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Le mouvement des bonnets rouges passera-t-il les fêtes de fin d'année sans éclater ?
©Reuters

Ça sent le sapin

Alors que Christian Troadec a appelé à la mobilisation générale contre l'aéroport de Notre-Dame-des-Landes, les bonnets rouge ont pris leurs distances avec leur leader. Porté par l'émotion, ce type de mouvement est généralement très hétérogène et peine à se structurer au-delà de la colère ponctuelle.

Hubert Landier

Hubert Landier

Hubert Landier est expert indépendant, vice-président de l’Institut international de l’audit social et professeur émérite à l’Académie du travail et de relations sociales (Moscou).

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Atlantico : Le mouvement des bonnets rouges tend à s'essouffler. Doit-on y lire le signe d'une trêve temporaire en cette période de fêtes ou d'un déclin définitif de la fronde bretonne ? S'il revenait après Noël, le mouvement pourrait-il retrouver la même force ?

Hubert Landier : Le problème de ce genre de mouvement, c’est qu’il se mobilise très vite, par le bouche à oreille, les réseaux sociaux et l’effet d’entrainement, mais qu’il tend à s’essouffler par la suite, faute de structures et d’un programme cohérent. Son moteur, c’est l’émotion : émotion face à un cas d’injustice flagrante ou à une décision maladroite des pouvoirs publics. Mais l’émotion ne fait pas un programme au-delà de la suspension immédiate de la décision qui a mis le feu aux poudres.

C’est bien le problème des bonnets rouges ; ils sont représentatifs de l’état d’exaspération des Bretons face au gouvernement de Paris mais il s’agit en même temps d’un mouvement extrêmement hétérogène, où l’on trouve aussi bien les agriculteurs, que les transporteurs, les salariés de la filière agro-alimentaire menacés de licenciement ou les artisans épuisés par les exigences nouvelles qui s’imposent à eux. Or, il n’est pas sûr que leurs exigences, au-delà de la colère qui les unit, soient bien cohérentes entre elles.

Ce mouvement des bonnets rouges est-il comparable à d'autres mouvements sociaux ? Lesquels ? Est-ce courant de voir ces derniers s'affaiblir à l'approche de Noël ?

Les fêtes de fin d’année sont traditionnellement une pause dans les mouvements sociaux. Le printemps, parce qu’il est porteur d’optimisme, est bien plus favorable à la poursuite de ce genre de mouvement. Le gouvernement a joué l’apaisement, quitte à renoncer au moins provisoirement aux mesures les plus emblématiques, ce qui ne signifie pas qu’il n’y reviendra pas plus tard et sous un packaging différent. Une relance du mouvement en janvier supposerait, soit une structuration autour d’une organisation et d’un programme, soit qu’il prenne place dans un mouvement plus large au niveau national, soit le maintien en l’état du motif de sa constitution, comme ceci a été le cas de l’opposition à la construction de l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes, qui a réussi à se maintenir, au moins jusqu’à présent. 

Le divorce entre les bonnets rouges et Christian Troadec, maire de Carhaix, est-il inévitable ? Quelles peuvent en être les conséquences pour les Bretons en colère ? Et pour l'élu ?

Ce genre de mouvement est une occasion de s’affirmer pour des personnalités jusqu’alors peu connues. Pour elles, il s’agit d’un tremplin. Mais elles n’ont pas intérêt par la suite à lier leur dessein à un mouvement qui s’essouffle. Christian Troadec fera peut-être de nouveau parler de lui, mais ce sera alors en prenant la tête d’un mouvement plus structuré. Regardez par exemple José Bové : il aura su s’affirmer en donnant une dimension politique à un mouvement qui, au départ, se limitait à une simple jacquerie.

Si le mouvement perdurait, quelle forme différente pourrait-il prendre ?

Même si le mécontentement a cessé de se manifester ouvertement, il est toujours présent et si une crise sociale plus grave survenait au niveau national, il y trouverait sa place. Seconde possibilité : les bonnets rouges disparaissent, quittes à s’engager dans d’autres mouvements, politiques ou syndicaux, déjà existants et plus structurés. Troisième possibilité : il se structure lui-même de façon à compter parmi les acteurs régionaux capables de peser sur les décisions publiques. C’est peut-être l’option de Christian Troadec. Mais il est évident qu’une évolution en ce sens ne peut que susciter des débats à l’intérieur du mouvement et le départ de certains de ceux qui y militaient, et notamment des plus radicaux d’entre eux.

Propos recueillis par Marianne Murat

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