Comment l’Etat triche avec le déficit public<!-- --> | Atlantico.fr
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L'Etat crée une fiscalité parallèle qui échappe au régime ordinaire.
L'Etat crée une fiscalité parallèle qui échappe au régime ordinaire.
©Reuters

Editorial

Au lieu de tenir les objectifs affichés de maîtrise des dépenses publiques, l'Etat contourne les contraintes budgétaires en modifiant certains systèmes de financement.

Michel Garibal

Michel Garibal

Michel Garibal , journaliste, a fait une grande partie de sa carrière à la radio, sur France Inter, et dans la presse écrite, aux Échos et au Figaro Magazine.

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On le claironne haut et fort. La France va vivre un moment historique. Pour la première fois, l’Etat va maîtriser son train de vie, en ne dépensant pas plus qu’il ne gagne. Un petit milliard donnerait ainsi au budget un aspect positif, face à un déficit qui était la règle depuis des lustres. Sauf que ce chiffre est en trompe l’œil, car l’imagination sans limites des grands argentiers de la République a mis au point des moyens et des méthodes qui permettent de présenter des comptes qui ne correspondent pas à la réalité.

Une fois de plus, c’est la Cour des comptes qui met les pieds dans le plat. Le Conseil des Prélèvements obligatoires, un organisme technique qui lui est rattaché, décrit le tour de passe-passe opéré par l’Etat pour modifier la réalité et se donner l’allure d’un bon gestionnaire. L’objectif est clair : "il s’agit de contourner les contraintes budgétaires", souligne le rapport, en modifiant certains systèmes de financement. En clair, pour tenir les objectifs affichés de maîtrise des dépenses publiques, on transfère directement des missions à certains organismes qui les assurent grâce à des ressources obtenues par des taxes spéciales, qui prennent la place des dotations classiques. Celles-ci ont des affectations très variées et prennent la forme d’impositions en apparence très modestes sous la forme d’un prélèvement de quelques fractions d’euro, mais qui montent ensuite en régime. Elles se dissimulent dans une enveloppe dont le contribuable ne perçoit pas tous les détails, mais qui n’en  représentent pas moins une imposition  qui grossit au fil des ans. En clair, on crée une fiscalité parallèle qui échappe au régime ordinaire. C’est ce qu’on appelle la débudgétisation. Ainsi, selon la Cour des comptes, 214 taxes nouvelles ont été affectées à 453 organismes en 2013 pour une somme de 28 milliards d’euros. Et un nouveau bond en avant se prépare pour l’an  prochain avec une progression de l’ordre de 25% des sommes affectées. La Cour des comptes vise certains organismes très gourmands comme l’agence pour la maîtrise de l’énergie, les Chambres de commerce et d’industrie ou encore le Centre national du cinéma et les dispositifs de solidarité nationale. Et elle préconise de réintégrer dans le prochain budget trente-trois de ces taxes, en mettant un plafond sur les autres, afin de porter un coup d’arrêt au rythme  d’augmentation de ces dépenses qui progressent de 4,5 % par an depuis 2007, contre 1,3% pour le budget officiel. Car le système actuel est particulièrement pernicieux. Il permet de contourner l’effet des coups de rabot. Il représente un encouragement sournois à la dépense dans un pays qui est déjà drogué à la manne publique et où la volonté de guérir le malade continue de faire défaut.

On peut douter que le gouvernement suivra les préconisations de la Cour des comptes, car elles feraient apparaître le caractère tragique d’un déficit qui évolue déjà au rythme de 4% du produit intérieur brut. Mais un signal positif de l’Etat aurait pourtant été le bienvenu pour endiguer une autre source de déficit, engendré par les collectivités locales dont l’ardeur dépensière ne connaît pas de limites alors que va s’ouvrir la campagne électorale pour le  renouvellement des conseils municipaux.

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