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2013, l'année où l'euro a joué les passagers clandestins des politiques monétaires américaine et japonaise
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Bilan 2013

Pendant tout l'année 2013 la zone euro s'est frayé un chemin dans le sillage des Etats-Unis et du Japon, qui ont pratiqué un rachat massif d'actions pour soutenir leur économie. Cependant ce statut de "clandestin" ne peut pas durer éternellement, et la BCE devra prendre les mesures qui s'imposent.

Mathieu  Mucherie

Mathieu Mucherie

Mathieu Mucherie est économiste de marché à Paris, et s'exprime ici à titre personnel.

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L'événement le plus important dans le monde en matière économique est quelque chose qui ne s'est pas déroulé. Il y a un an, on pensait que cela se passerait très mal s'il n'y avait pas une détente monétaire en zone euro. On annonçait une situation cataclysmique : tout semblait être en place pour que cela arrive. Un an plus tard, il n'y a pas eu de détente mais la catastrophe annoncée n'a pas eu lieu.

C'est une situation surprenante car il y a un ordre déflationniste et récessioniste mis en place. A plusieurs moments de l'année, on a cru que le système allait sauter, comme en mars à l'occasion des élections en Italie, ou en mai lorsque la réserve fédérale américaine a annoncé une réduction de son programme d’assouplissement quantitatif, le "QE3". En mai, la Fed a annoncé qu'elle achèterait probablement moins d'actifs. Jusqu'en septembre, les marchés financiers se sont ainsi fait ballotter, jusqu'à ce que la réserve fédérale revienne sur ce qu'elle avait déclaré au printemps du fait d'un crash dans les pays émergents. Et finalement, fin septembre, les Américains ont décidé de revenir à la situation initiale et de bien réduire leurs achats d'actifs à partir de janvier. Ce fut la saga du "tapering" qui a perturbé durant des mois les marchés financiers.

Cette saga illustre le fait que l'année 2013 a été dominée par les annonces des banques centrales. Globalement, on a eu une mauvaise année dans la zone euro, avec une BCE très peu active et malgré tout le système a tenu. On a néanmoins eu du mieux, notamment sur le marché des actions. Tous les marchés ont bénéficié de cet état. Le CAC 40 a par exemple augmenté de 12 %. Mais ça reste très en-dessous de l'Amérique où, par exemple, le Nasdaq a grimpé de 35 %, et très en-dessous des Japonais, mais l'Europe en a un petit peu profité.

Cette année, tout s'est passé comme si cette "câlinothérapie" de la Fed avait aidé l'Amérique et par ricochet la zone euro. La question est de savoir comment la zone euro se portera lorsqu'elle n'aura plus la possibilité de jouer au passager clandestin.Nous n'avons pas vécu de cataclysme cette année grâce aux États-Unis et au Japon qui ont fait ce que nous, Européens, refusons de faire : l'achat massif d'actions.  Maintenant que les autres vont faire moins, qu'est-ce qu'on fait pour se bouger, notamment d'un point de vue monétaire, par exemple pour avoir un euro moins cher ?

Résultat, cette année, le podium de l'économie mondiale est quelque peu bouleversé puisque ces dernières années, les pays émergents jouissaient d'une plus forte croissance que les autres. En 2013, on trouve en première place les États-Unis, le Royaume-Uni et le Japon. Sur la deuxième marche siège la zone euro. Le podium est complété par les pays émergents, des pays où les investisseurs ne sont pas tous domestiques et sont donc fortement dépendants des investisseurs étrangers. Ces marchés performent les autres depuis 2 ans et demi environ, notamment quand les marchés de matières premières ont commencé à ne plus monter. L'annonce de la Fed a été un élément déclencheur du ralentissement des pays émergents : les investisseurs qui étaient encore présents ont commencé à partir.

La question qui se pose pour 2014 concernant la zone euro est de savoir si la situation de 2013 est réversible. Si on regarde depuis 4 ou 5 ans, les marchés européens ont perdu plus de 40 points de différence de performance depuis le début de de la crise grecque par rapport au marché américain S&P 500. Les optimistes considèrent que l'on va pouvoir rattraper progressivement cet écart. Les pessimistes estiment que ces points n'ont pas été perdus par hasard mais parce qu'il y a en zone euros des politiques déflationnistes et récessionistes.

D'autant que l'Europe vit avec l'épée de Damoclès de Karlsruhe, du nom de la ville où siège la Cour constitutionnelle d'Allemagne. La situation des Allemands est particulière : ils sont encore dans une forme de souverainisme car ils gardent un peu la main sur la politique monétaire grâce au pouvoir de veto dont bénéficie la cour constitutionnelle allemande sur le sujet. Outre-Rhin, on a un triangle d'impossibilités avec 3 institutions qui ont un droit de veto sur les Eurobonds, la mutualisation de la dette, etc. : la Bundesbank à Francfort, le parlement et le gouvernement à Berlin et la cour constitutionnelle à Karlsruhe. Le fait que l'on ait désormais en Allemagne un gouvernement de coalition n'arrange rien. Quelle couleuvre pourra-t-on encore faire avaler aux Allemands en cas de nouvelle crise de la zone euro ?

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