Ukraine, Italie : les conséquences que les récents changements politiques pourraient avoir sur l'économie mondiale<!-- --> | Atlantico.fr
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Quelles sont les conséquences sur l'économie mondiale des récents changements politiques en Ukraine et en Italie ?
Quelles sont les conséquences sur l'économie mondiale des récents changements politiques en Ukraine et en Italie ?
©REUTERS/Remote/Stringer

Difficiles prévisions

Dans sa note hebdomadaire mensuel, le Crédit Agricole revient sur l'actualité économique et financière. Les évènements de ces derniers jours ont démontré qu’il était difficile d’identifier les tendances sous-jacentes de l’environnement économique, politique et financier.

Banque Crédit Agricole

Banque Crédit Agricole

Souvent appelé la Banque verte du fait de son activité d'origine au service du monde agricole, la Banque Agricole est un réseau français de banques coopératives et mutualistes qui est devenu depuis 19902 un groupe bancaire généraliste international.

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Les investisseurs aiment les lignes droites (« the trend is my friend »), mais ils savent que l’économie est le plus souvent cyclique. Mais, et cela ajoute à la complexité, il faut garder à l’esprit que le concept de cycle d’activité n’est pas très opérant à l’heure actuelle. Ces derniers jours, une série d’évènements a démontré qu’il était difficile d’identifier les tendances sous-jacentes de l’environnement économique, politique et financier.

Commençons par l’environnement économique. Les deux principaux développements en cours sont la lente "reprise" en Occident et l’évolution du régime de croissance dans de nombreux pays émergents. Le message est clair : la confiance des entreprises et des ménages pourrait être facilement érodée par des déceptions sur la dynamique économique actuelle ou par des difficultés à comprendre les changements en cours. Cela n’a-t-il pas été le cas récemment avec la publication des indices PMI en zone euro et en Chine et un certain nombre d’indicateurs plus faibles que prévu aux États-Unis ?

Confrontées à cette logique "d’entre-deux", laquelle, en outre, diffère d’un pays à l’autre, les principales Banques centrales ne réagissent pas de la même manière. Ceci peut facilement déstabiliser les investisseurs, ne serait qu’en raison des implications peu claires de cette situation en termes de flux de marché. L’époque du règne uniforme des politiques monétaires accommodantes se termine progressivement. La Fed et la Bank of England tentent de trouver un point d’équilibre entre la poursuite de l’assouplissement et l’annonce d’une normalisation, la Bank of Japan confirme son intention de maintenir un réglage très accommodante, la BCE conserve indéniablement un biais accommodant, mais il n’est pas certain qu’elle passe à l’action. Dans tous les cas, il est important de comprendre ces différences ou nuances et c’est sur ce point qu’une coordination est nécessaire.

Les marchés ne peuvent être indifférents vis-à-vis de l’Italie et de l’Ukraine. Comment doit-on interpréter le changement de Premier ministre en Italie ? S’agit-il  d’une nouvelle "révolution de palais", éloignée des électeurs et qui illustre une nouvelle fois la forte fragilité et l’instabilité chronique de la sphère politique italienne, laquelle est probablement largement responsable des déséquilibres économiques accumulés depuis un certain temps ? Ce développement est-il a contrario annonciateur de changements structurels imminents sur les plans économique et institutionnel (libéralisation du marché du travail, loi électorale…) que les deux prédécesseurs de Matteo Renzi ne sont pas parvenus à mettre en œuvre ? À l’évidence, une mise en œuvre rapide et efficace de réformes enverrait un message positif à propos non seulement de l’Italie, mais bel et bien de l’Europe entière. À l’heure actuelle, les Italiens semblent sceptiques, tandis que les investisseurs semblent plus confiants.

L’Ukraine peut être présentée comme un pays sans grande importance : son PIB est inférieur à 200 Mds USD (moins de la moitié de celui de la Pologne pour une population comparable) et son PIB par habitant est de l’ordre de 4 000 USD (à peine la moitié du niveau de la Roumanie). La crise actuelle pourrait cependant résonner tout autour du globe pour deux raisons. Premièrement, compte tenu de la prudence déjà exprimée par les investisseurs vis-à-vis de plusieurs autres pays  émergents, le dossier ukrainien pourrait jouer un rôle de catalyseur et entraîner une nouvelle vague de défiance. Ensuite,  se pose la question plus cruciale d’une réévaluation des relations entre la Russie et l’Occident. On se souvient que l’invasion partielle de la Géorgie par la Russie en 2008 avait provoqué l’abandon des projets d’extension de l’OTAN dans la périphérie de la Russie. La crise ukrainienne peut-elle modifier ce rapport de force ? C’est possible, en raison d’une série de développements : l’UE – qui cherche une intégration plus forte dans son périmètre actuel – a besoin d’affirmer sa  force et sa volonté politique face à une Russie économiquement affaiblie, tandis que des manifestants battent le pavé de Kiev en brandissant le drapeau de l’UE. Après les tensions grandissantes entre la Chine, d’un côté, et les États-Unis et ses alliés, de l’autre, dans la région du Pacifique, ne sommes-nous pas aujourd’hui témoins d’une nouvelle illustration de l’évolution vers un monde plus multipolaire et potentiellement plus conflictuel ? L’expression "sphères d’influence" n’est-elle pas la clé d’un monde multipolaire ? Si tel est bien le cas, comment les acteurs économiques et financières, qui continuent à envisager le développement de leur activité dans un environnement mondialisé, vont-ils s’accommoder de cette réalité politique naissante ?

Pour les marchés, les deux principaux centres d’attention à court terme seront la politique monétaire américaine et l’équilibre économique et financier dans les pays émergents. Sur la politique monétaire américaine, les corrélations entre les capacités de production inemployées, le coût du travail et l’inflation seront suivies de près. Le risque serait une lecture trop automatique et superficielle de ces corrélations par les marchés. Quant à l’équilibre économique et financier dans les pays émergents, des décisions de politique économique plus strictes dans chaque pays sont probablement le moyen le plus efficace de prévenir tout risque de contagion.


Macro et politique économique

États-Unis

Nous tablons sur un indice de confiance des consommateurs inchangé à 80,7 au mois de février. Les derniers indicateurs suggèrent une bonne tenue de la confiance des ménages en février, malgré les perturbations récentes de l’activité provoquées par les conditions climatiques. Alors que les prix de l’essence ont légèrement augmenté, les marchés action ont également progressé, ce qui devrait soutenir la confiance. Comme à l'accoutumée, nous serons attentifs aux informations du rapport relatives à l’emploi, afin d’obtenir de premières indications sur l'évolution du marché du travail au cours du mois. Nous attendons une baisse de 2,2% des ventes de logements neufs en janvier, à 405k unités en rythme annuel. Les commandes de biens durables ont probablement reculé de 4,8% en janvier, principalement en raison d’une baisse des commandes d’avions à Boeing.

La croissance du quatrième trimestre devrait être revue en baisse, en raison de la faiblesse du commerce extérieur et de la consommation. Nous tablons sur une révision à la baisse de la croissance réelle au quatrième trimestre, de
3,2% (chiffre annoncé le mois dernier) à 2,6%. Les chiffres de commerce extérieur de décembre ont affiché des exportations plus faibles et des importations plus élevées par rapport aux estimations utilisées par le BEA (Bureau of Economic Analysis) pour annoncer la première estimation du chiffre de croissance le mois dernier. La contribution du commerce extérieur à la croissance du quatrième trimestre, initialement estimée à +1,3%, sera donc probablement revue à la baisse. Les ventes au détail hors automobile ont été révisées à la baisse, ce qui suggère que la consommation a moins progressé que prévu au quatrième trimestre. Les stocks étaient également légèrement en dessous des estimations du BEA au mois de décembre. Les estimations actuelles sur la croissance du premier trimestre suggèrent une baisse de la production liée aux conditions hivernales et un ralentissement de la croissance à 1,8% environ en rythme annuel.

Nous prévoyons une révision à la hausse de 0,3 point de l’indice de confiance des consommateurs de l’Université de Michigan pour le mois de février, à 81,5.

Les membres de la Fed interviendront sur de nombreux sujets cette semaine, notamment sur les réformes du système bancaire et les interactions entre politique monétaire et stabilité financière.


Europe

Les dernières données n’ont pas permis de clarifier les perspectives macro- économiques de l’Europe, bien au contraire.  Les indices PMI "flash" manufacturiers se sont légèrement repliés, ce qui souligne la nature fragile et inégale de la reprise. Le recul n’est cependant pas tel qu’il remette sérieusement en cause la dynamique cyclique à ce stade. Les craintes sur le rythme actuel de la croissance en Chine (et aux États-Unis) restent entières et la zone euro serait vulnérable à tout ralentissement significatif de sa demande extérieure – les risques sur notre prévision d’une légère hausse de  l’indice IFO cette semaine sont d'ailleurs plutôt orientés à la baisse. Cependant, à moins d’un nouveau choc sur l’activité,  l’attention de la BCE devrait rester principalement tournée vers les chiffres d’inflation. Les chiffres publiés cette semaine (inflation finale pour janvier et estimation pour février) continueront de faire état d’une dynamique sous-jacente assez faible des prix, ce qui amènera probablement le staff de la BCE à abaisser de nouveau ses projections le mois prochain. Enfin, il faudra peut-être un certain temps avant que la situation politique ne se stabilise en Italie, mais le marché donne au moins  le bénéfice du doute à Matteo Renzi et son gouvernement, qui sera bientôt formé, devrait être capable de remporter la confiance du Parlement cette semaine. Dans l’ensemble, les incertitudes sur les politiques monétaires et la macro-économie devraient laisser le marché sans grande tendance, bien qu’ils soient vulnérables à toute surprise sur l’inflation à l’approche de la réunion de la BCE du 6 mars.

Nous attendons une légère révision à la hausse de l’inflation de la zone euro de janvier à 0,8% a/a (contre une estimation "flash" de 0,7%), compte tenu des statistiques nationales publiées courant février. L’estimation "flash" de février sera publiée vendredi 28, nous attendons 0,7% a/a, en ligne avec le consensus. Toutes les composantes devraient afficher une légère hausse, à l’exception de l’énergie, la forte progression de l’énergie observée en février 2013 n’étant désormais plus intégrée par le glissement annuel. L’inflation sous-jacente devrait rester à un niveau proche de la moyenne observée depuis octobre 2013, à savoir 0,8% a/a. La BCE publiera son rapport sur l’évolution de la masse monétaire (M3) et du crédit en janvier et nous ne serions pas surpris d’observer un rebond du crédit bancaire après la "photo" prise pour la revue des bilans bancaires (AQR). Toute surprise négative ne ferait que donner des arguments supplémentaires en faveur d’un nouvel assouplissement monétaire.

L’indice IFO devrait continuer à progresser en février, mais à un rythme plus modéré qu’en janvier (de 110,6 à 110,9 environ), comme le suggère le rebond des indices PMI composite et ZEW, déjà publiés. Cette tendance haussière semble en ligne avec la consolidation de la croissance attendue au premier trimestre 2014 (à 0,4%  t/t). En termes de composantes, les "conditions courantes" devraient reculer de 112,4 à 112,1, en raison de la faiblesse de la production industrielle en décembre, tandis que les "anticipations" devraient progresser vers 109,5. L’indicateur INSEE sur le climat des affaires dans l’industrie devrait enregistrer une légère baisse en février. L’indicateur composite est attendu à 98 (contre 100, sa moyenne de long terme, en janvier), un chiffre qui serait en ligne avec les indices PMI français, qui ont reculé en février (de 49,3 à 48,5 pour le secteur  manufacturier) et qui confirmerait l’idée selon laquelle la reprise reste fragile en France. Le PIB  français a progressé de 0,3% t/t au quatrième trimestre 2013, mais un ralentissement est attendu au premier trimestre 2014.

La croissance britannique devrait être confirmé à 0,7% t/t (2,8% a/a) pour le quatrième trimestre. Le point le plus intéressant sera la répartition des dépenses par secteur : nous pensons que la reprise a été générale, à l’exception des stocks pour lesquels un certain repli est probable, après la forte contribution du trimestre précédent.

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