Que se passera-t-il si les retraites promises ne sont pas payées ? <!-- --> | Atlantico.fr
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2 040 milliards d'euros est la "richesse" créée chaque année par la France.
2 040 milliards d'euros est la "richesse" créée chaque année par la France.
©Reuters

Décod'Eco

Les conséquences de la faillite de la ville de Detroit pourraient n'être qu'un avant-goût de ce qui attend les pays occidentaux, et notamment la France...

Isabelle  Mouilleseaux

Isabelle Mouilleseaux

Isabelle Mouilleseaux est directrice de publications chez Publications Agora.

Elle a notamment co-écrit Le déclin du Dollar : une aubaine pour vos investissements ? (Valor, 2008).

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C'est actuellement la question que se posent les 20 000 anciens employés du service public de la ville de Detroit qui vient de se déclarer en faillite. Ils craignent de voir leurs pensions amputer, et ils ont raison. L'expert mandaté par l'état du Michigan pour gérer le délicat cas de Detroit vient d'ores et déjà d'annoncer que les retraites devront être réduites tôt ou tard.

Ceci pourrait-il nous arriver en France ? Chose promise est-elle chose due ? Ou une promesse n'est-elle finalement que du vent, le vent pouvant tourner ? Pour ma part, et surtout venant de l'Etat, je préfère "un tiens à deux tu l'auras".

Ce que l'on crée réellement et ce que l'on promet : état des lieux 

  • 2 040 milliards d'euros, c'est la "richesse" créée chaque année par la France. Je me permets de mettre des guillemets, car curieusement, les dépenses publiques de l'Etat (57% du PIB) entrent dans le calcul du PIB, ce qui m'a toujours paru être une aberration.

En effet, une dépense n'est pas une création de richesse puisque sa contrepartie (sa source) est la ponction fiscale ou le recours à l'endettement (la dette publique). Seul ce qui est effectivement créé et produit est source de vraie richesse. Principal pourvoyeur : les entreprises (43% du PIB seulement).

  • 1 900 milliards d'euros. Ça, c'est ce que nous devons collectivement.

C'est le montant de notre dette publique accumulée depuis 40 ans. 92% du PIB et plus du double de la création de richesse vraie, réelle, celle des entreprises. Cette dette croit au rythme de 320 millions d'euros par jour ; la charge de la dette pèse pour 46 milliards dans notre budget. 46 milliards d'euros... c'est plus que les recettes fiscales annuelles collectées au titre de l'impôt sur les sociétés...

Notez au passage la fâcheuse tendance des politiques, tous bords confondus, à "pyramider à la hausse" en matière de dette publique. Comment s'en offusquer, me direz-vous : il leur faut bien satisfaire leurs clients, la cour, l'aréopage... et surtout être réélu. Les promesses, ça coûte cher.

Le problème, c'est que tout le monde ne bénéficie pas équitablement de cette manne savamment redistribuée, avec grâce et sans parcimonie, par nos zélés politiques... Si la génération du baby-boom en a très largement profité, les jeunes, littéralement exclus du système (des retraites et du travail), sont les grandes victimes. A eux de payer les avantages acquis de leurs aînés auxquels ils n'auront pas droit. On comprend leur amertume. Difficile d'en vouloir aux quelque 200 000 jeunes qui ont déjà plié bagages depuis 2008 pour tenter leur chance sous des cieux plus cléments...

Où en étions-nous ? Ah oui... 1 900 milliards d'euros de dettes donc.

- Ajoutons à ces 1 900 milliards quelque 3 090 milliards d'euros supplémentaires

A ce stade, le compteur taquine tout de même les 5 000 milliards... Soit 245% du PIB, quasiment six fois la vraie richesse annuelle créée par nos entreprises. On ne joue plus en catégorie poids plumes...

3 000 milliards d'euros de dette supplémentaire : de quoi parle-t-on ?

Du très discret hors bilan. Vous savez, ces dettes qu'on ne comptabilise pas dans le bilan parce que qualifiées d'"incertaines"... On y trouve notamment les garanties données par la France au MES pour "sauver l'euro" (187 milliards d'euros), ou encore les engagements de retraite de l'Etat au titre des fonctionnaires (1 679 milliards).

Ce qui est frappant, c'est la trajectoire de cette dette : elle a doublé en cinq ans, et triplé depuis 2005 (le rapport Pébereau chiffrait il y a huit ans les engagements hors bilan à 1 000 milliards d'euros).

Curieusement, il n'existe aucune règle internationale (ni européenne) pour définir ce qui relève du bilan et du hors-bilan. Ainsi, les Anglo-Saxons mettent les engagements de retraite des fonctionnaires dans le bilan (ils sont compris dans la dette), contrairement à nous.

Il sera intéressant de voir ce qui va se passer avec les retraites des fonctionnaires de la ville de Detroit, soi-disant garanties par la Constitution de l'état du Michigan. Seront-elles effectivement payées ? Ou les fonctionnaires verront-ils leur retraite partir partiellement en fumée comme ce fut le cas pour les ex-salariés de General Motors en 2008 ?

En attendant, votre perspicacité vous pousse à vous demander pourquoi les retraites futures à payer aux fonctionnaires sont cataloguées "incertaines" puisque classées en hors-bilan...

Se pourrait-il que l'Etat ne verse pas les retraites promises ?

Il semblerait que ce soit possible. En effet, ces engagements ne sont pas contractuels ; et encore moins garantis par la Constitution. Ce droit à la retraite est purement statutaire et ce statut peut évoluer à tout moment.

Une "simple" réforme du statut de la fonction publique permettrait ainsi de revoir à la baisse, ou à la hausse tout l'édifice.

Donc si un jour la France devait par je ne sais quel hasard fortuit se prendre le mur...

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