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Philippe Varin, dernier exemple en date des procès à côté de la plaque faits aux grands patrons
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L'Édito de Jean-Marc Sylvestre

Le PDG de PSA Peugeot-Citroën n’a pas tenu deux jours face à la pression d’un procès d’une violence inouïe. Il abandonnera donc la retraite qu'il avait négociée en arrivant dans l’entreprise. Pour beaucoup, cette retraite était indécente dans la situation actuelle.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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Tout le monde s’y est mis, les syndicalistes et particulièrement ceux de la CGT, le Medef, la CGPME,  des hommes politiques et même des ministres, sans parler des médias qui, croyant avoir trouvé un bon cheval d’audience, l’ont enfourché avec délectation. Sans même vérifier les chiffres et les faits. Le mal était fait. L’éducation protestante de Philippe Varin ne pouvait pas accepter d’être traité comme un voleur de grand chemin. 

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Comme Daniel Bernard, l’ancien PDG de Carrefour qui fut trainé dans la boue d’un conseil d’administration il y a 13 ans et qui travaille aujourd’hui à Londres. Comme Pierre Bilger l’ex-patron d’Alstom, aujourd’hui disparu dans l’indifférence générale mais qui fut attaqué  en 2002 pour avoir perçu une indemnité jugée trop lourde et fut contraint de l’abandonner. Il n’y a qu’Antoine Zacharias, l’homme qui avait fait la fortune de Vinci avait résisté aux assauts des ligues porteuses de la norme morale. Il s’est réfugié en Suisse pour protéger son magot. 

La France est ainsi faite qu'elle préfère l’héritier qui n’a jamais rien fait d’autre que de naitre dans une famille riche au manager qui s’est fabriqué tout seul ou presque. L’ordre moral nourri, à base de démagogie et de populisme, contamine toutes les couches de la société française.

Ce procès fait à Philippe Varin était odieux parce qu’il est injuste. Il est dangereux parce qu'il entretient un climat de haine et de hargne à l’encontre de ceux qui gagnent plus que d’autre. Il sème la suspicion systématique dans les relations d’argent et accuse les chefs des grandes entreprises de toutes les turpitudes. Il est scandaleux parce qu'il permet à n’importe qui de s’ériger en juge, sans connaitre la situation et la vérité des faits et des chiffres. L’ordre moral et populaire fait le lit des procès arbitraires. Aujourd’hui, ce sont les chefs d’entreprise qui en sont l’objet. Le plus terrible dans ce genre de procès, c’est que les informations sont fausses mais le courant est tel que l’accusé peut toujours ramer, il ne s’en sort pas. 

Philippe Varin n’allait pas  partir en retraite avec un chèque de 21 millions d’euros. L’allégation qui a tourné en boucle est fausse. Cette somme d’argent est le montant qui avait été provisionnée dans les comptes de PSA pour payer une retraite de 300.000 euros par an à M. Philippe Varin soit 25.000 euros par mois. Au jour de sa mort, le contrat aurait été éteint et s’il était resté de l’argent dans la provision, cet argent restait à PSA. 

25.000 euros par mois c’est important, c’est vrai. C’est même considérable et l’on comprend l’émotion de ceux qui n’ont rien pour vivre. Cette émotion vaut que l'on explique le fonctionnement du système. La somme est importante oui. Mais ce n’est pas plus important que la retraite d’un haut fonctionnaire ou d’un ancien Premier ministre qui aurait fait une carrière complète dans la politique, puis dans les affaires. Le budget de l’État provisionne des sommes aussi importantes, parfois plus, pour payer pendant 20 ou 30 ans la retraites de ses cadres supérieurs. C’est d’ailleurs pourquoi les régimes de retraites de la fonction publique sont aussi déficitaires.

La question de savoir si Philippe Varin méritait une telle retraite est une vraie question. Mais ça n’est certainement pas à des ministres, des parlementaires ou des médias de la poser et d’y répondre aussi vite. PSA est une entreprise privée qui a des difficultés. PSA a besoin des aides de l’État et l’État est évidemment en droit de poser des conditions à l’octroi de ces aides. Est-ce que l’État a conditionné ces aides à la suppression des retraites aux grands cadres ? La réponse est non. L’État a posé d’autres conditions qui sont légitimes. 

Si on avait pris soin de regarder ce dossier de plus près, on saurait que cette retraite était dans les comptes de la société depuis longtemps, que ces comptes ont été examinés et acceptés par le conseil de surveillance et par les représentants de l’État qui siègent à ce conseil. On saurait aussi que ces dispositions de retraite ont été votées en Assemblée Générale des Actionnaires. Les administrateurs, les actionnaires, les membres représentants le personnel au CA pouvaient intervenir. Le droit a été respecté. Ces chiffres étaient quasiment publics. D’ailleurs, s’il y a une entreprise dont les pratiques sont ultra surveillées par l’État c’est bien PSA.

Ce que l'on ne sait pas, c’est pourquoi la CGT a décidé d’en faire un scandale aujourd’hui alors que le syndicat avait accepté cette disposition. Pour exister ? Pour que le successeur de Philippe Varin sache où il met les pieds ? D’ailleurs, les mettra-il s’il lui faut l’imprimatur de la CGT. C’est à voir !  Il y a bien longtemps que l’on sait que l’entreprise n’est pas le royaume des bisounours.  

Compte tenu de la situation, Philippe Varin devait-il refuser cette retraite. Rien ne l’obligeait sauf le verdict de la rue. A L’époque où le contrat a été signé, personne ne trouvait cela scandaleux. Il pouvait aussi refuser de rentrer  chez PSA. Après tout, il n’était pas candidat. On est venu le chercher à Londres où il gagnait plus d’argent qu’aujourd’hui. Compte tenu de la situation financière de PSA, Philippe Varin a renoncé sans aucune publicité à la part variable de son salaire, aux stocks options et aux actions gratuites. Là, il a eu raison de le faire et l’État le lui aurait demandé.

Et maintenant, à qui profite ce procès en sorcellerie ? A quelques intégristes de gauche pas mécontent de resserrer leurs troupes autour d’un propos aussi radical que démagogique. S’attaquer à l’argent des entreprises, des patrons ou des 200 familles les plus riches a, de tout temps, été un sport à la mode dans une classe politique qui n’a plus d’idée, ni de courage.

Ces arguments, ces faits et ces chiffres n’auront aucun effet. Le mal est passé au journal de 20 Heures. Il s’agissait de faire fuiter une information pour introduire le doute. Les gardiens de la morale sont à la manœuvre. Il est probable qu'il demande maintenant une loi interdisant les grosses rémunérations, les retraites chapeau etc.

Ces boucs émissaires  arrangent tout le monde. Ce n’est pas la première fois que l’on dresse la guillotine pour les plus riches. Une fois de plus, le seul effet immédiat de toutes ces affaires va être  de décourager les cadres de venir travailler à Paris. Londres va encore dérouler le tapis rouge, Genève, Montréal, New-York, Shanghai, Singapour, aussi.

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