité peuvent être contestée en interne. Ainsi, malgré les institutions de la Vème prévues pour que la France puisse être gouvernée même en cas de tempête, cette contestation laisse dubitatif quant à ce qui peut se passer si le pays continue sur cette pente. Par exemple, si aux municipales de 2014 d’importantes villes de gauche tombaient et si les sondages de popularité restaient en berne, il se pourrait qu’un nombre croissant de leaders socialistes essaient de sauver ce qui peut l’être, soit par calcul personnel soit par conviction, en « forçant le destin ».

Motivation du vote futur pour les élections municipales 2014 (septembre 2013)

Source : CSA

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Intention de vote pour les municipales 2014 (septembre 2013)

Source : CSA

(cliquer pour agrandir)

Source : CSA

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Au vu de ces résultats, que peut-on imaginer pour la fin du quinquennat Hollande ? Quels sont les scenarii plausibles ?

Encore une fois, nous avons franchi un stade assez significatif qui ne laisse que deux grandes options à l’exécutif. Soit François Hollande et Jean-Marc Ayrault tapent du poing sur la table et réinstaurent une forme de discipline dans les rangs socialistes au sein même de l’appareil socialiste pour faire respecter leur autorité. Il leur faudra d’ailleurs donner des gages de celle-ci puisqu’il semblerait que le fait qu’une ministre ait été éjectée du gouvernement n’ait pas suffit. Ou alors, ils continuent sur cette pente et la situation deviendra ingérable. On peut alors imaginer que des députés socialistes refusent massivement de voter certains textes du gouvernement avec à leur tête un leader d’importance comme le président du groupe socialiste, du président de l’Assemblée nationale autre qui prendrait la tête de cette fronde. Jusqu’à maintenant, la grogne était contenue mais quand Harlem Désir se permet de prendre le contre-pied de François Hollande (même s’il a fait machine arrière) et que les députés PS s'agacent de l'accueil qu'ils reçoivent dans leurs circonscriptions, il peut y avoir une réaction du type « il faut réagir pour éviter le jeu de massacre » au sein même de la majorité. Et là on ne sait plus ce qui peut arriver.

Propos recueillis par Jean-Baptiste Bonaventure

Comparatif des scores obtenus par les principales forces politiques aux élections législatives de 2012 et ceux des élections législatives partielles de 2013

Source : Laurent de Boissieu pour La-Croix.com avec Highcharts

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