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Pourquoi la guerre grandissante contre le plastique passe à côté du sujet
©DAVID MCNEW / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / AFP

Atlantico Green

Pour répondre à "l'urgence écologique", le Premier ministre Edouard Philippe a réaffirmé mercredi l'objectif d'un taux de recyclage des plastiques de 100% d'ici 2025.

Rémy Prud'homme

Rémy Prud'homme

Rémy Prud'homme est professeur émérite à l'Université de Paris XII, il a fait ses études à HEC, à la Faculté de Droit et des Sciences Economiques de l'Université de Paris, à l'Université Harvard, ainsi qu'à l'Institut d'Etudes Politique de Paris. 

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La priorité donnée par le premier ministre au problème des déchets de plastiques est risible. S’il y a bien un domaine où nous sommes exemplaires, c’est celui-là. La France « produit » annuellement 1,2 millions de tonnes de déchets de plastiques, qui sont collectés à 98%. Ces déchets sont incinérés à 70%, recyclés à 21%, et mis dans des décharges à 7%.

On voit mal pourquoi on se focaliserait sur le taux de recyclage. Incinérer, et  produire de l’énergie dont on a grand besoin, est aussi utile que recycler. Mettre les déchets plastiques dans des décharges contrôlées protège autant l’environnement que le recyclage, et le fait sans consommer d’énergie.

Restent 2% des déchets plastiques, soit 24 000 tonnes qui sont perdus dans la nature, ce qui est certainement affreux, horrible, et condamnable, mais négligeable à côté des déchets éoliens..

24 000 tonnes, c’est trop à coup sûr, mais c’est 500 fois moins que le 1,2 millions de tonnes de béton coulés chaque année pour construire environ 800  éoliennes (on compte 1500 tonnes pour les fondations de chaque éolienne).  Pour la biodiversité, le béton ne vaut pas mieux que le plastique. On nous dit que les plastiques (tous les plastiques ou certains seulement ?) ne sont pas biodégradables. On n’a pas besoin de nous le dire pour le béton, tant cela saute aux yeux : les bunkers du mur de l’Atlantique sont toujours là 75 ans après leur construction, et pour encore quelques siècles.

Pour l’environnement, les déchets de béton des éoliennes sont donc des centaines de fois plus graves que les déchets de plastique. Mais l’indignation que suscitent ces sous-produits la société moderne est inversement proportionnelle à leur importance. On vilipende les déchets plastiques, alors qu’on applaudit les amas de béton. Haro ! sur le petit ; bravo ! pour le gros. Dans le même discours, le premier ministre, qui s’offusque tant de ces 24 000 tonnes de plastique, s’engage solennellement à mettre beaucoup de l’argent public qu’il n’a pas dans la multiplication par trois des éoliennes et de leur béton.

Mais, dira-t-on, une partie de ces déchets plastiques vont dans la mer. Les éoliennes aussi. Près de 500 éoliennes en mer vont être implantées près de nos côtes. Cela représente, sur une dizaine d’années, 2,7 millions de tonnes de béton (on compte 6000 tonnes par éolienne). 

Comment expliquer ce paradoxe (pour ne pas dire cette offense au bon sens) ? Provient-il du poids des lobbies ? De l’ignorance des élites ? Du tourbillon des idéologies ? L’indignation est une vertu. Mais l’indignation orientée est ce que l’on appelait autrefois une petite vertu.

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