Mali : du soulagement à l'inquiétude<!-- --> | Atlantico.fr
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Au Mali, les jihadistes ont évacué lundi les grandes villes du nord du pays qu'ils occupaient, après des bombardements des forces françaises. Mais ils ont pris la localité de Diabali, à 400 km au nord de Bamako, et menacé de "frapper le coeur de la France
Au Mali, les jihadistes ont évacué lundi les grandes villes du nord du pays qu'ils occupaient, après des bombardements des forces françaises. Mais ils ont pris la localité de Diabali, à 400 km au nord de Bamako, et menacé de "frapper le coeur de la France
©Reuters

Revue de blogs

Cinq jours après le début de l'intervention de l'armée française au Mali, Bamako et le sud du pays sont toujours aussi soulagés et reconnaissants. Mais certains blogs, en particulier ceux d'observateurs anglo-saxons, se font plus critiques.

Le compte Twitter de la présidence malienne est resté très sobre tout au long de ces quelques jours décisifs, mais l'immense soulagement des Bamakois a donné lieu sur Twitter et sur les JT locaux à un concert de remerciements gratifiants pour des oreilles françaises.

Bridges from Bamako, le blog d'un universitaire américain au Mali, a décrit la liesse générale des premiers jours à Bamako dans "Merci François !'

"Le rédacteur en chef  Adam Thiam, qui n'est pas d'habitude un fan de la politique française, a publié un éditorial dithyrambique dans Le Républicain titré “Hollande le Malien”. A la télévision nationale, dimanche, un Bamakois a décrit l'opération Serval comme le remboursement de la France pour les sacrifices faits par les troupes africaines coloniales durant la Seconde Guerre mondiale.En ligne, les Maliens expriment leur gratitude profonde à Hollande (toujours apprécié dans la capitale malienne pour avoir battu Nicolas Sarkozy, probablement le chef d'Etat le moins populaire auprès des Bamakois dans l'histoire récente). Des habitants collectent même de l'argent pour la famille du  pilote français d’hélicoptère mort en action vendredi".

Pour sa part, plus prudent, il cite aussi les déclarations de Dominique de Villepin et se pose les mêmes questions : "Il y a 10 ans, de Villepin avait souligné les risques et les conséquences de l'invasion de l'Irak préconisée par Bush. Cette guerre a résolu un problème pour en créer mille autres. Quel est l'enjeu final ? Quelle est la stratégie de retrait ? Comment le succès de la mission sera-t-il défini ? Comment un Etat stable peut-il émerger de ce processus ?"

La fin du conte de fées

La joie s'est teintée maintenant de prudence, jusque sur Facebook où la page malienne ouverte en soutien à l'armée française a été pris pour cible par des "trolls", comme le journal Le Monde en France.

Un autre blogueur lui aussi anglo-saxon, Gregory Mann, résume : "La France au Mali : Fin du conte de fée" en prévenant : "Cependant, ceci reste un moment très dangereux sous tous les aspects. (...) L'intervention était nécessaire. Le drame de l'offensive islamiste ne devrait pas être sous-estimé : la prise de Sevaré aurait signifié la perte de la seule piste d'atterrissage capable d'accueillir des gros avions cargo, à l'exception de celle de Bamako. La prise de Sevaré aurait fait de toute future opération militaire un cauchemar pour les troupes ouest-africaines ou alliées (...). L'ennemi est très dangereux : des officiers français ont exprimé une certaine surprise devant le niveau de sophistication des forces islamistes - bien armées, bien entraînées, et expérimentées. Dans la première vague de l'intervention française, un hélicoptère a été touché par de petites armes, et un pilote a été tué : un autre soldat a disparu. Il y a eu beaucoup de pertes chez les Maliens, et il est probable qu'elles sont minimisées. Des sources à Mopti parlent de douzaines de morts dans les rangs maliens, et il y en aura d'autres (...)."

Les groupes islamistes étaient-il en implosion ? 

Andy Morgan, un autre blogueur anglo-saxonconnaisseur du nord-Mali et des Touareg, avait publié trois jours avant l'intervention militaire une analyseet le récit de tous les conflits qui agitaient ces derniers temps les différentes factions au Nord, en se demandant :

"Peut-être qu'il n'y a pas besoin de défaire les groupes islamistes. Peut être qu'ils imploseront tout simplement sous la pression de leurs propres conflits internes. Peut-être que cette désintégration est aussi la raison de la décision de pousser vers le sud. Personne ne connait les politiques tribales fractionnées du Sahara mieux que lui [le chef de Ansar Dine], et le souvenir de la désintégration de la rébellion Touareg, après la signature du Pacte national en 1992, l'a marqué profondément. Il sait que l'inaction conduit à la désintégration. Si vous voulez unir vos troupes, partez en guerre, ou alors, provoquez l'ennemi pour qu'il vous attaque."

(...) Iyad [ Iyad Ag Ghali, chef de Ansar Dine], un vieux chacal s'il y en a jamais eu un, parie sur le fait que l'armée malienne est trop faible pour opposer une vraie résistance à ses moudjahidins. Il sait aussi que si il devait capturer Mopti, la pression que cela mettrait sur la junte militaire et ses marionnettes politiques à Bamako serait si énorme que même si les islamistes ne peuvent pas tenir une ville aussi grande et hostile longtemps, cela pourrait lui donner assez de temps pour imposer ses revendications pour un Azawad (nord-Mali) autonome, sur le modèle de la région autonome du  Kurdistan dans le nord de l'Irak."

La manie de l'intervention occidentale

Depuis, l'armée française est intervenue, et cette intervention a provoqué à Londres dans la rubrique "Comment is free" de Glen Greenwald sur le Mali une diatribe contre la manie récurrente de l'intervention occidentale.  

"Encore et encore, les interventions occidentales finissent - par ineptie ou par calcul - par semer les graines d'autres interventions. Etant donné l'instabilité massive qui règne toujours en Libye ainsi que la colère après l'attaque sur Ben Ghazi, combien de temps faudra-t-il avant que nous entendions que les bombardements et l'invasion dans ce pays sont  - une fois de plus - nécessaires pour combattre les forces "islamistes" là bas (...) Les frappes françaises au Mali, qui comprendront peut-être une forme de participation des Américains, illustrent chaque leçon d'une intervention occidentale. La 'guerre contre la terreur' est une guerre auto perpétuée car elle engendre inlassablement ses propres ennemis et fournit le carburant pour être sûre que l'incendie fasse rage sans fin."

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