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François Hollande : y a plus qu'à !
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Et maintenant ?

Dans la troisième grande conférence de presse de son mandat, François Hollande a voulu convaincre qu'il avait un plan pour la France. Un plan qui s'avère surtout sémantique et habile dans la forme, notamment sur le soutien aux entrepreneurs.

Sophie de Menthon

Sophie de Menthon

Sophie de Menthon est présidente du Mouvement ETHIC (Entreprises de taille Humaine Indépendantes et de Croissance) et chef d’entreprise (SDME).

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Le ton est donné : habile et pas mécontent de lui.

Les patrons ne croient plus aux mots et pourtant chaque entrepreneur a guetté le moindre indice qui pourrait lui redonner espoir dans la conférence de presse du président de la République. Les entrepreneurs ne sont pas obnubilés par la baisse des charges qui n'est qu'un placebo face au mal français, beaucoup plus profond, qui étrangle et étouffe les entreprises. Le  "donnant-donnant " a fait son temps, le gagnant-gagnant n'est pas encore compris. Face à cela, il ne faut pas que le patronat se laisse entraîner vers la dérive des promesses, nous ne sommes pas plus capables de jurer que nous créerons un million d'emplois que le président de la République n’apparaît rapidement capable d'en créer les conditions ; et sur ce plan la déception risque d'être encore au rendez-vous.

Si cette conférence de presse était tant attendue du patronat ce n'est pas pour un catalogue de mesures supplémentaires ou quelques aides de plus qualifiées de cadeaux, ni pour une pochette surprise fiscale… C'est le souffle que nous guettions ! Le souffle d'un homme libéré (économiquement), le souffle d'un homme qui sacrifierait sa popularité pour le bien de la Nation, le souffle d'un homme qui a pris conscience qu'il fallait faire confiance aux entreprises et aux entrepreneurs car c’était la seule façon de s’en sortir. Au lieu de cela, une introduction sous forme d’auto-congratulation, mesurée certes, sur l’action de son gouvernement. Le « pacte de responsabilité » est avancé comme la solution miracle avec 4 chantiers. La vraie nouvelle c’est de décharger les entreprises des cotisations familiales, « non pas pour leur faireplaisir », comment imaginer  ne chose pareille ! Stabilité  promise (comme d’hab !). Les 2 exigences du président sont abstraites et n’ont pas vraiment de sens : investissement et emploi : évidemment.

Guillaume Poitrinal choisi (fort bien) par François Hollande sera notre Robin des bois, superman… Il a « seulement » la mission de simplifier… Un seul homme peut réussir là où tous ont échoué ; nous serons tous derrière lui en tous les cas. La méthode pour la réduction des dépenses de l’État sera un conseil stratégique de la dépense de l’État ; on soupire.

Tout y passe, les soldats, Airbus, les jeunes, les emplois aidés, un couple franco-allemand pour la Défense et la paix et la sécurité dans le monde : rien que ça ; on va se coordonner avec tout le monde sur tous les plans ; au lieu de rassurer, ces ambitions inquiètent : qui peut le plus, peut- il le moins ? Qui trop embrasse mal étreint ! 

Quant au grand rêve libéral consistant à redéfinir les missions régaliennes de l’État : on voudrait savoir QUI  s’en chargera ? Et COMMENT ? Mais c’est une immense avancée qu’il ait été évoqué.

Le président nous liste tout ce qu’il ne laissera pas faire, mais que laissera-t-il faire  en fin de compte ?

Le sondage qui donne 87 % des Français ne croyant plus aux politiques ne pourrait être démenti que par le seul talent et la vocation inspirée d'un chef d'état. C’est quasi un appel du 18 juin économique que la France attendait. Un "je vous ai compris" qui marquerait l'arrêt du soupçon envers des entrepreneurs "profiteurs", un élan vers tout ceux qui gagnent leur vie tous les jours sans employeur, de leur propre fait. C'est un retournement qu'il fallait annoncer ; un retournement dans les mentalités. Marquer un changement d'état d'esprit : donner un signal  sur le mode de contrôle des administrations qui se croient investies d'une mission punitive en leur disant de concentrer leur énergie sur ceux qui contournent la loi sciemment sans conscience et non pour harceler l'entrepreneur du coin, parce que son vestiaire n'est pas aux normes....

Nous attendions que le président de la République demande au pays de porter ses entrepreneurs, de les soutenir, de les admirer.  Au lieu de ça nous avons eu un catalogue de bonnes intentions qui vont inquiéter la gauche de la gauche et qui ne donnent qu'une piètre lueur d'espoir aux socio-libéraux. La méthode de concertation est privilégiée à toute autre, elle permet au président de ne pas décider, donc de ne pas aller vite : commissions, documents, conférence sociale à l’automne, contre-parties, engagement et approbation du gouvernement à l’Assemblée nationale, vote à l’automne… Désespérant pour un pays et des entrepreneurs ravagés d’impatience !

On nous décrit un long « parcours » réformateur, technique avec de nouveaux mots, de nouvelles appellations de commissions ; qu’en termes prudents ces choses-là sont dites… sur la pointe des pieds. A chaque avancée, on pondère, pour ne frustrer personne et donner des gages. Finalement, on ne retient rien, on décroche au moment des « décrochages scolaires » et de « l’ampleur inédite » de ce qui sera mis en œuvre ? Un balancement permanent d’un pied sur l’autre : concernant le racisme par exemple, il sera sévèrement puni, MAIS sans entamer la liberté d’expression. Pour les élections européennes « Vais-je m’engager ? Non ce n’est pas mon rôle, mais j’ai commencé ». Tout cela « sans polémiques, sans divisions ». On sent cette crainte sous-jacente permanente, cette peur de cliver et cette certitude qu’on ne sort de l’ambiguïté qu’à son détriment.

Certes, la médiatique question de la vie privée fut évacuée avec le côté penaud de tout homme qui se fait piquer. C'eut été beaucoup plus judicieux et digne de faire un communiqué la veille pour dire qu'aucune question sur ce sujet ne serait autorisée à la conférence, car l'enjeu était autre. Ô combien ! Tout cela n'empêchera pas la suite de la  saga des "feux de l'amour » qui va continuer à agiter les médias, à faire rire sous cape… Mais on peut espérer que l'indécision sentimentale du président de la République n'a rien à voir avec son indécision économique, c’est ce qu’il a tenté de faire passer. Il reconnaît quand même, être un social-libéral mais surtout pas « gagné par le libéralisme ». OUF !

Après tout ce n'était qu'une conférence de presse, un exercice à la française, difficile dans une période cauchemardesque. Toutes les étapes à franchir vont jalonner les semaines et les mois à venir, retardant d'autant une action franche, nette et irrévocable pour réformer. On attend donc des assises hypothétiques, le management de l’État est abordé en pointillé (clientélisme de la fonction publique). Il fallait préserver des parlementaires de la majorité proche de l'hystérie, amadouer des centristes qui n'arrivent pas à s'imposer, ne pas s'occuper d'une droite dans la nostalgie et le rejet, et surtout ne pas avoir l'air de flirter avec le libéralisme, ne pas renier une idéologie dépassée sur laquelle le PS est fondé, etc. La France dans 10 ans, le président rêve tout haut… Nous aimerions partager son rêve mais certainement pas celui de créer encore des structures : un nouveau conseil stratégique et  un « observatoire des contreparties »  (digne de Courteline !) si c’est ça la confiance témoignée aux chefs d’entreprises !

Qui peut susciter l’adhésion au-delà de ces clivages et de ces contradictions ? Seul un homme d’État, qui gouvernerait par ordonnance et qui sacrifierait sa réélection pour le bien de la France, qui s'élèverait au dessus des partis quels qu'ils soient, mais ce n'est pas celui là ce que nous avons entendu, même si nous allons clairement dans la bonne direction.

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