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Le monde bascule dans l'univers de la technologie qui ne peut que conduire à l'intrusion de tous les systèmes de surveillance et de contrôle dans nos vies quotidiennes.
Le monde bascule dans l'univers de la technologie qui ne peut que conduire à l'intrusion de tous les systèmes de surveillance et de contrôle dans nos vies quotidiennes.
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Minute tech

Cory Doctorow, penseur pessimiste mais affûté de la technologie, a donné cet été une conférence pour prédire l'une des futures "guerres civiles" de la technologie. Celle provoquée par la disparition de la frontière entre l'homme et l'ordinateur qui pourrait encourager Etats et fabricants à barder de protections et de mouchards les objets connectés qui nous gouvernent. Science-fiction ?

Corry Doctorow, un penseur de la technologie bien connu pour son pessimisme mais toujours affûté, a donné une conférence Google en juillet dernier (vidéo) dont la transcription a été reprise par le site BoingBoing. Pour Doctorow, nous sommes actuellement témoins d'une bascule dans l'univers de la technologie qui ne peut que conduire à l'intrusion de tous les systèmes de surveillance et de contrôle dans nos vies quotidiennes. Pourquoi ? Parce qu'il n'y a plus de limites nettes ou légales entre l'humain,- le porteur de technologies sophistiquées-, et cette technologie et que les fabricants, ainsi que les autorités, ont intérêt à les contrôler. Voici son hypothèse : 

• Les ordinateurs et Internet sont partout et le monde, de plus en plus, est fait d'eux.  

• Nous avions deux catégories distinctes d'objets : les lecteurs de vidéo, les téléphones, les voitures, et maintenant, nous avons seulement des ordinateurs dans des contenants différents. Par exemple, nos voitures modernes sont des ordinateurs où nous introduisons nos corps et les Boeing 747s sont des boites Solaris, tandis que les prothèses auditives et les pacemakers sont des ordinateurs qui nous portons à l'intérieur de notre corps. 

• Ceci signifie que tous nos problèmes socio-politiques, par le futur, auront un ordinateur à l'intérieur aussi. Et un qui va souhaiter être le contrôleur, en disant des choses de ce genre : 

"Fais en sorte que les voitures tout automatique sans chauffeur ne puissent pas être programmées pour faire des courses de vitesse sur l'autoroute" "Fais en sorte que les imprimantes 3D utilisées en biologie ne puissent pas reproduire des organismes dangereux ou des cultures à usage surveillé" Ce qui signifie : "Fais moi un ordinateur qui exécute tous les programmes, sauf un seul, celui qui me file les jetons" 

La prochaine guerre civile utlisateurs-fabricants

Cory Doctorow explique ensuite comment les fameux DRM (Digital rights management), les fameux verrous rendant impossible la duplication ou l'utilisation de fichiers numérique (et qui ont provoqué la guerre civile des droits d'auteur dans le secteur de la musique), pourraient alors être introduits dans les nouveaux territoires de l'électronique de grande consommation, encourageant peut-être les hackers a "cracker" leurs interdictions, mais avec cette fois-ci des conséquences de bien plus grande ampleur et imprévisibles. Qui introduirait ces DRM-mouchards, pilotant et contrôlant à distance nos objets, moyens de transports, prothèses connectées? Les gouvernements, les fabricants, ou, si ces codes sont fracturés, toute entreprise mafieuse ou hostile cherchant à nuire ou voler, ou encore, des partisans d un modèle libre qui s'essaieraient à contrecarrer l'emprise. Cory Doctorow donne quelques scénarios, en prenant pour exemple les prothèses auditives électroniques, et les voitures sans chauffeur de Google.

"Vous êtes un mineur (sourd) et vos parents, profondément religieux, payent pour vos implants cochléaires [prothèse auditives internes], et demandent un programme qui vous empêchent d'entendre des blasphèmes.  Vous êtes sans le sou, et une compagnie commerciale vous propose ces implants, mais avec des publicités, qui écoutera vos conversations et insérera "des discussions que les marques que vous adorez. Votre gouvernement accepte de payer pour l'opération et les implants cochléaires, mais il archiveront tout, et utiliseront les données sans que vous le sachiez, et sans  votre consentement. Délirant ? L'agence de surveillance de la frontière canadienne vient juste d'être forcée d'abandonner un projet, celui de de truffer tous les aéroports de la nation avec des micros ultra sensibles cachés, conçus pour enregistrer toutes les conversations."

Cette guerre civile hypothétique, passé mouchards de surveillance étatique, se poursuivrait devant les tribunaux, les organes politiques, autour d'une simple question commerciale : qui est propriétaire de l'objet (implants, voitures, etc.). Le fabricant ? L'utilisateur ?Où commencent et où s'arrêtent les droits des deux parties, utilisateur et concepteur, particulièrement si les utilisateurs ne sont pas propriétaire de leurs objets et systèmes automatisés ? Assistera-t-on à une guerre civile à la Matrix contre les puces et mouchards insérés dans les cartes mères et les trackers de tous nos objets familiers "pour notre bien"? Cory Doctorow n'est, comme à son habitude, pas optimiste devant le rapport de forces à venir, et maintient donc ses prédictions de "guerre civile dans la tech".

"Rappelez-vous qu'il y a quatre grandes catégories de clients pour les logiciels actuels de censure/surveillance/espionnage : les gouvernements autoritaires, les multinationales, les écoles, et les parents paranoïaques". Les besoins techniques des mères angoissées, des systèmes éducatifs et des entreprises convergent avec ceux des gouvernements syrien ou chinois. Ils peuvent ne pas partager les mêmes buts idéologiques, mais ils ont  des moyens techniques vraiment similaires pour parvenir à ces fins. Nous sommes très indulgents envers ces institutions dans la mise en place de leurs buts. Vous pouvez faire à peu près tout si vous protégez les actionnaires et les enfants'. 

Il rappelle sa profession de foi, qui est celle de nombreux autres développeurs : la prise en compte et la liberté de l'utilisateur. 

"Quand nous demandons la liberté pour les propriétaires, nous le faisons pour de nombreuses raisons, mais la plus importante est que les programmateurs ne peuvent pas anticiper toutes les contingences que leur code auront à affronter. Que même si  l’ordinateur dit oui, vous pourriez toujours avoir besoin de dire non".

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