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Condamné à perpétuité ? A quoi s'attendre quand une (ou plusieurs) photos de soi nu traînent sur internet
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The naked man

Contrairement aux idées reçues, les données postées sur la toile ne sont pas éternelles. Explications.

Eric Delcroix

Eric Delcroix

Eric Delcroix est conférencier et consultant, spécialiste du web 2.0, des réseaux sociaux et de l'identité numérique. Il a notamment participé à l'ouvrage Les réseaux sociaux sont-ils nos amis ?, paru en juin 2012. Il est créateur du site Génération Z.

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Atlantico : Contrairement aux dires depuis le milieu des années 1990 selon lesquels les données sur internet sont éternelles et qu'elles referont toujours surface, il semble qu'au fil des ans ces informations soient de plus en plus difficiles à retrouver. Les données postées sur la toile disparaissent-elles vraiment ?

Eric Delcroix : En réalité, les données ne disparaissent pas mais sont difficiles à trouver au fil du temps. En faisant une expérience, j'ai recherché des informations que j'avais diffusées sur la toile avant l'an 2000. Personnellement, j'ai réussi à les retrouver car je savais à quels endroits chercher, avec quelle adresse email, avec quelles informations correspondantes, etc. Mais je mets quiconque à l'épreuve de retrouver ces informations facilement. On les trouve seulement si on sait où chercher exactement.

De plus, les informations sont difficiles à retrouver après un laps de temps passé, hormis exceptions de certains éléments qui seraient relayés par des sites très importants. Par exemple, mon blog était, à une époque, relativement connu par Google. J'avais titré un article sur une société avec le mot "arnaque". Quelques années plus tard, cette société m'a demandé de supprimer le mot "arnaque" car ça apparaissait encore dans Google.

Les photographies sont-elles tout aussi difficiles à retrouver que les textes ?

Les photographies suivent le même rythme que le texte en règle générale. Si on prend un exemple concret, les photos avec des cochons d'Inde publiées à une époque étaient  en première page de Google. Au fil du temps, on voit ces photos descendre dans les photos de Google et elles sont de plus en plus difficiles à retrouver.   

Sur la nudité précisément, tout dépend de comment a été faite la recherche. Si on prend un service comme Flickr, comme Tumblr, comme Twitter, et si on fait une recherche "photo sex", on ne verra aucune photo apparaitre. Si on ne fait pas partie d'un réseau intime, on ne peut pas trouver certaines photos. Ça demande une démarche particulière de les trouver, le premier venu ne peut pas trouver les photos. Des photos lambda se retrouveraient plus facilement sur la toile que des photos de nudité. Regardons par exemple Facebook et Pinterest : ils suppriment les photos de nudité !

Cela signifie-t-il que c'est en réalité une question de domaines/secteurs dans lesquels on poste des informations ? Une question de référencement ?

Dans certains types de sites internet, ces images réapparaissent assez facilement. Tout dépend du type d'images et du type de sites qu'on visite.

Si on prend des sites de rencontre ou des sites d'images d'exhibition, on peut trouver des sites où les archives n'ont jamais été purgées. On peut trouver des photos des années 2000 ou antérieures car les photos sont toujours présentes. Si on fait une recherche, géolocalisée avec des villes de surcroit, on peut retrouver des personnes. Les gens ont pris l'habitude de se protéger en se masquant ou en floutant les parties privatives mais ça devient plus compliqué désormais avec la recherche d'images de Google. Avec Google image on peut rechercher la photo et trouver où elle est sur internet. Ainsi, même une vieille photo pourrait ressortir.

Le problème qu'il y a avec les photos de nudité n'est pas le fait qu'elles aient été publiées une première fois. La publication des photos nues de Laure Manaudou est un bon exemple. Ces photos existent toujours mais sont difficiles à trouver. Elles ont été renommées, elles ont été modifiées, donc on les trouvera dans un autre univers de l'internet traditionnel. Il faut vraiment faire une recherche spécifique pour les retrouver.

Quel parallèle peut-on établir entre disparition des données sur internet et droit à l'oubli ?

Le droit à l'oubli se fait naturellement d'une certaine façon. Au fur et à mesure du temps, avec les nouvelles informations qui apparaissent – et ça sera de pire en pire avec Google qui veut privilégier la fraicheur de l'information – ces informations passeront dans les trappes d'internet. Elles seront toujours présentes quelque part mais où ?

D'autres phénomènes expliquent la disparition des images. Dans Facebook, si un groupe est supprimé, les membres du groupe n'ont plus aucun accès aux photos. Ces photos partent peut-être dans le "web noir", une partie du web qui n'est pas facilement visible. Cette histoire de web que l'on voit doit être comparée à un iceberg. Il y a un énorme magma juste en dessous de la pointe émergée, en dessous de la toile où personne n'a accès. Quand on parle de droit à l'oubli, on parle de la face visible ou de l'ensemble de cette masse ?

Propos recueillis par Marianne Murat

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