Les trois graphiques qui montrent que la reprise n'est malheureusement pas là contrairement à ce qu'en pense François Hollande<!-- --> | Atlantico.fr
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François Hollande s'est montré bien optimiste en affirmant dimanche : "La reprise, elle est là".
François Hollande s'est montré bien optimiste en affirmant dimanche : "La reprise, elle est là".
©Reuters

On n'est pas sorti de l'auberge

Alors que la France traverse l'une des crises les plus longues de son histoire, la déclaration a de quoi surprendre. "La reprise, elle est là", a assuré François Hollande à la télévision, lors de la traditionnelle interview présidentielle du 14 juillet.

Mathieu  Mucherie

Mathieu Mucherie

Mathieu Mucherie est économiste de marché à Paris, et s'exprime ici à titre personnel.

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La reprise qui n’en finit pas d’être devant nous, logique pour une crise qui n’en finit pas d’être derrière nous. Tout va très bien Madame la Marquise ! Mais, à moins de faire preuve d’une indifférence de fer au réel extérieur, il y a quelques codicilles à apporter avant un jugement aussi enthousiaste, comme dans la chanson.

Le président de tous les Français (y compris des statisticiens de l’INSEE ?) se base sur les chiffres de la production industrielle qui seraient meilleurs depuis trois mois. Il a raison, ça va mieux depuis trois mois. Sauf qu’on n’a pratiquement pas avancé depuis un an. C’est ce qui arrive quand on croit possible un redressement productif sans redressement monétaire (en un mot, une dévaluation, après des années de surévaluation de l’euro).

Soyons indulgents avec Hollande car il n’a pas les moyens de déclencher une dévaluation ? Non. La France n’est pas un petit pays. Et elle pourrait trouver des alliés dans ce combat. Juridiquement, la politique de changes n’appartient pas à la BCE et encore moins à la Bundesbank mais à l’Eurogroup, autrement dit aux Etats. Si la moitié du crédit politique de la France était engagé non pour la défense de quelques céréaliers (la PAC) et de quelques artistes subventionnés ("l’exception culturelle") mais pour le bien des dernières capacités productives du pays, jamais l’euro n’aurait moyenné à 1,4 contre le dollar américain depuis 6 ans. Le résultat, on le connait : notre industrie est en dessous du niveau qu’elle avait au moment de l’introduction de l’euro. 

Deusio, le président se veut rassurant sur l’avenir. Pourquoi les économistes sont-ils plus pessimistes que ses conseillers ? Car, en dehors de l’endettement, il n’y a plus de croissance en France depuis l’apparition de l’euro. C’est un fait qui a été dissimulé par la plus fantastique bulle immobilière que nous ayons connus depuis le Moyen Age, et dans une mesure moindre par une débauche de dépenses publiques (Sécu, collectivités). En fait les Français n’ont pas arrêté de consommer comme des brutes, plus que leurs voisins européens et presque autant que les Américains (ces gens incultes qui, chaque année, réalisent deux à trois fois plus de gains de productivité que nous). Le graphique qui suit concerne l’ensemble des ventes au détail (hors alimentation), base 100 en 2000. Plus belle la vie en France.

Ce qui nous conduit naturellement à ce paradoxe dont parlait le président Hollande et qui agite régulièrement les élites parisiennes : pourquoi le peuple Français présente-t-il le plus bas niveau de confiance dans l’avenir de tout le monde développé, et même parfois des niveaux de confiance inférieurs à ceux de pays en guerre civile ? A mon avis, cela s’explique facilement, il suffit de partir de l’hypothèse selon laquelle les Français sont malins (une hypothèse à 180 degrés de celle avancée dimanche par le président). Ils ont tous les défauts possibles, mais ils sont malins. Les Français sont malins, cela signifie qu’ils savent pertinemment qu’ils ont beaucoup tiré sur la corde, qu’ils vont devoir réviser leurs plans de consommation, et que les dettes publiques et privées sont telles qu’un long avenir de servitude fiscale et financière les attend. Un pays en guerre civile peut difficilement tomber plus bas, alors que tout peut tomber en France du fait du boulet de la dette, à commencer par l’immobilier. Les Français sont aussi assez malins pour comprendre que leurs responsables actuels n’ont pas le courage de s’engager dans le seul combat productif, celui de la dévaluation, ou qu’ils se réveilleront quand toute la base productive aura disparu. Alors ils dépriment, ce qui est la meilleure chose à faire en dehors de l’alcool quand on est lucide et quand il n’y a pas d’issue à l’horizon de la prévision. Ils discutent de choses futiles, du sexe des anges, de tout sauf de politique monétaire. Ils regardent monter des cyclistes dopés et ils regardent chuter une économie plombée, pas dupes dans tous les cas. Plus belle la déprime.

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