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Durable, ultraconnectée et citoyenne : voici comment la ville du futur va s'adapter aux nouveaux modes de vie du quotidien
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Atlantico Green

La troisième conférence des Nations Unies sur le logement et le développement urbain durable, Habitat III, se tiendra du lundi 17 au mercredi 20 octobre. L'occasion de revenir sur les transformations entreprises par les villes, face au défi climatique mais aussi à la révolution du "partage."

Lois  Moulas

Lois Moulas

Lois Moulas est membre de l'Observatoire de l'immobilier durable et expert en immobilier durable.

Diplômé de Supélec avec une spécialisation dans les systèmes énergétiques, Loïs Moulas s’associe avec deux amis pour fonder Sinteo en 2008, un bureau d’études environnemental passé de 3 collaborateurs à 40 en 5 ans, où il occupe les différents postes de Direction jusqu’en 2015. Il co-fonde en 2012 l’Observatoire de l’Immobilier Durable (OID) en collaboration avec ses membres fondateurs (Altarea Cogedim, Amundi Immobilier, l’ARSEG, La Francaise REM et Société de la Tour Eiffel), le premier observatoire de l’immobilier tertiaire en France.

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Atlantico : Quels défis les villes françaises auront-elles à relever dans les 20 prochaines années pour devenir "durables" ?

Lois Moulas : La ville durable doit être économiquement et socialement « durable ». Sa conception doit être capable d’intégrer l’impératif d’un développement respectueux de l’environnement, efficient dans son utilisation des ressources, notamment énergétiques, capable de gérer et d’absorber ses propres nuisances, avec une activité pour tous, qu’elle soit économique, culturelle ou sociale.

Pour se faire, on retiendra trois défis majeurs : la maitrise des temps de déplacement des personnes et des biens ; une gouvernance qui remettent le citoyen au centre des décisions ; la transition sociétale et environnementale.

Pour reprendre les propos d’Etienne Riot, Docteur en Urbanisme, « La question du développement urbain va être celle d’un agencement économique et d’un équilibre sociétal évitant de faire des métropoles des archipels coupées de leurs arrière-pays, elles doivent être inclusives et non ségrégatives comme elles tendent à l’être aujourd’hui.» En effet, les villes doivent être les locomotives des territoires et ainsi cesser d’assécher le dynamisme des zones attenantes.

La numérisation des villes, des quartiers et des bâtiments sera mise au service d’un bien commun intelligent. On parle d’accompagner la transition d’une économie basée sur la propriété à une économie de la fonctionnalité, c’est-à-dire une économie de partage. Cette économie où l’on mutualise les ressources, ne serait se résumer à un affichage tel que nous le connaissons avec certaines macro-organisations comme AirBnB, on parle ici de partager réellement la valeur générée par ces gains de productivité.

L’agriculture urbaine, la biodiversité, les nouveaux modes de travail, la conception bas-carbone, la gestion des cycles de l’eau, sont autant d’enjeux sur lesquels les acteurs français doivent continuer à se mobiliser dans les 2 prochaines décennies.

Maryse Gautier L'enjeu de la conférence Habitat III est de répondre aux défis immenses que les villes vont devoir affronter dans un contexte d'urbanisation croissante. Les villes du Sud connaissent toujours une croissance démographique considérable, qui explique le fait que la majorité des grandes villes seront créées dans le sud dans les 20 ans qui viennent. Pourtant, les villes du Nord auront aussi à répondre de défis tout aussi immenses : l'accroissement des écarts entre quartiers, aboutissant à une ségrégation spatiale, sociale et économique, un vieillissement de la population urbaine, requérant de nouvelles demandes, dans certains cas, une décroissance démographique aboutissant à des villes en réduction, un phénomène de migration qui s'installe dans la durée, et aussi, un étalement urbain qui continue malgré une stabilisation démographique en moyenne.

L'ambition du Nouvel Agenda Urbain aura donc été de dérouler une vision et des engagements portant un caractère universel, répondant aux défis de toutes les villes, même si les solutions, quant à elles, devront trouver des réponses ancrées dans le contexte local.

Plus concrètement, à quoi  les villes françaises "durables" ressembleront-elles idéalement dans 20 ans selon vous ? 

Lois Moulas : Les villes françaises de demain se réfléchiront à l’échelle du quartier, autosuffisant autant que se peut, et qui constitueront une trame d’îlots à taille humaine, interconnectés entre eux dans tous les sens du terme, de l’électron à l’information. Ces ilots offriront une pluralité de biens, de services et d’activités. Ils permettront à une personne d’accéder à la plupart de ses besoins en moins de 15 minutes.

Ainsi, la ville de demain sera connectée. Si la SmartCity existe déjà au stade du démonstrateur dans certains quartiers (IssyGrid, NiceGrid, etc.), le chemin est encore long pour qu’elle prenne réellement corps. En effet, les nouvelles technologies ont permis un essor de certains des services de mutualisation. Nous avons déjà tous expérimenté la mutualisation des places de parking, la mutualisation des moyens de transport (vélov, autolib, etc.), la mutualisation des bureaux (Neo Nomade, Bureau-A-Partager, etc.), les exemples sont nombreux.

Demain, la ville connectée doit aussi permettre la mutualisation des ressources, en sus de celle des services rendus possibles par les multiples sociétés innovantes. Il reste donc du chemin à parcourir sur le partage des fluides, de l’électron, des espaces disponibles pour l’agriculture urbaine, etc.

La ville de demain consomme, produit, réutilise puis recycle et enfin partage. L’apparition des "ressourceries" n’en est qu’à ses balbutiements et ce phénomène devrait s’amplifier dans les décennies à venir. Il en va de même pour ce qui est de l’autoproduction d’énergie, la production de denrées alimentaires ou la démocratisation des FabLabs. Les super conciergeries se seront plus réservées uniquement aux collaborateurs de grandes entreprises.

Enfin, la mixité fonctionnelle de l’espace urbain et surtout des bâtiments est un élément essentiel de la ville de demain. Si on prend l’exemple de l’immeuble de bureau, il sera conciergerie, lieu de récréation et restauration et lieu de travail. L’essor important des espaces de coworking constaté ces dernières années traduit bien cette tendance liée à l’évolution des modes de travail. Il faut donc concevoir des bâtiments réversibles et mixtes. 

Maryse Gautier : Le Nouvel Agenda Urbain a cherché à définir les grands principes de la ville durable, ou plutôt la vision de la ville. Il a abouti à une définition en trois points. La ville doit être inclusive et répondre aux besoins de tous les habitants, dont les plus vulnérables, les plus marginalisés, les migrants. La ville doit aussi être sobre dans la gestion de ses ressources naturelles et contribuer à l'atténuation des effets du changement climatique, et résiliente face aux événements naturels qu'ils soient ou non liés au changement climatique. Enfin, la ville doit faire preuve d'une certaine attractivité économique pour fournir à ses habitants les ressources qui leur sont nécessaires. Les composantes de la ville, les services urbains, le logement, les espaces publics, l'offre économique, la culture sont autant de composantes, d'outils, qui doivent contribuer à développer cette vision.

Cette triple définition de la ville durable correspond bien, on le sent intuitivement, à la ville dans laquelle nous aimerions vivre. Il n'existe toutefois pas un modèle et de nombreuses villes, françaises notamment, répondent en tout ou partie à cette définition.

Dans quelle mesure le développement de villes françaises "durables" impactera-t-il notre mode de vie au quotidien ? 

Lois Moulas : Je ne pense pas que ce soit le développement de villes françaises « durables » qui impactera nos modes de vie au quotidien. En effet, on parle plus d’un développement « bottom-up » que « top-down »,c’est justement l’évolution de nos modes de vie au quotidien qui influencent la mutation vers les villes de demain au même titre que la transition numérique et écologique.

"L'habitant de la Ville de demain trouvera tous les services urbains à moins d'un quart d'heure de son logement : commerces, école, loisirs, culture, travail, santé, mobilité. Il sera au cœur de la conception et de la qualité de vie de Son ilot et de Son quartier. Il sera acteur d'une économie de partage guidée par une forte exigence sociétale et environnementale. La ville de demain devra mettre sa performance, sa transformation digitale et son adaptabilité à Son service" précise André Durbec, conseiller du Commerce Extérieur de la France et vice-président du Groupe d'action international du COSEI.

Ainsi, le consomm’acteur vie plusieurs vies en parallèle, il est coach sportif le soir, employé de bureau la journée, agriculteur le weekend. Il contribue à différents niveaux au développement, ou plutôt à la transition vers cette ville de demain que nous souhaitons durables. Ce sont les personnes qui font la ville de demain, les générations Y, Z et les suivantes, il serait anachronique de ne pas les impliquer dans sa conception.

Mayrse GautierPour que ce concept de la ville durable ne reste pas une utopie et qu'il devienne réalité, le nouvel agenda urbain s'est penché dans une deuxième partie sur les conditions nécessaires à sa mise en œuvre. Le texte affiche avec force la nécessité de « mettre les habitants au centre ». En d'autres termes, la ville se fait pour ses habitants mais elle se fait aussi avec ses habitants. Les décideurs de nos collectivités doivent s'engager sur une gouvernance participative, donnant aux citoyens les moyens de contribuer aux décisions, qu'ils représentent la société civile, le secteur privé, les professionnels, les chercheurs. En retour, les habitants doivent aussi contribuer dans leurs comportements à faire évoluer leur ville, par des changements dans leurs habitudes de mobilité, de tri sélectif des déchets, de développement d'une économie solidaire, ou en un mot, d'un humanisme urbain.

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