Déraillement de Brétigny-sur-Orge : ce qui émerge sur les causes<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Faits divers
En février, on avait déjà constaté que les rails n’étaient pas en parfait état.
En février, on avait déjà constaté que les rails n’étaient pas en parfait état.
©Reuters

Négligence

La SNCF a secrètement versé à une cinquantaine de victimes ou familles de victimes de l'accident de Brétigny-sur-Orge (Essonne) une "aide de première urgence" allant de 10.000 à 50.000 euros.

William Durand

William Durand

William Durand est expert ferroviaire. Ingénieur de formation, il a plus de dix ans d'expérience dans les questions liées aux chemins de fer. Il donne des cours dans plusieurs universités suisses. Il est également consultant.

Alexandre Varaut est un avocat et homme politique français, fils de l'avocat Jean-Marc Varaut. Il a été député au parlement européen de 1999 à 2004, élu sur la liste conduite par Charles Pasqua et Philippe de Villiers.

Voir la bio »

Atlantico : La SNCF a versé à 35 victimes ou familles de victimes de la catastrophe ferroviaire de Brétigny-sur-Orge (Essonne), une "aide de première urgence" allant de 10.000 à 50.000 euros. Pour revenir sur cette catastrophe, quelles sont les deux grandes pistes actuellement évoquées ? Quelle responsabilité pour chacune de ces pistes ?

William Durand : En février on avait déjà constaté que les rails n’étaient pas en parfait état. Dans le ferroviaire on fait des contrôles toutes les deux à quatre semaines. Les risques dépendent des réseaux. Toutes les deux semaines, des personnes contrôlent les appareils. Des anomalies ont forcément été détectées depuis février ou mars.

La première piste est celle que des boulons ont manqué. Il se peut qu'il s'agisse de plusieurs boulons car s’il en manque un seul, un train peut encore rouler et il y a peu de risques qu’un accident se produise. On suppose que trois boulons ont manqué et non un seul.

Pour ce qui est de la deuxième piste sur le nivellement du rail, les photos de l'expertise ne montrent pas un rail cassé. Si on découvre un rail endommagé suffisamment rapidement, ce n’est pas dangereux et lorsqu’un train roule sur un rail abimé, on s’en aperçoit rapidement. Des fissures de rails représentent un risque s’il n’y  a pas de réparation rapide.

Alexandre Varaut : Il paraît a priori possible d’écarter une malveillance et c’est plutôt d’une négligence dont il faut parler probablement. La question est de savoir si l’on ignorait qu’un problème se posait, ce qui est une faute ou si l’on savait qu’un problème se posait et qu’on a tardé à le résoudre, ce qui est une faute plus grave.

Y a-t-il d’autres scénarios probables pour expliquer l’accident ?

William Durand : Le vandalisme peut être une piste mais je n’y crois pas car en février-mars, il y avait déjà des problèmes techniques avec les boulons.

Les pistes de l’attentat ou de la dégradation ont été écartées, il faut vraiment connaître les chemins de fer pour endommager les voies.

Alexandre VarautIl est aussi possible et même probable que l’accident n’ait pas une cause unique, que l’on s’aperçoive que c’est l’accumulation de facteurs qui a conduit à ce drame.

Des problèmes d’entretien au niveau des rails auraient été décelés quelques mois avant la catastrophe. Quels sont-ils ? Comment expliquer qu’aucune réparation n’ait eu lieu à ce moment-là ?

William Durand : Justement, des anomalies ont été décelées plusieurs mois avant l’accident et personne n’a remonté l’information. Ceci s’explique par un manque de ressources financières, un manque de personnel pour réaliser les travaux notamment en région parisienne où il y a beaucoup de trafic et un manque d’organisation de la SNCF. On est dans un cercle vicieux où il y a plus de trains, moins de temps et moins d’argent pour entretenir les voies. Lorsque l’usure est constatée, il faut intervenir rapidement mais la SNCF ne l’a pas fait alors que la réparation n’aurait pris que quelques heures.

Si l’éclisse se pose dans une partie d’un appareil de voie qui doit rester ouvert parce qu’une roue doit passer, le train peut dérailler.

Alexandre VarautIl a été évoqué publiquement des défauts d’entretien, la jeunesse et l’inexpérience du responsable, l’absence ancienne de certains boulons, des travaux récents sur le nivellement de la voie…

Peut-on en déduire qu’avec plus de vigilance l’accident aurait pu être évité ?

William Durand : Oui, avec plus de temps, plus de personnel et plus de budget. Il y a de plus en plus d’argent investit pour le développement des lignes à grande vitesse et de moins en moins de budget pour l’entretien et le renouvellement des voies. La SNCF avait décidé trois jours avant l’accident d’investir d’avantage pour la maintenance. On sait maintenant que le problème vient d’une négligence de la SNCF.

Les réparations de voies ne s’apprennent pas dans les cursus techniques comme les BTS, il y a un réel manque de pratique.

Alexandre VarautTout cela mérite d’être vérifié. Cependant, comme l’a sagement reconnu le patron de la SNCF, lorsqu’un train déraille, c’est nécessairement de la faute de la SNCF.

Propos recueillis par Karen Holcman

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !