Toujours pas rentables, les énergies renouvelables ont de surcroît mis en péril le marché de l'électricité en Europe<!-- --> | Atlantico.fr
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La réglementation trop favorable aux énergies vertes cause un certain nombre de distorsions.
La réglementation trop favorable aux énergies vertes cause un certain nombre de distorsions.
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L'un contre l'autre

Les énergies renouvelables sont privilégiées sur le marché de l'électricité parce que leur coût affiché est plus faible. Mais celui-ci ne tient pas compte des investissements initialement requis.

Stephan Silvestre

Stephan Silvestre

Stephan Silvestre est ingénieur en optique physique et docteur en sciences économiques. Il est professeur à la Paris School of Business, membre de la chaire des risques énergétiques.

Il est le co-auteur de Perspectives énergétiques (2013, Ellipses) et de Gaz naturel : la nouvelle donne ?(2016, PUF).

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Alors que les États-Unis vivent un nouvel âge d’or énergétique grâce aux hydrocarbures non conventionnels et à des prix de l’électricité très bas, l’Europe se trouve dans une situation tendue à bien des égards. Les politiques publiques mises en œuvre dans l’Union européenne s’avèrent très pénibles pour les producteurs de gaz et d’électricité. Paradoxalement, les fortes hausses de tarifs perçues par les consommateurs ne leur bénéficient pas. Au contraire, ils sont confrontés simultanément à une stagnation de la demande, des plans d’investissements colossaux, des prix de gros de moins en moins prévisibles et une fiscalité elle aussi instable et défavorable.

Les distributeurs de gaz doivent faire face à une stagnation de la demande et à la concurrence du charbon, dont les prix se sont effondrés en raison du basculement américain du charbon vers le gaz de schiste. Résultat, plusieurs centrales à gaz ont fermé en Europe, alors même qu’elles offrent un bien meilleur bilan environnemental que les centrales au charbon.

Pour les producteurs d’électricité, le principal problème vient de la réglementation trop favorable aux énergies vertes et qui cause un certain nombre de distorsions. Il faut savoir que, sur les marchés de l’électricité, la production est appelée selon l’ordre dit de mérite, c’est-à-dire du coût marginal le moins élevé au plus élevé. Or, bien que l’électricité d’origine renouvelable affiche un coût total plus élevé que celle d’origine fossile, en raison des investissements requis, son coût marginal, qui ne comprend que les coûts opérationnels et le combustible, est plus faible. En conséquence, elle se trouve privilégiée sur les marchés.

De plus, la production croissante d’électricité verte, incitée par les pouvoirs publics qui obligent les opérateurs à la racheter en priorité, induit des surcoûts pour l’électricité fossile ; en effet, les centrales thermiques doivent être maintenues actives en permanence afin de suppléer les sources intermittentes, même si elles ne produisent pas. C’est ce qui explique l’apparition temporaire de prix négatifs de l’électricité sur les marchés. En périodes de production élevée alors que la demande est faible (par exemple lorsque le vent souffle fort en mer du Nord), les exploitants doivent vendre la surproduction des centrales thermiques restées ouvertes, au cas où le vent s’arrête, à prix négatif, car cela leur reviendrait plus cher de fermer et de rouvrir leurs centrales. Cette anomalie est due à la spécificité de l’électricité qui n’est pas stockable. Mais cela va continuer d’inciter les producteurs à fermer définitivement des centrales plutôt que de devoir gérer ces situations, quitte à devoir acheter de l’électricité sur les marchés spots. Cependant, si tous les pays européens procèdent de la sorte, une pénurie de centrales permanentes pourrait se faire sentir, surtout après la fermeture des centrales nucléaires allemandes.

À cela s’ajoute l’énorme besoin en investissements sur les réseaux électriques généré par les énergies renouvelables. Ce besoin a deux origines : d’une part, l’éloignement des sources de production (éoliennes sur les côtes au nord, panneaux solaires au sud) des zones de consommation. Cela oblige à déployer de nombreuses lignes à haute tension à travers les pays, problème que l’Allemagne n’a pas fini de résoudre (elle doit encore tirer 4.000 km de lignes pour un coût de 30 milliards d'euros, sans compter les blocages locaux). Et d’autre part, la nécessité d’investir dans des réseaux de plus en plus sophistiqués et intelligents capables de gérer des sources intermittentes et des productions domestiques distribuées.

Tous ces problèmes peuvent trouver des solutions. Mais ce que demandent les opérateurs c’est une pause dans les incitations massives afin de pouvoir gérer la transition dans le temps. Quoiqu’il en soit, cela se traduira inévitablement par de nouvelles répercussions sur les factures des consommateurs.

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