Pourquoi développement économique et obésité vont souvent de pair<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Culture
Plus les populations sont riches, moins leur part de budget alimentaire est important.
Plus les populations sont riches, moins leur part de budget alimentaire est important.
©

Plus riche, plus gros ?

Aujourd'hui, un tiers des Chinois âgés de 22 à 69 ans sont touchés par le surpoids ou l'obésité. Les effets pervers d'une transition économique rapide.

Claude  Fischler

Claude Fischler

Claude Fischler est directeur de recherche au CNRS, ses travaux portent sur les interfaces entre le biologique et le sociale dans les comportements et pratiques alimentaire. Il est également l’auteur de « Les alimentations particulières ».

Voir la bio »

Atlantico : La Chine est touchée de plus en plus par des problèmes d'obésité. Quel est le lien entre transition économique et augmentation de l'obésité ? Quelles sont les différentes étapes alimentaires à traverser ?

Claude Fischler : La transition économique est synonyme de croissance, d’urbanisation. Depuis l’après-guerre les économistes, les nutritionnistes, les agronomes essaient d’établir des lois sur les phénomènes qui s’opèrent lorsque les revenus des populations augmentent.

Dans un premier temps, les économistes observaient une hausse de la consommation de la viande, d’une baisse des produits traditionnels et une diversification de l’alimentation. Plus les populations sont riches, moins la part de votre budget alimentaire est important, car même si on achète des choses plus chers les besoins de base n’évoluent pas : il n’y a que trois repas par jour.

Des nutritionnistes américains ont nommé la transition nutritionnelle qui avait la particularité d’exprimer cette transition en terme de nutriments : protéines, lipides, graisses animales, sucres. Ils ont montrés que ce qui se passe en général c’est que l’alimentation devient plus riche en graisses animales et en sucre et s’appauvrit dans d’autres domaines. Il appelle ça là « western alimentation », c’est-à-dire de plus en plus occidentale. La question est de savoir qu’est-ce que manger à l’occidentale ?

Transition économique et transition nutritionnelle vont ensemble.

Tous les pays qui se développent suivent-ils le même schéma de transition alimentaire ?

Pour des pays comme la Chine ou l’Inde qui ont connu des émergences très rapides, l’évolution est différente notamment à cause de la culture. En Inde, la consommation de viande n’augmente pas tellement car il y a beaucoup de végétariens et de forts enjeux religieux. En France, on voit aussi que cette croissance varie selon les classes sociales, pour résumer les obèses sont majoritaires dans les classes populaires voire pauvres. Contrairement à avant, où les gras étaient les riches, on voit une vraie inversion.

Les économistes résument comme si manger était un fait individuel, or l’acte de manger n’est pas si simple d’où les variations de courbes. Les Français font parti des plus minces, l’obésité à moins augmentée que partout ailleurs. Une enquête examinait notamment l’augmentation moyenne en IMC dans différents pays. Le Japon a connu la même émergence que la Chine et il reste les plus minces de la planète.

Il y a des facteurs qui montrent que la transition nutritionnelle est fortement modulée par des caractéristiques locales de contexte ; les façons culturelles et sociales de traiter l’alimentation. Par exemple les Français ont un rapport très ritualisés à l’alimentation, ils grignotent peu entre les repas, contrairement à d’autres pays où les schémas alimentaires sont très différents et très individualisés.

Il y a des vérités qu’il ne faut pas généralisées, et qu’il faut nuancer. Pour avoir une politique de santé publique efficace il faut comprendre les facteurs locaux des différentes populations : tous les aspects sociaux-culturels qui sont liés à la façon de manger.

Quand un pays a atteint un certain niveau de développement économique, l'obésité se stabilise-t-elle ?

Les premiers signes d’une sorte de stabilisation aux USA se manifestent, maintenant cela reste assez flou. Les disparités entre des pays au niveau de vie et croissance équivalente sont grandes.

Il faut regarder les niveaux d’individualisation du rapport à la nourriture et l’obésité. Les différences entre les pays sur la façon de revendiquer son régime alimentaire. Pour certains c’est normal de refuser un repas à cause de son régime particulier alors que pour d’autre c’est considéré comme une faute.

Propos recueillis par Manon Hombourger

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !