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Ferrand enferré : la morale, garante du moral
©Reuters

Responsable, un peu coupable...

Pour Macron, remercier Ferrand serait comme un peu se couper un bras. Mais c’est parfois ce que l’on fait pour éviter la gangrène.

Hugues Serraf

Hugues Serraf

Hugues Serraf est écrivain et journaliste. Son dernier roman : La vie, au fond, Intervalles, 2022

 

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Si j’étais président, comme disait un chanteur de variétés du temps de Maritie et Gilbert Carpentier, je serais bien embêté d’avoir nommé Dingo à la Cohésion des territoires avant d’avoir réellement inspecté ses placards à la recherche d’éventuels cadavres. OK, Richard Ferrand n’est a priori coupable de rien, du moins au sens juridique même si le diable se planque parfois dans les détails, mais ça ne l’empêche pas de faire tâche dans un gouvernement issu d’une campagne marquée par les turpitudes fillonnesques et dont la première initiative sera de « moraliser la vie politique ».

Sur l’emploi de son fiston, il n’y a pas grand-chose à dire. Il l’aurait fait bosser pour de vrai, pour une rémunération à peu près raisonnable, et tout juste peut-on lui reprocher un chouia de tartufferie pour ne pas l’avoir mentionné lorsqu’il pourfendait les travaux d’aiguilles de Penelope, qui comme chez Homère, ne laissaient guère de traces.

Sur son histoire immobilière, en revanche, c’est plus ambigu. Pour ce que l’on en sait à ce stade, l’épouse du ministre aurait fait l’acquisition d’un local après avoir reçu l’assurance que les traites et la mise en conformité en seraient intégralement prises en charge par les Mutuelles de Bretagne, une structure dont Ferrand était alors le boss.

Le couple se serait donc constitué un élément de patrimoine sans investir un kopeck, le Crédit agricole n’ayant pas hésité à financer 100 % d’une transaction aussi solidement garantie. On nous dit que, de toutes les propositions étudiées par le conseil d’administration, celle de madame Ferrand était la meilleure, au plan pratique comme au plan financier, et c’est possible, mais n’importe quel clampin serait capable, une fois les termes d’un appel d’offre connus et l’assurance de l’emporter gravée dans le marbre, de créer une SCI de circonstances, de dénicher un local et d’obtenir un prêt susceptibles de rentrer dans les clous...

Et quand bien même Richard Ferrand n’aurait pas directement participé à la décision, on imagine que les administrateurs avaient une petite idée de l’identité de la soumissionnaire…

Emmanuel Macron peut faire deux choses : ignorer superbement tout ce barouf jusqu’à ce qu’il s’éteigne, au motif que, après tout, cette affaire est ancienne et n’implique pas d’argent public ; remercier chaudement son collaborateur empêtré pour la qualité de ses services et s’en trouver un autre plus cohésif.

Dans le premier cas, ce serait ternir un parcours sans faute (ou presque) et donner le sentiment que le cliché fatigué du deux poids-deux mesures a encore un bel avenir, ses adversaires n’ayant aucune raison de se priver d’en faire des tonnes jusqu’au second tour des législatives. Mais ça marcherait sans doute. Dans le second, ce serait au contraire apporter une nouvelle preuve que nous avons effectivement changé d’époque, que, quel qu’en soit le prix, le président assure et ne tolère aucune ambiguïté risquant de décrédibiliser son action.

Remercier Ferrand, proche parmi les proches, ce serait sans doute se couper un bras. Mais un bras façon queue de lézard. Un bras qui repousserait, quoi...

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