Peut-on vraiment devenir invisible pour les moustiques ?<!-- --> | Atlantico.fr
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De nouveaux moyens de lutte sont à l'étude en alternative aux produits insecticides qui présentent des problèmes environnementaux.
De nouveaux moyens de lutte sont à l'étude en alternative aux produits insecticides qui présentent des problèmes environnementaux.
©Wikipédia commons

Ça pique !

Des chercheurs américains ont identifié certaines molécules sécrétées par la peau attirant les moustiques. Cette découverte pourrait à terme permettre d'inhiber l'odorat de ces insectes et créer de nouveaux produits anti moustique.

Yvon Perrin

Yvon Perrin

Yvon Perrin est entomologiste médical, spécialisé dans la lutte contre les moustiques. Il est ingénieur d’études au Centre National d’Expertise sur les Vecteurs (CNEV) et à l'Institut de recherche pour le développement (IRD) de Montpellier.

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Atlantico : Des scientifiques américains ont mis en lumière des molécules permettant de nous rendre indétectables aux moustiques. Quelles sont ces molécules et à quels mécanismes de défense ouvrent-elles la voie ?

Yvon Perrin : Les moustiques sont attirés par le CO2 et certains acides gras, notamment lactiques qui sont produits par la peau et la transpiration. C'est en sentant ces molécules que le moustique choisit son hôte, ce qui explique pourquoi certaines personnes sont des victimes privilégiées de ces insectes.

Mais l'identification par les chercheurs américains de ces molécules, dont le 1-methyl piperzine, va permettre de bloquer les récepteurs sensoriels des moustiques à ces molécules. Les moustiques ne sentiraient ainsi plus les molécules qui les attirent, rendant la personne invisible pour eux.

En quoi les produits anti moustiques ainsi développés seraient plus efficaces que les répulsifs traditionnels ?

Sur le principe, les applications issues de cette découverte fonctionneraient de la même façon que les répulsifs traditionnels appliqués en spray ou en lotion sur la peau ou les vêtements.

Leur efficacité réside dans le fait que, pour maintenir une descendance, les femelles ont besoin de trouver du sang pour nourrir leur progéniture. Si elles ne trouvent pas de personne à piquer, il n'y a pas de génération suivante. Mais pour que l'efficacité de ces produits soit totale, il faudrait que tout le monde les utilise, ce qui est bien évidemment impossible. Les moustiques trouveront toujours des victimes à piquer.

D'apparence anodine, cette découverte peut-elle en fait avoir des impacts sanitaires considérables ?

La principale maladie transmise par les moustiques reste de loin le paludisme, responsable de plus de 600.000 décès par an selon l'OMS. 90% des cas mortels dus à cette maladie se situent en Afrique subsaharienne.

La dengue est aussi très répandue en zone tropicale. Elle cause moins de décès, quelques milliers par an, mais touche plus de monde entre les deux tropiques. Chaque progrès réalisé dans la lutte contre les moustiques permet de faire baisser ces chiffres élevés.

Quelles autres stratégies sont actuellement étudiées pour lutter contre les moustiques ?

La recherche dans ce domaine est assez importante, en particulier à cause de la mortalité due au paludisme. De nouveaux moyens de lutte sont à l'étude en alternative aux produits insecticides qui présentent des problèmes environnementaux, sanitaires (réaction aux produits,  allergies, etc.) et de résistance de l'espèce.

La lutte génétique est une technique qui consiste à rendre l'insecte stérile en développant en laboratoire une population et en stérilisant les mâles avant de les relâcher dans la nature. Elle peut également se faire par irradiation. Lorsqu'ils s'accouplent ensuite avec les femelles sauvages, ils n'engendrent pas de descendance, ce qui est particulièrement efficace car celles-ci n'ont qu'une seule fécondation au cours de leur vie. Cette méthode est également très sélective pour l'espèce que l'on cherche à éliminer et permet de ne pas utiliser de pesticides. De telles expériences ont actuellement lieu à la Réunion, en phase de laboratoire, et des lâchers ont également été réalisés aux îles Caïmans et au Brésil. En Australie, la même méthode a été utilisée avec une bactérie naturelle qui créé une incompatibilité avec les femelles et empêche la descendance.

D'autres recherches portent sur la conception de pièges attractifs pour entraîner les moustiques sur eux plutôt que sur les hommes en trouvant des odeurs encore plus attirantes que celles que l'homme peut produire.

Propos recueillis par Pierre Havez

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