Denis Payre, l'entrepreneur qui lançait un parti de la société civile pour réinjecter du bon sens dans le débat politique<!-- --> | Atlantico.fr
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"Le modèle de l’Etat français est celui d’un Etat omniprésent qui fait pas confiance à la société civile."
"Le modèle de l’Etat français est celui d’un Etat omniprésent qui fait pas confiance à la société civile."
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Tout simplement

Le cofondateur de Business Objects et fondateur de Kiala présente ce jeudi le mouvement politique "Nous, citoyens".

Denis Payre

Denis Payre

Denis Payre est un entrepreneur français, défenseur du progrès social et environnemental, et un organisateur politique. Présent à la fois à Paris et à Boston, il travaille au-delà des frontières nationales depuis plus de trente ans, en tant que salarié de multinationales, fondateur de plusieurs sociétés ayant connu des succès internationaux, membre d’organismes gouvernementaux, dirigeant d’un groupe d’action politique ainsi qu’en tant que business angel et  membre de conseils d’administration et citoyens. Il a publié "Le contrat mondial : Pour que l'humain et la nature soient enfin au cœur de la mondialisation" chez First Editions.  

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Atlantico.fr : Vous lancez ce jeudi votre micro-parti "Nous Citoyens". Quel objectif poursuivez-vous à travers la création de ce nouveau mouvement ?

Denis Payre : Face à un pays bloqué, Nous Citoyens souhaitons mobiliser le plus grand nombre de citoyens pour mener rapidement les nombreuses réformes structurelles dont le pays a besoin et construire un projet de société attractif, mobilisateur, en phase avec une économie mondialisée et tirant partie des formidables atouts de notre pays.

Notre objectif est de proposer une nouvelle voie politique pour que les populistes ne se retrouvent pas à la tête de notre pays. Nous voulons donc apporter du bon sens au débat politique. Pour cela, notre pays doit comprendre qu’il est un « surdoué qui s’ignore » ! La « marque France » attire le monde entier avec des populations toujours plus nombreuses à pouvoir acheter un produit ou un service français. Elle représente un atout économique considérable dans la mondialisation, un potentiel de croissance et de création d’emplois très important.

Les Français possèdent aussi des talents clés : ils font preuve d’une capacité de travail importante si un environnement motivant leur est proposé, ils possèdent une très grande maîtrise de la complexité, l’esprit de synthèse et une créativité reconnus dans le monde entier. Nous pouvons tirer parti de toutes les opportunités de croissance qu’offrent les révolutions technologiques et industrielles en cours. Cependant, nous subissons surtout les conséquences négatives de la mondialisation et nous ne profitons pas assez de ses impacts positifs car notre pays est bloqué.

Le modèle de l’Etat français est celui d’un Etat omniprésent qui fait pas confiance à la société civile. La France est sur le point de détenir le record des pays développés en matière de dépenses publiques avec 57% de son PIB qui y est consacré, provoquant d’importants gaspillages dénoncés régulièrement par la Cour des Comptes. Conséquence directe de cette gestion inefficace, des besoins de financements publics très significatifs, alimentés par des impôts qui augmentent sans cesse en pénalisant le pouvoir d’achat des plus modestes et en démotivant ceux qui tirent la dynamique économique. La dette publique explose elle aussi, car, même avec des impôts parmi les plus élevés du monde, il faut encore financer un déficit abyssal et emprunter toujours plus. L’administration pléthorique impose au pays une avalanche réglementaire paralysante. Au final, ce modèle provoque une hausse inexorable du chômage, une catastrophe pour notre société, en particulier pour les jeunes générations. La croissance en berne ne donne pas d’espoir sur un retour rapide de jours meilleurs avec les politiques actuelles. Parallèlement, notre Etat providence n’est plus en mesure de soutenir les plus fragiles et de lutter contre les inégalités, notamment en matière d’éducation.

Les hommes politiques sont-ils coupés des réalités du monde de l'entreprise ? En quoi ?

Oui les dirigeants politiques ne connaissent pas l’entreprise. Souvent fonctionnaires en activité ou politique de carrière, ils ne connaissent que le mode de fonctionnement de l’administration française, ultra centralisée et souvent archaïque dans son fonctionnement. Mon expérience est un exemple de cette méconnaissance.

Pire, j’ai compris à mes dépends que l’entreprise était parfois sacrifiée au profit des tactiques politiques ! En 1997, avec mes associés et mes collaborateurs, nous avons donné à notre pays son premier succès mondial dans le logiciel en créant Business Objects, dans un secteur dominé jusque-là par des Américains. Eux-mêmes avaient reconnu ce succès en nous nommant, en 1996, « Entrepreneurs de l’Année » aux côtés de Steve Jobs et Steven Spielberg dans Business-Week. Ayant atteint l’objectif que je m’étais fixé de prouver que des Français étaient capables de réussir aussi bien que des Américains sur leur terrain, j’ai souhaité prendre du recul pour m’occuper de ma famille, plus importante à mes yeux que la réussite matérielle. J’avais aussi décidé d’aider des jeunes entrepreneurs français à innover et à créer des emplois en France.

J’ai alors été confronté à deux lois dramatiques mises en place par un gouvernement de droite. La première concernait les charges sociales rétroactives sur les stock-options, qui mettaient l’entreprise que j’avais fondée en risque de faillite. La seconde, le déplafonnement de l’ISF, m’exposait à une faillite personnelle en taxant un patrimoine virtuel qui ne me rapportait rien et fluctuait dans des proportions considérables. Au moment de la bulle internet, le cours de l’action de Business Objects fût multiplié momentanément par près de 20 avant de revenir à un niveau proche de son point de départ. Je me suis donc battu en créant Croissance Plus, avec lequel nous avons réussi à faire modifier la première loi, mais pas celle sur l’ISF. J’ai alors découvert les défauts de notre classe politique constituée principalement de fonctionnaires souvent de qualité mais ne connaissent pas l’entreprise : une fois que leur ai expliqué, ils comprenaient l’impact en matière d’emplois du déplafonnement de cet impôt, mais ont prétexté que« les Français ne comprendraient pas que l’on touche à l’ISF ». Pourtant, les dirigeants de tous les bords politiques y compris l’extrême gauche reconnaissaient cette erreur. Ils préféraient laisser les créateurs d’emplois et de richesses quitter le pays en masse à un moment où le chômage frappait déjà durement. Ils privilégiaient leur carrière, la prochaine élection, plutôt que leur conviction et la mission d’intérêt général pour laquelle ils avaient été élus. Je me suis résigné la mort dans l’âme à quitter la France pendant 10 ans.

Que pensez-vous apporter de plus au débat ?

N’ayant pas d’ambitions personnelles et n’étant pas affiliés à un parti, nous sommes libres de proposer des réformes audacieuses, courageuses mais nécessaires. Nous voulons que nos propositions soient reprises par les partis de gouvernement, en particulier lors des principales échéances électorales et qu’ait lieu un renouvellement du leadership des partis politiques de gouvernement.

Nous sommes néanmoins prêts à tenter de prendre leur place si cela ne se produit pas.

On vous a accusé le faux nez des Pigeons et autres Poussins, ces patrons et autoentrepreneurs qui ont mené la fronde fiscale contre le gouvernement. "Nous citoyens" sera-t-il avant tout un mouvement anti-fiscalité ?

Notre réaction est motivée par les conséquences des blocages de notre pays qui touchent toute la société française, pas seulement les entrepreneurs.

Le poids de la fiscalité pénalise massivement le pouvoir d’achat des plus modestes, j’ai rencontré des gens qui ne gagnent que 20.000 euros par an et qui doivent payer 4.000 euros rien qu’en de taxes locales. De plus, l’impact fiscal n’est que l’une des conséquences graves de ces blocages. Le chômage de masse et l’explosion de la précarité sont une autre conséquence. Un pays bloqué crée beaucoup de pauvreté, les plus fragiles sont les plus touchés. L’avalanche réglementaire qui détruit l’emploi comme l’a prouvée la tragicomédie du travail le week-end en est une autre. La dette qui explose et nous menace de perdre notre souveraineté et laisse à nos enfants le poids de nos irresponsabilités est aussi une autre conséquence grave. Le manque de projet de société attractif, en particulier pour les jeunes, est très préoccupant. 75% des diplômes des grandes écoles vont chercher leur premier emploi à l’étranger…

Enfin, le plus préoccupant est la montée inexorable des extrêmes.

Vous avez été vous-même évadé fiscal. Pourquoi avoir finalement choisi de revenir en France ?

D’abord, il ne s’agissait pas d’une évasion fiscale. Ce que j’ai fait était parfaitement légal. En 1998, j’ai quitté la France avec regrets. J’ai été mise à la porte, je n’ai pas eu le choix. Si j’étais resté, j’aurais été ruiné au moment de la bulle internet pour l’avoir servi en créant de nombreux emplois, en faisant rentrer beaucoup d’argent dans les caisses de l’Etat et en gravissant l’Everest dans le domaine économique, en montrant aux Français que l’on n’avait aucun complexe à faire dans les industries d’avenir dominées par les Américains. J’aime mon pays et je voulais rester et aider des jeunes entrepreneurs à innover et à créer des emplois en France, leur mettre le pied à l’étrier. Lors de mon départ en Belgique, j’avais fait la promesse de revenir quand les conditions fiscales seraient différentes. En 2008, après le replafonnement de l’ISF, je donc suis revenu, comme je l’avais promis.

Serez-vous en mesure de présenter des candidats aux prochaines élections municipales ?

Nous avons la capacité de présenter des candidats à toutes les prochaines élections. Tout est possible.

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