Les oncles et tantes sans enfants prêts à pourrir leurs neveux et nièces, dernière cible en date des marketeurs<!-- --> | Atlantico.fr
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Les oncles et tantes sans enfant reportent leur affection sur leurs neveux et nièces.
Les oncles et tantes sans enfant reportent leur affection sur leurs neveux et nièces.
©Reuters

Tatie gâteau

Le phénomène des PANKS (Professionnal Aunts, No Kids), ces tantes sans enfants prêtes à tout pour gâter leurs neveux et nièces, s'étend largement aux États-Unis. Si le terme n'a toujours pas trouvé son pendant en France, le phénomène existe bel et bien. Une aubaine pour les entreprises.

Gérard  Neyrand

Gérard Neyrand

Gérard Neyrand est sociologue, est professeur à l’université de Toulouse), directeur du Centre interdisciplinaire méditerranéen d’études et recherches en sciences sociales (CIMERSS, laboratoire associatif) à Bouc-Bel-Air. 

Il a publié de nombreux ouvrages dont Corps sexué de l’enfant et normes sociales. La normativité corporelle en société néolibérale  (avec  Sahra Mekboul, érès, 2014) et, Père, mère, des fonctions incertaines. Les parents changent, les normes restent ?  (avec Michel Tort et Marie-Dominique Wilpert, érès, 2013).
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Atlantico : Qui sont les PANKS (Professional Aunts, No Kids), ces tantes sans enfants prêtes à tout pour gâter leurs neveux et nièces ? Comment se comportent-elles ? Agissent-elles avec eux comme s'ils étaient  leurs propres enfants ? De quelles catégories proviennent-elles ?

Gérard Neyrand : Le terme PANKS est une classification anglo-américaine qui ne trouve pas son pendant en France. Cela ne veut bien sûr pas dire que les tantes françaises n'ayant pas d'enfants ne gâtent pas leurs neveux et nièces mais la classification PANKS n'est pas utilisée en France. Pour analyser comment se comportent ces tantes, il faut faire une comparaison entre la France et les États-Unis car les deux pays ne fonctionnent pas de la même façon en termes de liens et de fonctionnements familiaux  même si, avec la mondialisation et la masse-médiatisation des discours, il y a beaucoup de ponts entre ces logiques. Aux États-Unis, la religion est plus présente qu'en France avec une grande proportion des familles qui sont attachées à des pratiques et à des croyances religieuses alors qu'en France, les pratiques religieuses ont manifestement baissé. La religion ayant une incidence sur le fonctionnement familial, il est difficile de comparer ces deux logiques. Ce qui est sûr, c'est que ces tantes n'agissent pas avec leurs nièces et neveux comme s'il  s'agissait de leurs propres enfants. Leur rôle est plus dans la proximité avec les enfants, sans avoir à exercer une autorité qui reste d'abord la fonction des parents. En d'autres termes, les tantes vont avoir tendance à partager les moments de loisir, de détente et de convivialité tout en essayant de se dégager au maximum de la dimension d'autorité et de contrôle éducatif. On peut émettre l'hypothèse que cette position de tante qui gâte renvoie plus à une position psychique favorisée par l'évolution sociale qui traverse l'ensemble des couches sociales. Évidemment ceux qui ont le plus d'argent vont davantage avoir la possibilité de gâter les enfants, peut-être avec des objets plus onéreux, mais on peut retrouver cette tendance à tous les niveaux de la société car elle est représentative d'une évolution sociale qui est celle, d'une part, de la société de consommation et, d'autre part, de la valorisation d'une dimension affective et relationnelle à l'égard des enfants.

Comment tendrait à se développer le phénomène des PANKS en France ? En quoi les entreprises se saisissent-elles de ce mouvement ?

Cette tendance semble devoir s'affirmer puisque notre société met en avant la valeur de l'individu et la réalisation personnelle à travers le rapport aux objets et à la relation affective privilégiée avec l'entourage. Aujourd'hui, toutes les personnes, notamment au sein des familles élargies, peuvent avoir à l'égard des enfants un statut affectif privilégié et peuvent être amenées à exprimer à travers les cadeaux cette tendance. Cela correspond à l'évolution sociale vers un individualisme croissant et une valorisation croissante du rapport à l'enfant dans un contexte de valorisation des rapports affectifs avec ses proches. C'est à l'intersection de ces trois tendances que cette montée des cadeaux et de l'intention aux enfants peut être interprétée.

Quant aux entreprises, c'est la tendance du capitalisme que de pouvoir diversifier de plus en plus les cibles. On est dans la logique du néolibéralisme qui, en se développant, segmente de plus en plus le marché. La logique de la société marchande – le marketing – est à l'affut de toutes les nouvelles tendances socialespour, tout de suite, les investir comme cible potentielle de leur discours publicitaire. Ce n'est pas étonnant que ce phénomène soit porté par le système marchand.

Ces tantes sont-elles une cible solide ? Une entreprise peut-elle vraiment baser un pan de son marketing sur ce mouvement ?

Les tantes sont une cible solide car, depuis le début du XIXe siècle, les femmes ont cette position privilégiée d'être assignée aux soins et à l'éducation des enfants. La valorisation maternelle et, globalement, la valorisation des femmes à l'égard des enfants, a été importante mais ce n'est que la continuité de cette logique. Une entreprise peut parfaitement baser un pan de son marketing sur ce mouvement même si cette stipulation est plus évidente vis-à-vis des grands-parents que des oncles et tantes. L'une des cibles en complète expansion à l'heure actuelle est le troisième âge. Or qu'est-ce que le troisième âge ? D'une part, ce sont des loisirs pour les personnes qui arrivent à la retraite. D'autre part, le rapport à leur entourage et à leurs petits-enfants constitue une cible privilégiée. Les entreprises peuvent donc baser leur marketing sur ce mouvement puisque celui-ci est amené à se développer

Propos recueillis par Marianne Murat

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