Shutdown : il n'y a pas que l'économie, la démocratie américaine aussi est menacée par l'acharnement républicain<!-- --> | Atlantico.fr
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Les républicains qui sont majoritaires à la Chambre des représentants n'ont jamais accepté Obama en dépit de sa réélection.
Les républicains qui sont majoritaires à la Chambre des représentants n'ont jamais accepté Obama en dépit de sa réélection.
©Reuters

Colosse aux pieds d'argile

Faute d'accord entre républicains et démocrates, le gouvernement fédéral américain a fermé une part importante de ses services administratifs et fédéraux jugés "non essentiels". Par leur acharnement à combattre l'Obamacare, les républicains sont accusés de prendre en otage le pays.

Jacques  Portes

Jacques Portes

Jacques Portes est, depuis 1995, professeur d'histoire de l'Amérique du Nord à l'Université de Paris 8 Vincennes-Saint Denis. Il est agrégé d'histoire (1966), docteur de 3e Cycle (1974) de l'Université de Paris I Panthéon-Sorbonne, et docteur d'État (1987).

Il a notamment publié États-Unis aujourd'hui : les maîtres du monde ? (2003) ; États-Unis : une histoire à deux visages. Une tension créatrice américaine, 2003.

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Atlantico : Par la façon dont les républicains ont bloqué toute négociation sur le budget dans le but indirect d'empêcher la mise ne place de l'Obamacare - qui prévoit de contraindre tous les américains à souscrire à une mutuelle - le parti républicain met-il la démocratie américaine en danger ?

Jacques Portes : Les républicains qui sont majoritaires à la Chambre des représentants n'ont jamais accepté Obama en dépit de sa réélection, de plus ils sont au début de la période des élections primaires qui choisiront les candidats aux élections du "mid-term" en novembre  2014: ils veulent montrer à leurs électeurs qu'ils ne cèdent pas. Comme le vote de la Chambre est nécessaire pour le budget, ils utilisent leur position de blocage. Elle ne leur rapportera rien, mais ils auront prouvé qu'ils existaient. 

Le coût dans l'opinion est considérable, surtout que le Congrès est toujours très mal considéré ; et si le blocage dure, le coût économique sera considérable, car les États-Unis pourraient être en cessation de paiement.

Les démocrates invoquent la réticence des républicains à approuver le projet Obamacare. Est-ce la seule raison d’une telle cacophonie politique ?

Les plus extrêmes des républicains ont fait de l'Obamacare le symbole de leur combat contre le gouvernement fédéral et contre le président ; ils savaient très bien qu'Obama ne pouvait pas céder, d'autant qu'il a été largement réélu en 2012 et qu'Obamacare a été validée par la Cour Suprême en juin 2012, mais à nouveau, cela leur donne l'impression d'exister.

Ce blocage n’est pas sans rappeler le Shutdown de 1995 sous la présidence Clinton. Là aussi, c'est une réforme du système de santé qui avait été à l'origine du blocage. Pensez-vous que Barack Obama peut sortir vainqueur de cette crise, comme le fit le président Clinton ?

Bill Clinton avait été machiavélique à l'hiver 1995, un an après le rejet par le Congrès de sa propre réforme du système de santé, car il était parvenu à faire porter tout le shutdown sur la responsabilité des absurdes républicains. Obama n'a pas le même caractère et ce n'est que hier qu'il a tenté d'accuser les républicains, peut être réussira-t-il mais l'opinion est plus blasée qu'en 1995.

Certains médias remettent en cause la neutralité de la presse américaine et pointe du doigt une campagne de désinformation que subiraient les citoyens américains ?

La presse américaine est divisée, comme l'opinion, et elle a tendance à exagérer des situations comme cela ; certains médias ont exposé les choses correctement, mais d'autre ont été plus partisans. Il est impossible de savoir comment les gens se forgent leur opinion.

Comment sortir de ce marasme politique dans lequel le shutdown a plongé les Etats-Unis ?

Ce shutdown met en lumière l'archaïsme des pratiques du Congrès soumis à des réélections trop fréquentes, le découpage partisan des circonscriptions, le poids des minorités extrêmes surtout dans le parti républicain. Le Congrès a beaucoup de mal à voter des textes importants, il le fait avec une procédure très longue qui perturbe tout. Les indispensables réformes sont difficiles car il faudrait amender la Constitution.

A court terme, il faut que les retours des électeurs soient critiques envers les républicains pour qu'ils se modèrent et qu'ils comprennent que cela ne leur servira finalement à rien. A long terme c'est très compliqué.

Propos recueillis par @SachaCONRARD

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