Vie familiale : les hommes ne sont pas des lâches... leurs employeurs, si<!-- --> | Atlantico.fr
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Selon l’institut de Washington, au sein d’un couple, les hommes assument en moyenne près de 60% des heures de travail professionnelles, et les femmes 65% des tâches domestiques et des responsabilités familiales.
Selon l’institut de Washington, au sein d’un couple, les hommes assument en moyenne près de 60% des heures de travail professionnelles, et les femmes 65% des tâches domestiques et des responsabilités familiales.
©Reuters

Management fautif

Une récente étude menée par le Pew Research Center met en avant les inégalités entre hommes et femmes concernant la répartition de leur temps entre vie professionnelle et vie de famille. La faute, non pas à la volonté des hommes, au contraire, mais à la culture managériale du monde du travail.

Antoine  de Gabrielli

Antoine de Gabrielli

Antoine de Gabrielli est dirigeant de Companieros, fondateur de l'association Mercredi-c-papa et initiateur du projet Happy Men. Blogueur sur la question de l'égalité professionnelle entre hommes et femmes (www.mercredi-c-papa.com), il est également membre de la Commission égalité professionnelle du Medef, de la Charte de la Diversité, de l'Association Française des Managers de la Diversité (AFMD) et du Club XXIème siècle qui œuvre pour l'intégration républicaine. Suivez Antoine de Gabrielli sur Twitter : @happy_men_fr ou @adegabrielli 

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Les femmes assurent toujours en France l’essentiel des responsabilités familiales et domestiques, tout en étant aujourd’hui massivement engagées dans la vie professionnelle. Cette double charge de travail met en lumière un facteur limitant de l’épanouissement  professionnel des femmes : si elle était mieux répartie entre hommes et femmes, elle serait moins porteuse de discriminations professionnelles pour les femmes. Les hommes le veulent-ils, les hommes le peuvent-ils ?

Une récente étude américaine, publiée par Pew Research, vient de donner un éclairage intéressant sur la question du partage des responsabilités professionnelles et familiales dans les couples.

Selon l’institut de Washington, au sein d’un couple, les hommes assument en moyenne près de 60% des heures de travail professionnelles, et les femmes 65% des tâches domestiques et des responsabilités familiales. Ces chiffres ne sont pas loin de ceux d’enquêtes similaires menées en France. L’étude montre aussi que le temps globalement consacré par chaque membre du couple à l’ensemble des activités professionnelles ou familiales est identique au sein du couple. Dit autrement, cela signifie que dans un couple, hommes et femmes travaillent autant, même si la répartition de leurs responsabilités est différente.

Chez Mercredi-c-papa, nous avons toujours émis l’hypothèse qu’il y avait une logique de vases communicants dans les couples, entre le temps des hommes et le temps des femmes. L’étude de Pew Research confirme que, d’une certaine manière, si une femme décide d’investir plus de temps dans la vie familiale, il se produit une compensation de son conjoint, qui s’engage d’avantage dans la vie professionnelle. Si cela se vérifie dans un sens, cela doit logiquement être aussi vrai dans l’autre : si une femme décide, en raison d’une promotion par exemple, de d’avantage s’investir dans la vie professionnelle, son conjoint devra alors compenser en s’engageant plus intensément dans la vie familiale.

On touche pourtant là à l’un des facteurs de blocage de l’égalité professionnelle : on sait que ce qui se fait classiquement dans un sens se réalise nettement moins dans l’autre, les hommes semblant plus enclins à développer leur investissement professionnel que leur investissement familial.

Derrière cette constatation, avons-nous la bonne interprétation des comportements masculins ? La même étude de Pew Research montre que les hommes sont, à peu de choses près (50% contre 56%), aussi nombreux que les femmes à trouver difficile ou très difficile la conciliation entre vie professionnelle et vie privée. Par ailleurs, 46% d’entre eux, contre 23% des mères, disent même vivre un conflit intérieur quant au temps dont ils disposent pour prendre soin de leurs enfants. On est donc assez loin de l’image d’hommes ivres du bonheur de s’investir sans retenue dans l’univers professionnel, abandonnant sans regret l’éducation de leurs enfants à leur conjoint.

Dans ces conditions, d’où peut venir qu’il soit apparemment si difficile aux hommes de mieux partager les responsabilités familiales, ce qui assurerait à leur conjoint la possibilité d’un meilleur épanouissement professionnel ?

Chez Mercredi-c-papa, nous pensons que, dans l’univers professionnel, rares sont les hommes qui peuvent librement exprimer des besoins d’adaptation de leur temps de travail, sans pour autant voir questionner leur motivation professionnelle. En clair, le plus souvent, les hommes ou les pères n’osent pas faire état de besoins personnels ou familiaux, craignant que leurs supérieurs hiérarchiques ou leurs collègues de travail interprètent ces demandes comme le signe d’un désinvestissement professionnel. C’est donc peut-être la culture managériale du monde du travail qui est, plus que les hommes, le premier frein à un réinvestissement par les hommes de la sphère privée. Et, partant, à un meilleur investissement par les femmes de la sphère professionnelle. De fait, nous fonctionnons toujours dans des organisations du travail conçues dans les années 1950, où on considérait que le rôle d’un homme était d’être investi au maximum de sa disponibilité dans le monde du travail, son conjoint assurant l’intendance familiale. Sociologiquement, ce modèle a pratiquement disparu, mais il imprègne encore non seulement les esprits mais aussi l’organisation même du travail.

Ces différentes réflexions permettent de regarder différemment la question de l’égalité professionnelle, en prenant mieux conscience de la véritable nature des difficultés. Le point de blocage se situe apparemment moins dans un caractère masculin qui serait par nature fermé à l’investissement familial, ce que contredit l’étude de Pew Research, mais bien plus dans une culture managériale qui ne permet pas l’expression habituelle de ces besoins. C’est donc elle qui apparaît comme le principal facteur de discrimination professionnelle des femmes, puisque raison principale de la difficulté des hommes à mieux investir le monde familial, condition sine qua non du développement professionnel des femmes mères de famille.

Il n’en reste pas moins que si l’investissement familial des hommes ne semble demander qu’à s’épanouir, on peut douter que le même désir se libère quant à la prise en charge des tâches domestiques. Celles-ci restent indiscutablement, dans la plupart des cas et quelque soient les pays, très majoritairement, et injustement, entre les mains des femmes. Sur ce point on ne s’étonnera pas que l’étude de Pew Research n’ait pas exploré les frustrations des hommes…

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