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Les raisons pour lesquelles il ne faut pas se réjouir trop vite du rebond de croissance en zone euro et en France
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Entre les lignes

Selon Eurostat, la zone euro devrait connaître +0,3% de croissance au deuxième trimestre 2013. L'Allemagne et la France tirent ce chiffre vers le haut, mais la récession n'est pas finie pour tous les pays de l'Union européenne.

Philippe Waechter

Philippe Waechter

Philippe Waechter est directeur des études économiques chez Natixis Asset Management.

Ses thèmes de prédilection sont l'analyse du cycle économique, le comportement des banques centrales, l'emploi, et le marché des changes et des flux internationaux de capitaux.

Il est l'auteur de "Subprime, la faillite mondiale ? Cette crise financière qui va changer votre vie(Editions Alphée, 2008).

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La hausse de l'activité a surpris en zone euro au deuxième trimestre. Le PIB a progressé de 0,3% et celui de la France de 0,5%. Cependant, doit-on interpréter ce rebond de l'activité comme une rupture à la hausse du processus de croissance, ou est-il encore trop tôt pour l'imaginer ?

Les deux graphiques ci-dessous montrent pour la zone euro et pour la France le profil du PIB et une tendance calculée sur la période d'avant crise. Dans les deux graphes, la reprise de l'activité de 2009/2010 s'essouffle en 2011. La dynamique globale, alors moins robuste, ne crée plus l'impulsion de sortie de récession, et la dynamique interne de la zone euro, minée par les inquiétudes liées à la Grèce et aussi à la mise en place de politiques d'austérité, est un frein fort à la croissance.

En France, à partir de la fin du premier trimestre 2011 le PIB stagne, pas de rupture ni à la hausse ni à la baisse. Pas étonnant dès lors que le marché du travail se dégrade. En zone euro, en raison des récessions profondes enregistrées en Espagne et en Italie, l'activité décroche. On voit bien la tendance baissière depuis l'automne 2011.

La hausse de l'activité constatée au deuxième trimestre 2013 ne peut pas encore s'interpréter comme un changement de tendance durable. D'abord parce que même si le rebond est significatif il n'est pas spectaculaire, le rythme de progression annualisé n'est pas excessif. Généralement, dans les phases de retournement, le taux de croissance est bien supérieur à sa tendance de long terme marquant ainsi un véritable changement de comportement des acteurs de l'économie. Ce n'est pas le cas aujourd'hui. Pour la France, il est comparable à celui observé sur la tendance (1,9% en taux annualisé et 1,8% pour la tendance) mais il est bien inférieur pour la zone euro à 1,1% contre 1,9% pour la tendance d'avant crise. Dès lors on ne peut pas considérer la hausse du deuxième trimestre au-delà d'un rebond conjoncturel qui peut s'estomper rapidement.

Pour l'instant il s'agit davantage d'un arrêt de la récession. Les risques sont perçus comme plus réduits, ce qui limite le comportement attentiste et des facteurs spécifiques liés notamment à la météo. La dynamique n'est pas encore assurée. Elle ne le sera que lorsque l'investissement productif repartira pour l'ensemble de la zone euro et pour la France en particulier. La situation va rester incertaine jusqu'à la fin de l'année. Mais il faut profiter de ce moment pour provoquer les incitations qui pousseront les entreprises à investir car c'est par le biais de l'investissement que la situation macroéconomique s'améliorera dans la durée. En outre, après une longue période d'incertitude on peut comprendre que les chefs d'entreprise soient prudents dans leurs dépenses en capital. Ils vont souhaiter y voir plus clair et avoir un environnement plus stable. Cela pourrait s'observer sur la première partie de l'année 2014.

Cependant au regard des enquêtes menées au sein de la zone euro depuis trois mois, on constate que les signaux sont plus positifs et qu'il y a une dynamique spécifique à la zone euro qui se met en place. Cela est perceptible notamment dans le secteur manufacturier où des ajustements de stocks ont eu lieu et où les commandes à l'exportation progressent enfin. Cela donne des indications plus fortes puisque les pays de la zone euro échangent beaucoup entre eux. Ces signaux, souvent significatifs d'un retournement cyclique en Europe, permettent d'imaginer un prolongement du rebond observé au deuxième trimestre.

En d'autres termes, le chiffre du PIB ne montre pas de rupture, mais les signaux issus des enquêtes peuvent permettre d'être plus optimiste et d'envisager une deuxième partie de l'année avec un risque de rechute réduit. Il faudra pour accentuer l'activité à la hausse que l'investissement reparte très nettement. C'est le point faible de l'économie de la zone euro depuis 2011 mais il est essentiel d'inverser la tendance pour retrouver un rythme de croissance élevé dans la durée. La réduction de l'incertitude constatée depuis plusieurs mois est un facteur clé pour le comportement d'investissement des entreprises. Il traduit la construction institutionnelle de la zone, élément nécessaire à sa pérennité. Il faut aussi que le cadre fiscal, économique et social de ces entreprises gagne en stabilité pour que chacun puisse se projeter dans l'avenir. C'est l'enjeu des mois qui viennent pour que ce rebond conjoncturel encore fragile se transforme en rupture à la hausse et finalement en créations d'emplois.

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