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Nicolas Sarkozy, le retour en politique ? L'irréaliste stratégie de l'homme providentiel
©Reuters

Bonnes feuilles

Un an après la double défaite (à l'élection présidentielle et aux législatives) de la droite, Dominique Paillé procède à l'inventaire du mandat présidentiel de Nicolas Sarkozy et analyse ses chances d'un retour en politique réussi. Extrait de "Sarkozy - Retour perdant" (2/2).

Dominique Paillé

Dominique Paillé

Dominique Paillé est avocat au Barreau de Paris. Député Honoraire. 

 
 
Né le 28 mai 1956 à les Aubiers (79) France, il débute sa carrière professionnelle comme haut fonctionnaire hospitalier. Diplômé de sciences politiques (Paris) et titulaire d’un doctorat de l’université de Paris IX Dauphine, il devient directeur d’hôpital à sa sortie de l’Ecole Nationale de la Santé Publique (1981). Il occupe ces fonctions à Paris (hôpital Boucicaut puis Hôtel Dieu) de 1981 à 1988, tout en assurant en parallèle le Secrétariat Général de son syndicat professionnel (SNCH). 
 
En 1988, il entame une carrière politique d’abord au sein de l’UDF et du Parti Radical puis lors de la fusion avec le RPR à l’UMP. 
 
Cette carrière politique sera menée à la fois à travers des mandats électifs et des responsabilités partisanes :
 
-Maire de Nueil les Aubiers (1988-2002), il est élu député des Deux-Sèvres en 1933, et régulièrement réélu jusqu’en juin 2007.
 
-Secrétaire Général du Groupe union du Centre à l’Assemblée nationale (1889-1993),
Délégué général de l’UDF (1995-2002), Secrétaire Général Adjoint et porte-parole de l’UMP (2007-2010).
 
A cette même époque, il est conseiller politique du Président de la République, Nicolas Sarkozy pour s'occuper notamment des questions relatives aux français établis à l’étranger et à la coopération avec l’Afrique. 
 
Il abandonne en 2011 toute activité politique active pour se consacrer à la création et au développement de son Cabinet d’avocat au barreau de Paris. Il accepte néanmoins à cette époque, compte tenu de sa connaissance approfondie de l’Afrique et du Moyen-Orient la présidence de L’office Français d’Immigration et d’Intégration (OFII) pour un an (2012).
 
Il est également l’auteur de plusieurs ouvrages : Panique à l’Elysée (Grasset, 2012), Nicolas Sarkozy, retour perdant (Archipel, 2013), les Deux-Sèvres, l’autre pays du vin (Geste Editions, 2006), le service de santé des armées, la face cachées (l’harmattan).
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Le retour de l’ancien président, même en faisant fi de la parole donnée, pourrait se concevoir s’il était sollicité comme l’homme providentiel susceptible de sauver le pays du chaos. C’est semble-t-il ce qu’imagine Nicolas Sarkozy, ou du moins certains de ses proches.

La théorie du recours, aussi séduisante soi-telle, est difficile à mettre en œuvre car elle dépend surtout de circonstances non maîtrisables et de paramètres exogènes. La conjoncture doit être favorable : une situation de crise. Rien ne dit que tel sera le cas en 2016-2017. Les difficultés économiques actuelles sont graves, le chômage culmine ; mais, en quatre ans, la donne peut changer. Le frémissement de l’activité que certains décèlent déjà, la croissance américaine qui se confirme, trimestre après trimestre, rendent improbable un marasme qui s’inscrirait dans la durée. Quand bien même, par malheur pour notre pays, la crise perdurerait, Nicolas Sarkozy se verrait rappeler par ses adversaires les résultats de sa présidence en matière de croissance, de comptes publics et d’emploi. Ces résultats, sans doute meilleurs que ceux qu’obtient aujourd’hui le gouvernement Hollande, sont – ayons l’humilité de le reconnaître – loin d’être exemplaires.

En choisissant de se retirer sur l’Aventin pour saisir, tel un fauve guettant sa proie, le moment opportun pour revenir directement au sommet de l’État en qualité de « sauveur », Nicolas Sarkozy se place dans la situation d’un joueur qui n’aurait qu’une carte à abattre, quitte à ne pouvoir en faire usage si les circonstances lui deviennent défavorables.

Valéry Giscard d’Estaing avait suivi une autre voie. Elle passait par l’onction du suffrage universel, qu’il avait d’abord obtenu pour un mandat local avant de revenir à l’Assemblée nationale. Ce choix, éminemment démocratique, ne lui a certes pas suffi pour se retrouver à nouveau en position de candidat à la présidentielle, mais il lui a permis de poursuivre une carrière politique plus qu’honorable.

En prenant ce chemin, Nicolas Sarkozy aurait fait preuve d’humilité. Il aurait regagné l’estime de l’électorat. Il aurait mis l’accent sur ses qualités, que personne ne peut lui dénier : une volonté extraordinaire et une force de caractère hors du commun. Il a choisi l’inverse : revenir au sommet, se rasseoir sur le siège que la volonté populaire l’a contraint de céder. Ce choix traduit, à n’en pas douter, un esprit de revanche aux antipodes de l’esprit de rassemblement censé animer la campagne de tout candidat à la présidence de la République. Il n’est pas certain qu’il soit du goût des Français.

À défaut d’être en mesure de « sauver le pays de la ruine », il semblerait que l’ancien chef de l’État se soit ménagé une position de repli : incarner l’ultime rempart de la France face aux griffes du Front national. Selon quelques journaux, il s’imaginerait être le seul barrage à même d’endiguer la poussée de l’extrême droite et de l’empêcher d’accéder au pouvoir.

Cet optimisme résiste mal à l’analyse. Il renvoie à la stratégie perdante de l’élection de 2012, que Nicolas Sarkozy n’a pas remise en cause. Pour enrayer la progression du Front national, il était parti braconner sur ses terres, avec les mêmes armes ou presque. Cette droitisation l’a coupé d’un électorat centriste et de droite républicaine qui a toujours été hostile à cette dérive. Les mêmes causes produiront les mêmes effets. Son retour dans le combat présidentiel avec un discours et des propositions très à droite ne ferait que légitimer un peu plus Marine Le Pen ; l’électorat modéré, dans un réfl exe républicain, n’aurait d’autre choix que de soutenir la gauche, dont les valeurs sont plus proches des siennes que celles de l’extrême droite.

Par ailleurs, les Français ont de la mémoire. Si, a contrario, Nicolas Sarkozy renonçait à sa stratégie droitière de 2012, il lui faudrait expliquer paille en quoi c’était une erreur pour espérer être crédible aux yeux de ceux qui l’ont rejeté. Cet exercice de repentance exigerait qu’il se surpasse, pour un résultat aléatoire. L’électorat de droite en serait dérouté et celui du centre, à mon humble avis, aurait du mal à se laisser convaincre de la sincérité d’une pareille volte-face.

Il reste à Nicolas Sarkozy, pour mettre en oeuvre cette stratégie de l’homme providentiel, une troisième possibilité, plus réductrice, donc moins valorisante : apparaître comme le seul à pouvoir garantir l’unité de l’UMP, sa famille politique. Aux yeux des militants, après avoir bénéfi cié d’un non-lieu dans le cadre de l’affaire Bettencourt, il est aujourd’hui le meilleur en ce domaine. Mais les ténors du parti, de toute évidence, ne partagent pas cette opinion.

Extrait de "Sarkozy - Retour perdant", Dominique Paillé, (Editions de l'Archipel), 2013. Pour acheter ce livre, cliquez ici

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