L’Édito : Réforme des retraites, les vieux font la loi <!-- --> | Atlantico.fr
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Jean-Marc Sylvestre
Jean-Marc Sylvestre
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L'Édito de Jean-Marc Sylvestre

L’examen du projet de réforme des retraites, présenté par le gouvernement à l’Assemblée nationale, va donner lieu à un très bel exercice d’hypocrisie politique. Ce n’est pas du travail législatif, c’est un remake de « courage fuyons ».

Le projet en lui-même n’est déjà pas un modèle d’audace et de responsabilité. Alors que nos systèmes sont confrontés à l’évolution de la démographie et à l’allongement de la durée de vie, le gouvernement est incapable de prendre en compte des phénomènes qui s’imposent à toutes les sociétés modernes. En ne touchant ni à l’âge de départ, ni suffisamment à la durée de cotisation, la réforme proposée ne résout rien d’autre qu'un problème financier immédiat.

En dépit du caractère assez indolore de cette réformette, les députés de la majorité débordent d’imagination pour adoucir encore le texte. Du coup, tout ce qui est proposé et qui sera accepté par le gouvernement va aller à l’encontre de la ligne qu'il aurait fallu suivre. Le groupe socialiste a quasiment obtenu la prise en compte des stages dans le calcul des retraites. Mais comme on ne peut pas ouvrir la porte à une multiplication des stages plus ou moins bidons, toute la difficulté va être de définir les stages retenus. Quels stages ? Combien de temps ? Jusqu’à quel âge ? Encore un beau casse tête administratif en perspective. L’État devait aussi remettre la main sur la caisse de retraite des professions libérales. Laquelle était gérée en toute autonomie. Face à la grogne et la colère de ces professions libérales, le gouvernement va abandonner l’idée d'en nommer le directeur général. Autre changement très démago, les députés de la majorité ont demandé à ce que les excédents de gestion, s’il y en avait, soient affectés non pas au remboursement des dettes mais à l’amélioration des retraites modeste.

Mais le cœur de la discussion va porter sur la prise en compte de la pénibilité. Dans le projet de réforme, il est prévu que la pénibilité du travail impacte directement l’âge légal de départ à la retraite. L’enjeu est dont important sauf que la définition de la pénibilité va relever de la quadrature du cercle. On imagine le débat entre la DRH de l’entreprise, les syndicats, les directions et les caisses de retraite. Le moyen le plus simple, le plus juste aurait été de ne pas introduire la notion de pénibilité dans la gestion de la retraite... Sachant que normalement cette notion de pénibilité est attachée au travail. Elle devrait donc se traduire dans la durée du travail et dans le salaire. En fait, les députés imaginent la création d’un compte personnel de pénibilité sur lequel on pourra créditer des points. Ces points seront, en fin de vie, transformés en avantage retraite. Apparemment on devrait aboutir à ce que les comptes pénibilités permettent de proposer un départ à la retraite à taux plein à 59 ans. Peut-être moins.

Malgré cela, nous resterons le pays occidental avec un âge de départ le plus jeune. Un retraité sur deux va pouvoir partir avant 62 ans, alors que l’âge médian dans toutes les grandes démocraties occidentales se situe plutôt, entre 65 et 67 ans. Le projet initial ne tenait déjà pas en équilibre avant. Nul ne sait ce qu’il en coûtera après la discussion. Rien n'est chiffré. Les comptes ne sont pas faits.

D’ailleurs, l’opposition est étrangement discrète. Les députés de l’UMP comme ceux plus centristes de l’UDI sont incapables de faire des propositions alternatives qui permettraient de sécuriser les systèmes de retraites à très long terme. Le clivage entre la répartition et la capitalisation est passé de mode. On s’est aperçu que dans un système, comme dans l’autre, tout dépendait de la croissance économique. L’opposition, la droite libérale ou la droite sociale, n’ont strictement rien dit. Tout cela montre que la classe politique n’a pas le talent de faire passer des vraies réformes structurelles. L’assise politique est composée pour l’essentiel de Français qui ont plus de 50 ans. Ce sont les plus de 50 ans qui votent. D’où l’obsession des responsables politiques de les caresser dans le sens du poil. Pour être élu ou réélu, mieux vaut ne pas se mettre à dos ceux qui votent. En un mot, les vieux...

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