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"En même temps" macronien : petit éloge de la complexité en politique
©Reuters

Fromage et dessert

Le terrain politique est le seul sur lequel binarisme et fermeture d’esprit passent pour des valeurs positives. Mais ça peut changer.

Hugues Serraf

Hugues Serraf

Hugues Serraf est écrivain et journaliste. Son dernier roman : La vie, au fond, Intervalles, 2022

 

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Peu de gens se targuent ouvertement d’être des crétins binaires, pour lesquels tout est soit blanc soit noir, ouvert ou fermé, on ou off. Et la fermeture d’esprit et l’incapacité à appréhender la complexité sont rarement citées comme les meilleurs moyens de séduire un recruteur au cours d’un entretien d’embauche, par exemple...

La politique est pourtant l’un des rares domaine ou ce binarisme est non seulement accepté, mais même résolument présenté comme une « valeur ». On est « de droite », on est « de gauche », on fait sien tout un corpus de principes et de dogmes sur lesquels on décide de ne plus jamais revenir puisqu’il finit par nous définir, et l’on va jusqu’à se vanter de n’en avoir jamais dévié en dix, vingt, trente ou quarante ans, à l’inverse de ces girouettes et autres retourneurs de vestes pour lesquels il ne faudrait montrer que du mépris.

Posséder des convictions intangibles, fondées sur une vraie réflexion personnelle ou de solides arguments pratiques, n’est certainement pas ici le problème –ce serait même admirable– mais plutôt la volonté de rester fidèle à un kit de prêt-à-penser que rien ne saurait ébranler. Pas même les faits ou le réel. Surtout pas les faits ou le réel.

Le fameux « en même temps » de Macron, abondamment moqué par ses adversaires au motif qu’il ne serait qu’un entre-deux mou, est pourtant le concept le plus stimulant à avoir émergé de cette campagne. Pas au sens d’un centrisme ramasse-tout qui ne conduirait qu’à des solutions « moyennes » sur l’ensemble des sujets, à la manière des synthèses bancales dont le feu le PS s’était fait une spécialité (et dont il est d’ailleurs mort), mais au sens d’une approche plus panoramique et et pragmatique des problèmes.

A l’exception des mouvements prônant une transformation radicale et polarisante de la société, du néo-robespierrisme des uns au néo-pétainisme des autres, on imagine que l’immense majorité des citoyens d’une démocratie avancée et « moderne » comme la nôtre (les guillemets sont de rigueur, le mot « moderne » appelant pas mal « d’en même temps ») aspire essentiellement à évoluer dans une société raisonnablement prospère, solidaire et équitable, où seraient respectés l’État de droit et les libertés individuelles. Peu ou prou le résumé du projet macronien.

On ne sait évidemment pas, à ce stade, si le nouveau président sera à la hauteur de ses ambitions « en même-temptistes ». Les binaires sont d’ailleurs suffisamment nombreux à œuvrer au retour rapide à l’ordre ancien pour qu’un échec soit envisageable, préférant par exemple voir un écolo comme Nicolas Hulot et un ancien d’Areva comme Édouard Philippe s’étriper, à la télé, au lieu d’élaborer ensemble, au gouvernement, une politique énergétique simultanément efficace et volontariste en matière d’environnement.

On ne le sait pas, mais on peut au minimum l’espérer. Le doute et l’espoir en même temps, quoi...

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