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Manuel Valls : "Être de gauche, ce n'est pas régulariser tous les sans-papiers"
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Socialiste de droite ?

Dans un entretien au Monde, le ministre de l'Intérieur précise sa politique sur l'immigration. Il annonce trois circulaires : une pour mettre fin à la rétention des familles, une autre pour préciser les critères de régularisation, et une troisième pour faciliter les naturalisations.

[Mis à jour jeudi 28 juin à 12h]

Suite aux propos qu'a tenus Manuel Valls dans le quotidien Le Monde, le co-président du Parti de gauche Jean-Luc Mélenchon a accusé le ministre de l'Intérieur ce jeudi sur BFMTV-RMC de valider une thèse du Front national liant immigration et problèmes sociaux. Il a notamment déclaré que "M. Valls vient de valider une thèse absurde, anti-économique, ridicule du Front national", ajoutant qu'"il n'y a pas de corrélation entre le nombre des immigrés et le chômage. C'est un mensonge".

[Mis à jour mercredi 27 juin à 19h]

Le ministre de l’intérieur Manuel Valls a annoncé ce mercredi dans un entretien auMonde une circulaire sur la régularisation au cas par cas des sans-papiers étrangers, excluant de dépasser le chiffre d’environ 30 000 par an que réalisait l’ex-gouvernement de droite. "Une circulaire pour préciser les critères" de régularisation "est donc en préparation", a déclaré le ministre en soulignant qu'"il n’y aura pas de régularisation massive".Il a précisé que les critères sont "les années de présence en France, la situation par rapport au travail, les attaches familiales, la scolarisation des enfants".

Selon lui, les critères "ont été interprétés de manière beaucoup trop restrictive et n’ont pas été appliqués de manière uniforme sur l’ensemble du territoire par le précédent gouvernement. Une circulaire pour les préciser est donc en préparation". "Je veux mettre fin à l’arbitraire mais les personnes susceptibles d'être éloignées (...) doivent être traitées dignement", a-t-il souligné. "Aujourd’hui, la situation économique et sociale ne permet pas d’accueillir et de régulariser autant que certains le voudraient. C’est ma responsabilité de ministre de l’intérieur de le dire. Je l’assume", a affirmé Manuel Valls.

Concernant le droit au séjour, le ministre estime qu'il doit "être rendu plus simple", car "les difficultés à obtenir un titre de séjour sont des facteurs de fragilisation économique, psychologique, sociale, et donc des obstacles à l'intégration". A ce titre Manuel Valls a annoncé que le gouvernement entend créer "un titre de séjour intermédiaire d'une durée de trois ans qui permette de stabiliser ceux qui vivent et travaillent de manière régulière" en France.

Se défendant d'être le "monsieur Sarkozy" du gouvernement de gauche, Manuel Valls estime que la politique de l’ex-chef de l’Etat "a été marquée par (...) l’idée que l’immigré était responsable des problèmes des Français". "Être de gauche, ce n’est pas régulariser tout le monde et se retrouver dans une impasse."

Le ministre a annoncé une autre circulaire pour mettre fin à la rétention des familles, une autre pour faciliter les naturalisations qui ont chuté de 40% entre 2010 et 2011, et une loi pour créer un nouveau titre de séjour de trois ans.

Des propos qui font grincer des dents à gauche et chez les défenseurs des migrants, échaudés par la "fermeté" du ministre et par son discours jugé trop éloigné de l'"humanisme" traditionnel du parti. Dans un article daté de ce mercredi, Le Monde souligne que le nouveau ministre a d'emblée inquiété les défenseurs des migrants, "en conservant dans ses attributions les dossiers de l'asile et des naturalisations".

Dans un communiqué, l'association Act Up estime que pour les sans-papiers, "le changement ça commence mal", et dénonce la "poursuite des expulsions"."Le changement tant promis ne commencera manifestement pas par un coup d'arrêt aux politiques racistes de Sarkozy. Les premiers faits d'armes de Manuel Valls rappellent les plus sombres heures des ères Besson, Hortefeux ou Guéant", déplore l'association.

Les deux députés UMP Eric Ciotti etXavier Bertrand ont de leur côté dénoncé ce mercredi une "politique dangereuse" pour le premier et "un double langage" pour l'autre. "Manuel Valls est dans un double langage : pas de régularisation massive, mais il assouplit les critères de régularisation", a estimé Eric Ciotti avec pour conséquence selon lui : "La France envoie un message à tous ceux qui aspirent à venir sur notre territoire". Il a par ailleurs ciblé l'arrêt de la rétention pour les familles, annoncé par Manuel Valls. "Les centres de rétention étaient des outils indispensables pour une reconduite à la frontière. Comment les personnes qui vont être interpellées en situation illégale vont-elles se soumettre à la loi de la République?" "M. Valls se veut pragmatique, c'est surtout quelqu'un qui renonce aux engagements de François Hollande", a commenté pour sa part l'ex-ministre Xavier Bertrand.

Olivier Besancenot, l'ancien candidat à la présidentielle (NPA) a jugé que le gouvernement Ayrault avait commis "sa première grande faute politique"."M. Valls est en train de nous dire que le gouvernement dit de gauche va s'inscrire dans la continuité de la politique répressive sur le terrain de l'immigration. Donc c'est une fracture morale avec le peuple de gauche et ce sera un front de lutte et un front de résistance", a-t-il estimé.

Dans un communiqué, le PCF a quant à lui appelé la gauche à ne "pas mettre ses pas dans ceux de Claude Guéant"."Malgré des annonces prometteuses sur la fin de la rétention pour les enfants ou la création d'un titre de séjour de 3 ans, les propos de Manuel Valls sur la question des migrants sont encore trop simplistes, parfois même inquiétants : rien sur les conditions de vie des immigrés expulsés dans leur pays où ils risquent parfois le pire, rien sur la question des droits tel que le droit de vote des résidents étrangers", déplore-t-il.

Déjà au moment des primaires socialistes, Manuel Valls s'était distingué de ses concurrents par sa fibre sécuritaire. Il avait d'ailleurs proposé la mise en place de quotas migratoires, là où Arnaud Montebourg plaidait pour des "critères généreux" de régularisations.

Le ministre est par ailleurs fortement apprécié à droite : L'Express rappelle qu'au moment de sa nomination Jean-François Copé, secrétaire général de l'UMP, l'a appelé et s'est dit "sincèrement heureux de sa nomination". "Manuel et moi, quelle différence ?" demandait par ailleurs au même moment Christian Estrosi. Observant les premiers pas du nouveau ministre, Xavier Bertrand glissait : "Valls? C'est Sarkozy sans le son."

Cette image de fermeté Manuel Valls la revendique : "C'est pour cela que j'ai été nommé", aime-t-il à rappeler.

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