Cazeneuve promet une pause fiscale jusqu'en 2017 : un projet illusoire en poursuivant la politique actuelle<!-- --> | Atlantico.fr
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La pause fiscale sera poursuivie jusqu'en 2017, assure le ministre du Budget Bernard Cazeneuve.
La pause fiscale sera poursuivie jusqu'en 2017, assure le ministre du Budget Bernard Cazeneuve.
©Flickr / DenisGiles

Pinocchio

Le ministre du Budget Bernard Cazeneuve a assuré jeudi dans un entretien au Parisien que "des impôts augmenteront, d'autres baisseront", "mais que le solde sera stable jusqu'en 2017".

François Tripet

François Tripet

François Tripet est avocat fiscaliste.

Avocat au Barreau de Paris depuis 1978, il est essentiellement un " patrimonialiste international " qui, avec son équipe, apporte son concours et son assistance à plus d'un millier de familles réparties sur les cinq continents.

François Tripet est l'auteur de l'ouvrage de réference "Droit Fiscal Francais et Trusts patrimoniaux Anglo-saxons " ( LITEC, 1989 )

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L'Etat annonce que, pour respecter un objectif auto proclamé  de "pause jusqu'en 2017" (par coïncidence, juste au milieu d'un ras le bol fiscal généralise),  il va enfin se lancer dans de vraies économies ! Joignant le geste à la parole, la puissance publique annonce fièrement pouvoir réaliser dès 2014 une formidable économie de 15 milliards d'euros. On ne peut qu’être impressionné par sa capacité à réaliser sur le champs une prouesse qui s'est pourtant avérée impossible à réaliser au cours de chacune des soixante dernières années.

Pourtant, à y regarder de plus près, ces 15 milliards d'économie de l'Etat n'en font plus que 7 si l'on prend en compte 6 milliards de réduction des prestations sociales et 2 milliards de transferts aux collectivités locales. Pris d'un doute, on s'empresse alors d'aller vérifier dans le projet de loi de finances le montant des dépenses nettes de l'Etat : curieusement, elles passent de 279,4 milliards à 278 milliards, soit une réduction de 1,4 milliard seulement. En y regardant encore de plus près, on observe que l'essentiel de cette (modeste) économie apparente repose sur des transferts de charges vers les collectivités locales. Au final, la vraie économie tourne autour de 100 Millions soit 0,03 % du budget de l'Etat. Nous voilà rassurés : nous sommes bien en présence d'un Etat incapable d'observer une vraie diète, ce que nous avions observé immanquablement depuis 60 ans. Du reste, s'il fallait se rassurer définitivement, il suffirait de noter que les dépenses des ministères restent stables à 196 milliards !
Autrement dit, l'impuissance de l'Etat à couper "réellement" dans son train de vie  est compensée par une extraordinaire sobriété des ministres financiers à décrire l'inexplicable : réaliser 15 milliards d'économie par la simple magie des mots alors même que le président de la Commission des Finances de l'Assemblée nationale  n'a identifié que quelques centaines de millions d'économies éparses dans l'épais projet de loi de finances qui lui était présenté par le gouvernement  ! Du reste, le ministre du Budget qui ne nous avait pas habitué à tant d'humour, semble avoir précisé qu'on assiste à une économie de 15 milliards sur une hausse tendancielle de 20 milliards, ce qui constitue pour le commun des mortels une hausse de 5 milliards.
Dès lors, l'équation fiscale est terriblement simple : si l'Etat ne se serre pas la ceinture "réellement", c'est le retour de la prospérité économique qui fera rentrer des recettes supplémentaires de TVA, de TIPP et autres taxes "d'activité". Comme ce retour semble aussi hypothétique que les visions de Sœur Anne dans le drame de Claudel, il faudra bien compenser ces recettes cruellement absentes ou insuffisantes par une hausse de la fiscalité des ménages et sans doute des entreprises. La seule satisfaction est qu'en 2008-2012, on a plumé les gens aisés qui sont hélas peu nombreux en sorte que le résultat est assez faible au regard du trou abyssal de nos finances publiques. A partir de 2013, on va plumer les classes moyennes qui présentent l'avantage incomparable d’être des millions, laissant ainsi espérer des recettes fiscales dignes de nos déficits .
Jean-Baptiste Colbert disait un jour à Louis XIV qu'en matière de fiscalité, le plus important est de savoir plumer la poule sans la faire crier. Il est vrai que son patron n'était pas un modèle en matière de cure d'amincissement des dépenses de l'Etat ! Aujourd'hui, on préférera plus modestement s'en référer à la sagesse du ministre des Finances Henri Queuille (1950)  selon lequel "les promesses n'engagent que ceux qui les écoutent"! Il termina son ministère en apothéose en déclarant que "la politique n'est pas l'art de résoudre les problèmes mais de faire taire ceux qui les posent" . Messieurs Moscovici et Cazeneuve viennent de nous administrer une grande leçon de...politique !

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