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La volatilité programmée des fonds vautours
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Jamais d'euros sans algo !

Chez certains investisseurs, la machine a remplacé l'homme. Les Hedge Funds, grâce à leurs algorithmes, sont tels des vautours planant au-dessus des marchés, à l'affût de la moindre défaillance microscopique.

Nathalie Joannes

Nathalie Joannes

Nathalie Joannès, 45 ans, formatrice en Informatique Pédagogique à l’Education Nationale : création de sites et blogs sous différentes plates formes ;  recherche de ressources libres autour de l’éducation ;  formation auprès de public d’adultes sur des logiciels, sites ;  élaboration de projets pédagogiques. Passionnée par la veille, les réseaux sociaux, les usages du web.

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La volatilité des places financières est entretenue par les outils informatique  extraordinairement puissants du HFT. Les « algos » du High Frequency Trading  font gagner des centaines de millions de dollars en quelques secondes aux fonds de placements spécialisés dans la spéculation agressive. Au détriment des banques et des Etats.  

Surnommés « fonds vautours », les hedge funds existent depuis une soixantaine d’années. Ce sont des organes d’investissements qui pratiquent la gestion alternative, à hauts risques et à hauts rendements, sur les monnaies, les actions, les obligations, les matières premières. Firmes privées logées dans des paradis fiscaux comme les îles Caïman, elles détiennent chacune une quarantaine de milliards de dollars d’actifs en moyenne mais échappent à tout contrôle. Leur puissance est apparue avec l’autorisation donnée en 1998 aux transactions électroniques. Depuis deux ans, les hedge funds sont à la pointe de l’innovation technologique, très loin devant les Etats et les instances de régulation.

Spéculer à la vitesse de la lumière

Les algorithmes constituent la panoplie des fonds vautours. Ce sont des listes d’instructions données à des  super-ordinateurs qui obéissent à des logiciels très sophistiqués. Avoir les « algos », comme on dit à Wall Street, c’est détenir l’arme absolue : la spéculation à la vitesse de la lumière.

La start up Getco a été créée en 1999, un an après l’autorisation donnée aux traders de vendre et d’acheter par le truchement de systèmes informatiques en réseaux. Aujourd’hui, le produit phare de cette pionnière du High Frequency Trading s’appelle GETAlpha. Il découpe les ordres d’achats et de ventes des hedge funds en petits paquets qu’il disperse en trois centièmes de seconde sur les principales places boursières de la planète. Opérations difficilement décelables puisque disséminées en petites tranches. Opérations massives puisque les spéculateurs peuvent emprunter à des taux très bas, proches de 0% aux Etats-Unis, des centaines de millions de dollars utilisés comme force de frappe. Opérations fulgurantes car si le SpeedTrader achète des actions au moment T1 où leur cours est au plus bas et si le cours remonte de 15% au moment T2, les « algos » de GETAlpha,  ou ceux ultra-rapides d AlgoM2 développé par AlgoTechnologies, peuvent faire gagner des dizaines de millions de dollars dans les quelques secondes qui séparent T1 de T2.

Au début, les traders étaient un peu trop fébriles pour des algorithmes absolument rationnels. Il y a eu des flash crashes : krachs boursiers à la vitesse de l’éclair. Mais depuis deux ans, les fonds vautours disposent de radars informatiques pour déceler leurs prochaines proies – Grèce, Espagne, Italie, France ou Société Générale – et fondre sur elles avant que les politiques, les régulateurs et les commentateurs aient le temps de réellement comprendre ce qui se passe.

Les vautours ont leurs radars

Le Volatility Index (VIX) du Chicago Board Options Exchange est la référence pour tous les outils de modélisation financière. Il a été mis au point en 1993 et continue d’inspirer les informaticiens créateurs de nouveaux outils spéculatifs.

Les radars dérivés du VIX collectent en temps réel les moindres frémissements de cours sur toutes les places financières du monde. Dès qu’ils détectent une vulnérabilité quelconque, ils la transforment en opportunité de gains pour les hedge funds. Leur portée s’exerce sur les trente prochains jours de cotations sur tous les marchés du monde. Par exemple, l’accroissement rapide de l’écart entre les taux obligataires allemands et français signifie que l’Etat français doit servir des rendements de plus en plus élevés pour financer ses déficits. La dette souveraine française est dégradée sans que les agences de notation aient leur mot à dire. (Comparées aux vautours, les agences de notation sont d’aimables tourterelles.) Les vautours peuvent passer à l’attaque en jouant la hausse des taux, c'est-à-dire la France à la baisse. Déclenchement des « algos » du HFT : milliards de dollars en quelques heures. Quand les radars de type VIX ne détectent pas de victimes potentiellement intéressantes (rendements ultra rapides à deux chiffres), les vautours peut toujours manipuler des journalistes et des twittos pour lancer des gazouillis bien orientés sur Twitter : une rumeur de faillite contre une banque. Ils achètent les titres de cette banque au plus bas et les revendent au plus haut, avec profit quand la rumeur est démentie.

Les fonds vautours sont parfaitement connus. Leurs gestionnaires se rencontrent périodiquement pour élaborer des stratégies offensives. En juin dernier, ils étaient à Monaco pour préparer leur bel été juteux avec des « algos » bien affûtés. En septembre, ils seront à Miami, puis à Chicago, à Hong Kong et à Sao Paulo. Leurs super ordinateurs sont installés à Wall Street, juste à côté de ceux, moins puissants, de l’officiel New York Stocks Exchange. Les algorithmes propriétaires qui les font tourner sont bien protégés. Mais il arrive qu’un hacker reçoive un contrat : un hedge fund le paie pour aller piller le code informatique du HFT d’un concurrent.

Les banques victimes potentielles de l’appétit des hedge funds font semblant de se plaindre. En fait, elles sont complices dans la mesure où elles font parfois appel à leurs prédateurs pour reconstituer rapidement leurs marges avant la publication d’un bilan décevant. D’ailleurs, avis aux informaticiens doués, les banques – y compris en France - embauchent à prix d’or toute personne capable de comprendre et de perfectionner les « algos » des HFT qu’elles mettent en place.

Car, comme le disait dernièrement le gestionnaire d’un hedge fund français, « Il va y avoir beaucoup de fric à se faire ». En 2013, plus de 2500 milliards d’euros d’emprunts devront être remboursés en même temps par les banques américaines et européennes. Le FMI appelle çà « le mur de la dette ». Amateurs de HFT, à vos « algos »…

Pour en savoir plus :

Le prochain sommet des Hedge Funds

GET Alpha de la firme Getco

Algo M2 d’Algo Technologies

Le forum du High Frequency Trading

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