Déconnectés des Français ? Les médias victimes collatérales de la dévaluation de la parole politique<!-- --> | Atlantico.fr
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"A l'heure où la parole gouvernementale est dévaluée, celle de la presse ne va pas mieux."
"A l'heure où la parole gouvernementale est dévaluée, celle de la presse ne va pas mieux."
©Reuters

Pot aux roses

Cette semaine, Serge Federbusch revient aussi sur l'affaire du "Mur des cons" et sur le blocage gouvernemental dans la tentative de rachat de Dailymotion par Yahoo!.

Serge  Federbusch

Serge Federbusch

Serge Federbusch est président du Parti des Libertés, élu conseiller du 10 ème arrondissement de Paris en 2008 et fondateur de Delanopolis, premier site indépendant d'informations en ligne sur l'actualité politique parisienne.

Il est l'auteur du livre L'Enfumeur, (Ixelles Editions, 2013) et de Français, prêts pour votre prochaine révolution ?, (Ixelles Editions, 2014).

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1 - L'art d'être con

Résumons nous. Quand la gauche dit, comme le Syndicat de la magistrature, qui sont les cons de droite, c’est une blague. Quand la droite revendique par défi ce qualificatif, tel Copé à la tribune d’un meeting, la gauche trouve l’affaire vulgaire et grave. Bref, la gauche détient le monopole du sérieusement con.

2 - Victimes collatérales : le discrédit des médias après un an de France "hollandaise"

Qu’arrive-t-il au Canard enchaîné ? Ce très vieux volatile, étourdi par son envol sur le Net, se met à tendre des pièges téléphoniques à Devedjian et Guéant à l’aide d’un imitateur. Farceur va ! Alors qu’il s’employait autrefois à révéler les scandales, il cherche désormais à les créer de toutes pièces. Ses tentatives sont néanmoins sélectives. Je ne crois pas que Gérald Dahan, agissant pour ce palmipède, ait voulu confondre un dignitaire socialiste et lui faire dire qu’Hollande, Ayrault ou Moscovici savaient pour Cahuzac.

C’est une curieuse évolution : la gauche médiatique fabrique des révélations mais, en même temps, s’émeut que Clément Weill-Raynal, journaliste de son état, aide à faire connaître au public les dérives cachées et bien réelles d’un syndicat de magistrats.

Décidément, à l’heure où la parole gouvernementale est dévaluée, entraînant toute expression politique dans sa chute, la presse ne va pas mieux. Son désarroi déontologique accompagne désintérêt du public et perte de statut.

Il est devenu banal de voir des journalistes pris à partie en marge de manifestations. Une équipe de Rennes TV en a fait il y a quelques jours les frais, sa rencontre avec la manifestation locale "pour tous" ayant dégénéré en pugilat avec blessures, caméras cassées plutôt que cachées, menaces de procès et autres joyeusetés.

Quand Canal + sélectionne, parmi des milliers de militants FN attroupés le 1er mai, trois personnages caricaturaux pour démontrer qu’il n’y avait parmi eux que racistes, néo-nazis et enfants manipulés, on conçoit que la chaîne portée sur les fonts baptismaux par Mitterrand soit rabrouée par Marine Le Pen. La méthode est tellement douteuse qu’elle ne fait que renforcer le FN.

L’objectivité n’existant pas, elle était quelquefois suppléée par la recherche de l’exhaustivité dans l’information et du pluralisme. Mais ces deux exigences sont devenues rares en France. Viendrait-il à l’esprit de Médiapart d’inviter un homme de droite sur ses plateaux lorsqu’il organise des débats ? Pierre Bergé, actionnaire du Monde, peut impunément déclarer qu’il est scandaleux que parole et publicité soient faites à la Manif pour tous dans les colonnes de l’ex quotidien de référence dont l’activité éditoriale principale, ces derniers jours, a consisté à monter la mayonnaise du scandale Guéant.

L’opinion se radicalise, ulcérée ou inquiète de l’immobilisme du gouvernement face à la crise. Et la presse se sent dans l’obligation de choisir son camp.

Cette radicalité retrouvée a des vertus mais elle ne facilite pas la compréhension du monde. Elle traduit la montée des tensions entre les Français, par-delà la contestation du pouvoir. Cette nervosité sociale aura besoin de beaucoup plus qu’un simple remaniement ministériel pour retomber ...

3 - Lâches et salauds : les catégories morales sartriennes vont-elles désormais comme un gant à la gauche française ?

Sorte de damné sartrien, Mou-Président se tortille au bout de l’hameçon de Bruxelles. Il est en sursis, une longue et dure période de deux ans durant lesquels il pourra enfreindre ses engagements de réduction du déficit public sans que la Commission européenne ne lance la procédure punitive qu’elle est désormais en droit d’engager.

Obtenant un répit jusqu’en 2015, Hollande et son gouvernement poussent un soupir de soulagement, de lâche soulagement pour rester dans la métaphore munichoise chère à Sartre. Car notre président passera ces deux prochaines années sous étroite surveillance, c’est le destin des sursitaires. Bientôt, la Commission lui passera des bracelets budgétaires électroniques ! Dès cet hiver, il devra annoncer à ses crédules électeurs qu’ils partiront à la retraite plus tard et aux familles qu’elles verront leurs allocations baisser. Puis il augmentera la TVA, réduira les remboursements de santé, etc. Il cherchera bien sûr à tout faire a minima, espérant encore et toujours que le résultat des élections allemandes permette miraculeusement aux Etats impécunieux de vivre de fausse monnaie pour soulager leurs dettes.

Cette attitude de quémandeur, de bondieuserie optimiste et de trahison précautionneuse ne fait qu’accroître la paralysie française. Le bilan d’un an de hollandisme est facile à dresser : il n’y a pas un domaine où la situation de la France se soit améliorée. Cette cruelle réalité est à l’origine directe de son impopularité record.

Tout cela nous renvoie à nouveau, par un amusant paradoxe politique, aux catégories forgées par Sartre qui voyait beaucoup de lâches et de salauds sur terre, surtout chez les bourgeois. Récemment, Mélenchon a qualifié Cahuzac de "prototype du salaud sartrien", preuve de la vitalité de ces concepts dans l’imaginaire crypto-gauchiste. Mais Mélenchon n’est guère précis, une fois de plus : il confond lâche et salaud.

Le lâche était défini par Sartre comme celui qui "par esprit de sérieux ou par des excuses déterministes, se cache sa liberté totale. Il invoque des éléments extérieurs pour échapper à sa responsabilité et laisse le soin aux autres de faire ce qu’il ne peut pas faire". Toute ressemblance avec un pouvoir socialiste dressé sur les pattes arrières devant le fouet bruxellois n’est pas fortuite.

Le salaud, lui "essaie de montrer que son existence est nécessaire, alors qu’elle est la contingence même de l’apparition sur terre. Il refuse de se remettre en question et s’arc-boute sur ce qu’il croit être le bien. Il se construit selon un mode qu’il détermine par avance, devenant la figure même du conformisme".

Toute ressemblance avec les révolutionnaires verbeux et sénatoriaux de type mélenchonien est encore moins fortuite.

Dissimulateurs et démagogues, lâches et salauds, tous ensemble pourront célébrer en 2015 le centenaire de la naissance de leur prophète germanopratin.

4 - Déliremotion

S’improvisant grand Manitou du Meccano entrepreneurial, Montebourg, comme un éléphant dans un magasin de High-Tech, a fait capoter le rachat de Dailymotion par Yahoo. Il discrédite ainsi toute notion de politique industrielle, pour peu qu’elle ait un sens dans le monde des contenus disponibles sur le Net.

Un ami a remarqué que Montebourg fait irrésistiblement penser à Claude Piéplu, lorsqu’il incarnait les rôles de bureaucrate dans les films où jouait De Funès : verbe haut, suffisance crasse, rouerie et auto-satisfaction. Il a raison. Les séminaires gouvernementaux devraient être organisés à la cinémathèque puis postés sur Internet.

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