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Élections régionales : Pourquoi je n'ai pas envie d'aller voter (et pourquoi j'irai tout de même)
©Reuters

Difficile devoir civique

Ça paraît dingue, dit comme ça, mais en faisant un effort, il est parfaitement possible de trouver une bonne raison de traverser la rue pour aller voter. Si vous n'en avez pas, je vous prête la mienne.

Hugues Serraf

Hugues Serraf

Hugues Serraf est écrivain et journaliste. Son dernier roman : La vie, au fond, Intervalles, 2022

 

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Bon, je ne vais pas vous raconter d'histoires, je passe pour un type déterminé et résolu, comme ça de loin, mais en réalité je suis exactement comme vous : je n'ai pas spécialement envie d'aller voter aujourd'hui. D'abord, toujours comme vous, je ne sais même pas pour quoi on vote au juste, avec cette réforme territoriale encore au stade du brouillon, ces départements dont personne n'a compris s'ils allaient disparaître ou non, ces nouveaux partages de compétences et de budgets à l'intérieur du mille-feuilles que le monde entier nous envie pour sa clarté et son efficacité...

Et s'il n'y avait que ça ! Non seulement je ne sais pas pour quoi on vote, mais je ne sais même pas pour qui voter. Avant, c'était simple. J'étais de gauche en pilotage automatique et je votais systématiquement pour le PS sans trop me poser de questions. Oh, il y avait bien eu cette fois où j'avais dû voter Chirac en me bouchant le nez, mais c'était la fameuse « exception qui confirme la règle » ; un incident de parcours sans conséquences.

Mais l'âge venant, on change. Les courgettes en salade, par exemple, je n'aimais pas, je n'en prenais jamais, puis je leur ai redonné leur chance et, finalement, c'est pas si mauvais que ça. Avec le PS, c'est un peu pareil mais dans l'autre sens. Un beau matin, j'ai fini par me demander si j'étais vraiment obligé de voter pour des gens avec lesquels je n'étais plus d'accord sur grand chose. Aux municipales 2014, tiens, j'ai même failli carrément voter à droite au premier tour parce que je trouvais NKM plus jolie qu'Hidalgo et qu'elle voulait faire rouler le métro toute la nuit mais je me suis ravisé au dernier moment parce que tout de même, faut pas déconner non plus...

Des Verts qui ne servent à rien mais ne font de mal à personne...

Puis je me suis relocalisé dans le sud, où la gauche et la droite sont encore plus grotesquement interchangeables qu'à Paris : les mêmes cliques clientélistes trempant dans le même genre d'affaires louches ;  les mêmes notables indéboulonnables et multi-mandatés. Et tous moches, par dessus le marché. Même pas une vague NKM pour attirer l'électeur midinette ! Bon, je pourrais aussi voter pour les Verts, qui ne servent à rien mais ne font de mal à personne comme les médicaments homéopathiques, mais ils sont alliés au Front de gauche qui, lui, pour le coup, fait un peu trop dans le remède de cheval à effets secondaires flippants.

Je pourrais voter pour n'importe qui, en fait, Nouvelle donne et sa semaine de 28 heures qui doit résoudre le chômage, stopper le réchauffement climatique et ramener la paix dans le monde, ou encore l'une ou l'autre de ces petites listes exotiques dont j'ai du mal à comprendre le programmes mal imprimés sur papier recyclé arrivés cette semaine dans ma boîte aux lettres. Vraiment n'importe qui, je vous dis.

Enfin, n'importe qui puisse nous éviter une victoire du FN, quoi...

C'est sûr, je n'imagine pas convaincre les causes perdues qui pensent vraiment, en leur for intérieur, que Marine, Marion & Co remettront la France à l'endroit à la coupant de ses voisins, en sortant de l'euro, en revenant sur l'avortement, en accroissant les discriminations et les divisions, bref en fichant en l'air tout ce qui reste du consensus sur lequel nous tenons encore tant bien que mal avec ce mix grotesque de nationalisme étroit et de néo-communisme obtus.

Je n'imagine pas non plus convaincre les désabusés au dernier stade qui se disent que, bof, ça ou autre chose...

J'imagine encore moins convaincre ceux d'entre vous qui ont déjà sorti leur matériel de pêche à la ligne du placard.

Je n'imagine convaincre personne de quoi que ce soit en fait, j'ai déjà assez de mal à me traîner jusqu'à l'école primaire du bas de la rue pour aller voter pour n'importe qui, les clientélistes magouilleurs de gauche ou de droite, les petites listes exotiques, les miniaturisateurs de temps de travail, juste pour éviter le drame ultime : une Roberte Ménard blonde aux commandes de ma région d'adoption.

Je vous raconte juste que je me suis trouvé une bonne raison d'aller voter pour n'importe qui dans cette élection de n'importe quoi. Allez, j'y vais. Je pars sauver la France du déshonneur avec mon bulletin de vote. Hum, finalement, je suis assez déterminé et résolu, comme type.

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