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Pierre Moscovici jongle avec la croissance : mais à quoi faut-il vraiment s’attendre pour 2013 et au-delà ?
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Prospective

+0,1%, -0,1%... Pierre Moscovici a multiplié les déclarations contradictoires concernant la croissance attendue en 2013. Quant au FMI, il parie sur un repli de 0,2%. L'OCDE table, elle, sur -0,3%.

UE Bruxelles AFP

Jean-Paul Betbeze

Jean-Paul Betbeze est président de Betbeze Conseil SAS. Il a également  été Chef économiste et directeur des études économiques de Crédit Agricole SA jusqu'en 2012.

Il a notamment publié Crise une chance pour la France ; Crise : par ici la sortie ; 2012 : 100 jours pour défaire ou refaire la France, et en mars 2013 Si ça nous arrivait demain... (Plon). En 2016, il publie La Guerre des Mondialisations, aux éditions Economica et en 2017 "La France, ce malade imaginaire" chez le même éditeur.

Son site internet est le suivant : www.betbezeconseil.com

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Le gouvernement est en train de peaufiner sa prévision de croissance pour 2013, autrement dit pour 2014. Les deux sont liées : c’est tout l’enjeu économique et fiscal de la période que nous vivons.

2013 est pratiquement joué : nous aurons autour de 0 % de croissance en 2013, comme en 2012. La croissance a été en effet de -0,2 % au premier trimestre, plutôt 0,2 % au deuxième trimestre, disons 0,1 % au troisième et autant au quatrième. Nous avons donc 0,1 % de croissance au mieux entre 2013 et 2012. Pourquoi ce chiffre peut-il être considéré comme optimiste ? Pour deux raisons. D’abord parce que la demande interne va finir par réagir négativement aux "perceptions fiscales" que les Français vont recevoir sous peu. Ils verront alors l’importance des prélèvements en cours. Ensuite parce qu’on suppose que la situation extérieure de la France s’améliore sans problème, bénéficiant de l’amélioration des voisins alors que le pays a fait bien moins d’efforts qu’eux pour regagner en compétitivité salariale : pas sûr.Donc : 0 % pour 2013.

Les problèmes liés au bouclage fiscal de 2013 montrent l’ampleur des difficultés. Les impôts entrent mal, parce que la TVA pâtit d’une consommation plate et qui va vers des produits de base et aussi parce que les entreprises, notamment les PME, pâtissent d’une rentabilité faible et vont donc annoncer des résultats fiscaux réduits. Il n’y a aucun miracle : la montée des prélèvements fiscaux pèse lourdement sur la demande des ménages et sur les investissements des entreprises.

2014 sera l’année charnière. La France a obtenu un délai de deux ans de ses partenaires et de la Commission européenne pour regagner le sentier d’équilibre de ses comptes. Mais si la croissance s’établit plutôt à 0,7 ou 0,8 % de croissance en 2014, il y aura un nouvel écart de financement qu’il sera impossible, cette fois, de combler par la fiscalité.D’un côté en effet, la fiscalité des plus hauts revenus a atteint son point haut. Mais d’un autre côté, le recours à des "impôts à large spectre" comme la CSG, qui rapportent beaucoup de manière diffuse, peut freiner (au moins) la consommation, contrairement à l’objectif des pouvoirs publics. Dans ce contexte, l’hypothèse que le taux d’épargne, en baissant légèrement, permettrait de maintenir le niveau de consommation devient de plus en plus fragile. La voie de l’impôt est, sinon fermée, du moins très réduite pour les ménages, et quasi fermée pour les sociétés (l’idée d’une taxe sur les dividendes, pour "forcer" à autofinancer, peut aussi avoir des effets pervers). Restent deux voies : la première qui consiste à mener des réformes plus profondes pour stimuler les marchés du travail et des produits, mais rien ne sera rapide. La seconde consiste à baisser davantage la dépense publique : moins de fonctionnaires au centre et dans les collectivités locales, optimisation des systèmes de soin, modernisation des systèmes de formation… En théorie, cette demande publique diminuée a un effet négatif sur la croissance, sauf si elle est la garantie d’une fiscalité qui va, peu à peu, baisser – soutenant ainsi la consommation privée.

Jouer au chat et à la souris sur les chiffres de croissance a un intérêt intellectuel limité, d’autant qu’il cache l’essentiel : la stratégie de réduction des déficits publics et sociaux ne peut plus passer par l’impôt. Elle doit être plus couplée que jamais à des politiques de réformes pour soutenir la croissance en modérant les salaires dans la durée et en arrêtant de socialiser la baisse des coûts salariaux. Pas de croissance cette année, pas assez l’an prochain : il faut faire autre chose qu’augmenter la fiscalité des "riches" pour baisser les coûts des bas salaires.

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