Vacances en famille, le bonheur... mais combien de temps supporte-t-on vraiment la vie en communauté avec ses proches ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Moment de partage et de repli sur sa sphère privée, les vacances d'été sont l'occasion de se retrouver en famille
Moment de partage et de repli sur sa sphère privée, les vacances d'été sont l'occasion de se retrouver en famille
©REUTERS/Alessandro Bianchi

Famille, je vous hais !

Moment de partage et de repli sur sa sphère privée, les vacances d'été sont l'occasion de se retrouver en famille. Des périodes délicates où la cohésion familiale peut se renforcer mais où les tensions qui rejaillissent ne sont pas rares non plus.

Edith Tartar Goddet

Edith Tartar Goddet

Edith Tartar Goddet est psychosociologue et psychologue clinicienne. Elle est spécialiste de la gestion des adolescents au sein de la structure familiale et de l'adolescence dans le cadre scolaire, ainsi que des dysfonctionnements relationnels toujours dans le cadre scolaire. Elle a notamment collaboré au projet Comment réussir ses vacances ? et est l'auteur, parmi de nombreux ouvrages, de Développer les compétences sociales des adolescents par des ateliers de parole aux Editions Retz. 

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Atlantico : Les grandes vacances débutent ce weekend et nombre de nos concitoyens ont fait le choix de partir avec leur famille, au sens large du terme, pas uniquement nucléaire. Qu’est-ce qui motive en général ce choix ?

Edith Tartar-Goddet : Je crois qu’il y a dans les vacances en famille élargie, avec plusieurs générations ou bien des "collatéraux" (oncles, tantes, cousinage) d’une dimension traditionnelle. C’est un moment de retrouvailles qui, dans un contexte de société qui apparait aux gens de plus en plus incertain, obscur, retrouve une importance grandissante. La famille devient un lieu de ressourcement d’autant plus que dans nos vies "stressées" les rencontres familiales élargies sont assez rares.

Cela permet donc, notamment quand les grands-parents ont une propriété où tout le monde se rejoint, à des membres d’une même famille de se retrouver ensemble, par exemple les petits enfants issus des divers branches. Il n’y a structurellement que les vacances d’été qui permettent cela autant par leur longueur que par la variété des choix à la disposition des familles. Enfin, on peut imaginer qu’il y ait des raisons financières à tout cela, il est bien moins cher de partir en vacances ou d’envoyer ses enfants dans lieu de villégiature où des oncles et tantes ou des grands-parents habitent déjà

Une fois la joie des retrouvailles passée, est-ce en général un catalyseur de psychodrames ou cela renforce-t-il les liens ?

Se retrouver en famille ne veut pas nécessairement dire que tout va bien dans le meilleur des mondes, loin de là. Maintenant, il faut relativiser le problème, les conflits font partie intégrante de la vie en société et des interactions sociales. Or, la famille est une mini société qui est tout à fait enrichissante pour les petits enfants. Ils voient se confronter leurs parents avec des oncles et tantes  ou des grands-parents dans des conflits – affrontement non-violents et sans insultes – et peuvent ainsi se structurer en voyant des manières de vivre différentes de celle qu’imposent leurs parents. Les enfants découvrent donc surtout qu’on peut vivre ensemble sans être d’accord, et ça c’est essentiel.

Quelle est la durée idéale pour que des vacances en famille ne dégénèrent pas ? Au bout de combien de temps ne supportons nous plus nos parents ou nos enfants ?

Ce genre de vacances doit se limiter à des temps courts, une ou deux semaines maximum après quoi les choses peuvent commencer à se tendre, et avec les enfants, et entre adultes. L’idéal quand on a plusieurs semaines de vacances c’est de diversifier les lieux et les gens. On peut partir une semaine du côté maternel et une autre du côté paternel ; ou une semaine en famille élargie et une en famille nucléaire, etc. Il faut que les vacances restent une découverte, plus elles sont variées et plus elles sont enrichissantes.

Le lieu familial est le lieu où l’on dort, où l’on prend ses repas, où l’on fait les choses les plus nécessaires pour résumer, mais il ne faut pas qu’il devienne un huis clos. Il faut aller se faire des copains pour les jeunes, aller diner dehors ou chez des amis, chacun doit pouvoir vivre un petit peu sa vie. La famille entière ne se retrouve donc qu’autour de moments forts comme les repas ou les veillées. Cela permet d’éviter l’enfermement et donc logiquement le fait de ne plus pouvoir supporter les autres.

Quel est le type de vacances le plus adapté à un renforcement de la cohésion familiale ? Tout le monde doit-il faire la même chose ou faut-il au contraire que chacun puisse faire ce qu’il veut ?

Les vacances en famille ne fonctionnent que s’il y a de la liberté mais la maison, le lieu de vie commun ne doit pas devenir un hôtel pour autant. C’est d’ailleurs l’occasion de faire se conjuguer cette liberté avec une responsabilisation des enfants et des adolescents. On peut profiter de ce moment de l’année où on a plus de temps pour leur confier des taches comme du ménage mais aussi la gestion d’un repas. De la liberté donc mais pas de l’isolement.

Si les vacances en famille ne sont pas toujours faciles à supporter quand elles font cohabiter des générations successives, qu’en est-il de leur impact sur les relations petit enfants/grands parents ?

Bien souvent les grands-parents sont loin – et même si certains s’occupent de leurs petits-enfants de manière quasi-quotidienne – les temps de vacances sont importants parce qu’ils ne sont pas inféodés aux activités de la vie quotidienne, les horaires, l’école, le travail. Au contraire, ce sont des moments où l’on vit ensemble, où grands-parents et petits-enfants ont le temps de mieux se connaitre, de découvrir les habitudes de vie respectives.

Au final, existe-t-il une recette miracle pour réussir ses vacances en famille ? 

Comme en toute chose, il n'existe pas de solution miracle mais il existe des conditions optimales à mettre en place. La principale notion qui doit être introduite dans les vacances en famille est la souplesse. Et chacun doit en faire preuve, les parents, les enfants, les grands-parents. Chaque membre de la famille doit être capable de faire des compromis afin que chacun puisse se satisfaire de ses vacances. L'une des erreurs traditionnelles consiste à penser que les vacances doivent être planifiées sans le point de vue des enfants. En réalité, dès l'âge de cinq ans, un enfant exprime des désirs précis qui, si bien sûr ne correspondent pas au choix d'une destination ou autre, doivent être pris en compte afin que tout le monde passe de bonnes vacances. La vie d'un enfant, aussi insouciante qu'elle puisse paraitre à des parents qui travaillent et sont stressés, est elle aussi soumise à la pression et au stress. Les enfants ont besoin de se détendre, s'amuser et se vider la tête comme tout le monde. 

Les vacances idéales prennent donc la forme d'un équilibre entre liberté de chacun et cohésion familiale dans lequel chaque génération essaie de faire ce qui lui plait tout en soulageant une autre génération de ce qui lui pèse dans la vie normale. Les parents font les petites choses dans la maison que les grands-parents ne peuvent plus faire (un peu de bricolage le plus souvent) et ces derniers s'occupent des enfants. Enfants auxquels peuvent être confiées certaines taches en fonction de leur âge (jardinage, animaux, bricolage, repas). Une fois encore, ce système d'entraide et de vie en communauté est extrêmement formateur et enrichissant pour les enfants et les adolescents qui y apprennent les bases de la diversité des modes de vie, des opinions ainsi que la responsabilisation de chacun et son dû envers la communauté. Il ne faut pas oublier que la famille est la première des sociétés dans laquelle nous évoluons. 

Propos recueillis par Jean-Baptiste Bonaventure

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