Ce que Singapour doit à Lee Kuan Yew<!-- --> | Atlantico.fr
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Lee Kuan Yew est décédé cette semaine, il avait 91 ans
Lee Kuan Yew est décédé cette semaine, il avait 91 ans
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Le nettoyeur

Cette semaine s'est éteint à 91 ans le premier premier ministre du Singapour indépendant, et surtout le fondateur du régime singapourien d'aujourd'hui.

Pascal-Emmanuel Gobry

Pascal-Emmanuel Gobry

Pascal-Emmanuel Gobry est journaliste pour Atlantico.

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Singapour est souvent décrit comme un Etat autoritaire : la canne et la pendaison y sont pratiquées comme peines légales, les droits de l'homme n'y sont pas complètement garantis, et le système électoral est bien calibré pour garantir une majorité au Parti d'action populaire, le parti au pouvoir de manière ininterrompue depuis l'indépendance. Mais ces critiques sont éxagérées : le Parti d'action populaire n'aurait pas pu garder le pouvoir s'il n'était pas populaire, ce dont personne ne doute, et il fait très attention à ce que pense le peuple. Singapour n'est pas complètement une démocratie, mais c'est très loin d'être une dictature.

Ce qui fait l'admiration de Singapour de par le monde, c'est son modèle économique et social. Singapour est aujourd'hui un des pays les plus riches du monde, une des capitales économiques de l'Asie, et si Singapour a été aidé par sa position stratégique en tant que port, personne ne doute que ce succès—un des rares succès économiques de la décolonialisation—est en grande partie dû aux politiques de Lee Kuan Yew.

Singapour est surtout reconnu pour être un des seuls pays au monde—peut être le seul—a avoir résolu l'équation d'un Etat-providence qui garantit la solidarité et d'une économie très dynamique, peu réglementée, et surtout avec des impôts bas. Lee a toujours eu comme priorité première le développement économique de Singapour, et le pays est connu pour être un “paradis” fiscal et réglementaire. Mais il a également reconnu le besoin de cohésion sociale et, contrairement (par exemple) à Hong Kong, Singapour est caractérisé par ses politiques généreuses envers les pauvres et les classes moyennes.

Cette recette magique est d'abord garantie par l'excellence technocratique des hauts fonctionnaires de Singapour. Pas de système de grands corps: ils sont recrutés sur le mérite et peuvent être congédiés en cas d'incompétence. Mais il y a d'autres principes qui font l'efficacité de l'Etat-providence: la tarification, et le choix. La tarification, d'abord: à Singapour, aucun service public n'est gratuit—si quelqu'un n'a pas les moyens de payer, il sera subventionné et le service sera mis à sa porter, mais tout le monde doit payer au moins un petit quelque chose. Ce principe assure l'implication des singapouriens dans leur Etat-providence et empêche la surconsommation.

L'autre principe, et celui-là est encore plus fondamental, c'est le choix. En France, pour cotiser (par exemple) pour sa retraite, on n'a pas le choix : chacun est affilié à un organisme, et ses revenus sont ponctionnés, et versés à l'organisme en question, qui gère la retraite comme il peut. Il n'y a pas de concurrence, pas de mise en responsabilité des acteurs. A Singapour, chacun doit épargner une partie de son revenu pour sa retraite, c'est obligatoire—mais chacun choisit comment (sachant que quelqu'un qui a une retraite insuffisante la verra complétée). Les établissement financiers se mettent donc en concurrence pour recevoir l'épargne des singapouriens.

Un système où l'Etat garantit que chacun aie les moyens d'avoir accès au service public, mais “met en jeu” le titulaire du service public pour qu'il aie le choix et pour mettre en concurrence les différentes offres, est très puissant. La concurrence permet d'augmenter la qualité et de faire baisser les prix.

Ce système a, on l'aura compris, énormément de choses à apprendre à la France. Lee Kuan Yew, fondateur d'une sorte de Venise moderne, nous l'aura appris. 

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