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Amendes de stationnement : les maires seront-ils encore plus tentés que l'Etat de transformer leurs administrés en vaches à lait ?
©Reuters

La revanche des pervenches

Jeudi, l'Assemblée nationale a voté la dépénalisation des PV de stationnement, accordant ainsi aux maires le pouvoir de décider de leur montant dans leur ville. Les associations de défense des conducteurs craignent une dérive des prix.

Philippe Vénère

Philippe Vénère

Philippe Vénère a été policier pendant 40 ans. Ce grand spécialiste français du doit des automobilistes a été notamment commissaire divisionnaire et officier du ministère public du tribunal de police de Paris de 1992 à 1996. Il a également enseigné à Paris 8 où il a effectué plusieurs travaux de recherche sur la délinquance des mineurs.

Il a publié Manuel de résistance contre l'impôt policier (J'ai lu / mars 2011) et Les flics sont-ils devenus incompétents ? (Max Milo / septembre 2011)

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Atlantico : Avec cette mesure, les automobilistes doivent-ils craindre une hausse généralisée des montants des contraventions de stationnement ?

Philippe Vénère :  Cette mesure avait été annoncée par M. Ayrault, qui souhaitait ainsi faire contribuer les automobilistes à l’aménagement des transports en commun, et qui pour moi, crée un nouveau péage urbain, rien de plus, prenant en otage les automobilistes. Il est bien évident que les tarifs vont tous être orientés à la hausse par rapport au tarif national actuel. Quelle commune refuserait à si bon compte des recettes nouvelles ?

Cette réforme marque la fin du montant unique de 17 euros. Comment justifier que chaque ville applique son propre tarif ? Est-ce compréhensible pour les automobilistes ?

Il est bien évident que chaque ville trouvera toujours le justificatif adapté pour augmenter ses tarifs, alors que dans le même temps rien ne sera fait pour que les automobilistes habitant les banlieues n’aient une autre alternative. Cette mesure promue par les édiles parisiens à trouvé un écho largement favorable auprès de la majorité gouvernementale. Jamais les automobilistes n’ont été aussi  pressurés par un gouvernement, que le gouvernement Ayrault. C’est scandaleux, car il touchera beaucoup de foyers modestes.

Quelles seront les villes les plus chères et au contraire, où pourra-t-on se faire verbaliser pour une somme modérée ?

Les villes les plus chères seront Paris et la plupart des autres grandes villes françaises, car les électeurs citadins seront moins touchés en bénéficiant de transports en commun, alors que les banlieusards ne sont pas des électeurs potentiels et donc inintéressants pour les municipalités concernées. Là où le stationnement pourra être plus modéré et, par voie de conséquence, la verbalisation, ce sera dans les villes de petite et moyenne importance, parce que touchant des électeurs locaux qu’il ne faudra pas trop mécontenter. Il faut que les équipes municipales candidates aux futures élections donnent une réponse claire sur ce point dans leur programme électoral, car il va concerner la prochaine mandature. On doit donc aborder ce point comme un enjeu électoral.

Quand on voit la dérive des coûts de certaines collectivités territoriales, peut-on s’inquiéter de voir les contribuables devenir de véritables vaches à lait pour les municipalités ?

Effectivement, les dérives que l’on constate aujourd’hui avec la politique du chiffre, ne vont que s’épanouir encore plus car outre les agents municipaux, il y a fort à redouter que l’on fasse appel à des sociétés privées pour verbaliser, et dont le seul objectif sera une rentabilité maximale, sans aucun respect du droit des citoyens. On en a un fameux exemple avec le juteux contrat de l’écotaxe. Les automobilistes sont déjà des vaches à lait, mais on va vouloir les traire encore plus. A quand les nouveaux "bonnets" pour combattre ces atteintes au droit ? Il me semble que ce sera un nouveau combat qu’il ne faudra par perdre et mettre les élus au pied du mur.

Qu’est-ce qui justifie ce transfert de compétences ? A quoi servira cette nouvelle manne pour les villes ?

Rien ne justifie, légalement, ce transfert de compétences, sinon de rendre encore plus difficiles les contestations. Mais comme je le dis dans l’ouvrage que je viens de publier : Le Grand Racket des Automobilistes (aux éditions du Cherche-Midi), il faudra adopter une contestation en masse, en riposte à une verbalisation en masse. On doit s’opposer à ces diktats intolérables.

Les municipalités argueront de travaux d’intérêt général, sans que l’on puisse véritablement  bénéficier d'une transparence dans les comptes. L’opacité dans ce domaine est de rigueur, comme on peut le constater aujourd’hui. Il n’y a donc aucune raison pour que l’on modifie le système. Quel organisme indépendant aura un contrôle décisionnel sur ces comptes ? Les municipalités s’auto-contrôlent déjà et l’on voit combien les dérives actuelles conduisent des élus devant les juridictions pénales. Il y a tout à redouter, car les craintes sont plus que fondées.

Propos recueillis par Pierre Havez

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