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La gauche veut créer un homme nouveau mais d’où vient le moule qu’elle emploie pour (tenter de) nous rééduquer ?
©REUTERS/Hector Mata

De (trop) bonnes intentions

La surabondance de réformes sociétales menées en très peu de temps par le gouvernement laisse à penser que celui-ci, sous l'influence de sa base idéologique, cherche à reconfigurer le logiciel de pensée des hommes et des femmes d'aujourd'hui.

Atlantico : Suppression de la notion de situation de détresse pour le recours à l'IVG, réforme du congé parental, pénalisation de la prostitution... Le gouvernement s'attelle à de nombreuses réformes sociétales. Mais, derrière ces réformes, il semble y avoir une volonté plus philosophique. Quel est cet "homme nouveau" qu'entend créer le gouvernement et la gauche en général ?

Bertrand Vergely : L'Homme nouveau est un vieux projet de la Gauche. Il correspond au projet de fabriquer une humanité nouvelle fondée sur la religion de l'Homme, du progrès social, économique, politique, scientifique et culturel. Dans les années soixante "L'Homme nouveau" était le titre d'une revue communiste. Actuellement, l'Homme nouveau correspond non pas au travailleur communiste mais à l'individu émancipé dont a parlé Vincent Peillon. Il faut entendre par là l'individu libéré des stéréotypes en matière de relations entre hommes et femmes, de sexualité et de relation à l'homosexualité, au suicide etc.

Gil Mihaely : Je ne sais pas si on peut mettre toutes ces mesures dans le même sac mais en revanche il est clair qu’une certaine idéologie est plus que jamais proche d’une position hégémonique. Pour aller vite, il s’agit de prendre la théorie de genres, une grille de lecture qui a beaucoup contribué à faire avancer les sciences sociales et humaines, et d'en faire une politique visant à changer le monde, ou plus précisément les humains. Si la volonté de comprendre comment les différences entres masculinité et féminité s’expriment et se construisent dans notre culture est très positive (au-delà la biologie, il s’agit de constriction sociale, et donc des produits de nos histoires -  rien ne lie les ovaires au port des robes ou à la couleur rose), il est dangereux de passer à l’étape consistant à appliquer ce qu’on a appris pour changer la société. Cela aboutit à des absurdités, comme l’idée que chacun pourrait choisir librement son genre voire le changer à souhait  tout le long de sa vie, voire de considérer que ces choix sont un droit fondamentale que l’éducation nationale doit rendre possible. Plus généralement cela participe d'une vision selon laquelle l’homme peut se couper du passé, s’inventer sans cesse et construire sa filiation. La liberté et l'égalité sont poussées à l’absurdité : on est libre de tout : du passé, de la nature, de la biologie, rien ne nous détermine en dehors de notre volonté ou plutôt notre envie…

D'un point de vue intellectuel, quelle sont les principales caractéristiques de cet homme nouveau ? Quelle est sa place dans la société ? 

Bertrand Vergely : Le PS veut l'Homme Nouveau. Je ne sais pas si la société le veut. Je pense qu'il y a un décalage entre le PS et la société. La société veut certainement que la vie soit de plus en plus confortable. Elle n'est pas dans l'idéologie. ce qui n'est pas le cas du PS qui entend régler des comptes et prendre du pouvoir. On est dans le flou, personne n'étant clair sur les notions d'Homme et de nouveauté; Je pense que le PS entend récupérer ce qui se passe, faisant la synthèse de toutes sortes de nouveaux comportements. 

Gil Mihaely : Il s’agit de la transformation des théories, des courants de pensé, donc de grilles de lecture, en programmes politiques. A partir des années 1960 beaucoup de chercheurs en sciences humaines et sociales étaient  non seulement des intellectuels et des universitaires, mais aussi voire surtout des militants.  Des féministes femmes ont développé les "women studies", non seulement pour comprendre le passé mais pour changer l’avenir. Les "gay studies" comme les études consacrées aux noirs et aux autres groupes minoritaires aux Etats-Unis et en Europe  les ont suivies. En quelques décennies ces idées ont été diffusées tout d’abord par les universités et en suite par les médias (les journalistes et les profs de journalisme sont passé à la fac avant de faire carrière), le cinéma, l’enseignement. C’est donc une cascade ou un écosystème qui se développe jusqu’à devenir un projet politique, une loi, un manuel scolaire, un budget ou un observatoire…   

De qui cet "homme nouveau" est-il le fantasme ? Quels sont les groupes, les mouvances et les mouvements d'influence  qui peuvent être à l'origine de cette évolution du gouvernement sur ces questions ? 

Gil Mihaely : De manière générale - voire un peu caricatural - la gauche est historiquement cette famille idéologique qui cherche à changer l’homme, à refaçonner radicalement le réel bref, à faire le nécessaire pour qu’une société parfaite se réalise ici et maintenait.  Si on ajoute une préférence dans ce camp pour l’égalité au détriment de la liberté, on peut comprendre que les idées issues des différents "studies" - qui, je le répète, sont tout à fait légitimes et fécondes intellectuellement - sont plus facilement prises à gauche. Si on prend l’exemple d’Osez le féminisme  on peut trouver parmi les "ancêtres" de cette association fondée il y a cinq ans, le planning familial, et à travers lui aller jusqu’à Évelyne Sullerot, cette femme remarquable qui a mené à la fois une carrière universitaire (sociologue, et pionnière des "women studies" en France, elle enseigne à Nanterre dans les années 1960).
Caroline de Haas, porte parole d’Osez le féminsme, a fait ses armes politiques au sein de l’UNEF avant d’intégrer d’abord l’équipe de campagne de Martine Aubry aux primaires de 2011. Ensuite elle travaille comme conseillère auprès de Najat Vallaud-Belkacem,ministre des Droits des Femmes, avant de créer une agence de conseil, formation et communication intervenant sur la thématique de l’égalité entre les femmes et les hommes. Sur le site de son agence on peut voir que les pouvoirs publics (régions, conseils généraux, villes) ont une place des choix parmi ses clients. Tout ceci est parfaitement légal et légitime, et le rôle de cet exemple un peu sommaire est de démontrer concrètement comment les idées se diffusent et deviennent des politiques budgétées et appliquées.
Bertrand Vergely : L'Homme Nouveau est le nom du Christ dans la tradition chrétienne. Par là il faut entendre l'Homme capable de tout vivre et de tout faire vivre de façon nouvelle, grâce à une profonde spiritualité. Le PS n'en est pas là. Son but étant de remplacer la religion et notamment le catholicisme, pas question pour lui de fonder l'Homme Nouveau sur le Christ. En revanche, une ardente volonté de reprendre la thématique chrétienne en la détournant de son sens originel par un sens purement terrestre. Je pense que le PS rêve comme certains milieux américains "new age" de supprimer la mort ou d'allonger durablement la vie humaine grâce à un certain nombre de procédés techniques. Je pense qu'il rêve d'un nouveau corps, toujours grâce aux nouvelles technologies. En fait, rien ne le distingue vraiment des projets qui se font outre Atlantique de bâtir un Nouvel Homme grâce à la science.
Parmi les projets en cours il y a celui de fabriquer une nouvelle humanité au-delà de la différence sexuée que nous connaissons grâce à des hommes pouvant enfanter ou bien encore grâce à des humains pouvant s'auto-féconder sans passer par l'autre. Le but profond du PS est la mort de Dieu ainsi que la destruction du christianisme. En ce sens, son but numéro un est de faire advenir un athéisme tel qu'on n'en a jamais vu dans l'histoire de l'humanité. Un tel projet passe par un changement de corps, de vie, de sexe. Hitler rêvait de créer une nouvelle race à travers une race d'hommes supérieurs. Le projet qui est en train de se fabriquer au nom de la démocratie est beaucoup plus ambitieux, celui-ci étant de fabriquer une humanité immortelle et toute puissante, une humanité divine, une divine-humanité sans Dieu et sans Christ. Un penseur, Vladimir Soloviev, prédisait la vue de temps anté-christiques. Nietzsche appelait de ses vœux la venue de l'Antéchrist. Nous y sommes. Nous rentrons dans le temps de l'Antéchrist.

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