François Hollande vire sèchement Delphine Batho du gouvernement... mais sans rassurer sur son autorité ou sa capacité à trancher <!-- --> | Atlantico.fr
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Après avoir qualifié le budget de l’Environnement ( -en baisse de 7%) de « mauvais », Delphine Batho a été virée du gouvernement.
Après avoir qualifié le budget de l’Environnement ( -en baisse de 7%) de « mauvais », Delphine Batho a été virée du gouvernement.
©Reuters

Bye bye

Delphine Batho a été évincée de son poste de ministre de l'Ecologie hier mardi, après avoir avoir critiqué les choix budgétaires du gouvernement.

Anita Hausser

Anita Hausser

Anita Hausser, journaliste, est éditorialiste à Atlantico, et offre à ses lecteurs un décryptage des coulisses de la politique française et internationale. Elle a notamment publié Sarkozy, itinéraire d'une ambition (Editions l'Archipel, 2003). Elle a également réalisé les documentaires Femme députée, un homme comme les autres ? (2014) et Bruno Le Maire, l'Affranchi (2015). 

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Elle a critiqué et ne s’est pas ravisée. Après avoir qualifié le budget de l’environnement (en baisse de 7%) de "mauvais", Delphine Batho a été virée du gouvernement. On ne lui a pas demandé de démissionner : François Hollande "a mis fin à ses fonctions sur proposition du Premier ministre", et a aussitôt nommé le député PS du Gers Philippe Martin pour la remplacer. Le président de la République mettait ainsi à exécution la menace qu’il avait formulée dans Paris-Match en mai dernier, en déclarant que "personne n’est protégé dans le gouvernement, personne n’a d’immunité". Les Verts se sont étranglés de fureur, ont convoqué une réunion de crise, se sont faits un brin menaçants :"Nous attendons du Président et du Premier ministre des engagements clairs et des actes pour que l'écologie soit définitivement prise en compte dès le budget 2014", a notamment déclaré le secrétaire National Pascal Duran. C’est "la crise la plus grave depuis que les écologistes sont entrés au gouvernement", renchérissait François de Rugy. Mais,  en dépit de cette gravité, les Verts restent au gouvernement (pour l’instant).

Ainsi, le président de la République a mis sa menace à exécution ; on ne pourra pas (plus ?) lui reprocher d’avoir tergiversé, d’avoir laissé ce conflit budgétaire se détériorer alors que la France est contrainte de faire des choix drastiques, mais… François Hollande a fait acte d’autorité à peu de frais. A tellement bon prix que le bénéfice qu’il pourrait tirer de cette célérité disparait sous l’avalanche de railleries et de critiques émanant de l’opposition, des Verts et des Socialistes eux-mêmes. Devant micros et caméras, ceux qui ont bien voulu monter au créneau ont expliqué que la solidarité gouvernementale exige qu’un ministre défende son budget, fut-il en baisse, car "c’est l’acte fondateur de l’action gouvernementale". Manifester sa satisfaction face à cet arbitrage semblait  particulièrement difficile pour Delphine Batho, surtout quand on se souvient des grandes déclarations de François Hollande sur la transition énergétique pendant la campagne électorale.

La ministre de l’Ecologie aurait peut-être sauvé sa peau en revenant sur ses propos, en s’excusant en somme de les avoir tenus. Mais celle à qui on reprochait sa "pâleur", voire son inexistence ministérielle, ne s’est pas déjugée. Elle ne s’est pas appliquée le théorème de Jean-Pierre Chevènement, selon lequel "un ministre, ça ferme sa gueule ou ça démissionne". Delphine Batho a donc été démissionné derechef. "Une décision inévitable", plaidaient les socialistes devant les micros et les caméras ; "c’est la première fois que le souci de cohérence est marqué si fortement", osait même l’un d’eux. Seul Malek Boutih, proche de la déchue, a osé déclarer que la décision avait été "plus rapide que pour un menteur ou pour un voleur", allusion à Jérôme Cahuzac dont le débarquement du gouvernement a trop tardé aux yeux de nombreux socialistes.

Mais, une fois les micros éteints, on a entendu une autre chanson : les plus modérés parlent d’ un "très mauvais signal" adressé aux Français à propos des questions environnementales. Et les autres évoquent carrément "une connerie", même s’ils reconnaissent que Philippe Martin a la fibre écologique. Il a notamment fait du département du Gers, dont il préside le Conseil Général, un "département sans OGM". Mais voilà, le problème est ailleurs : "il était plus facile de s’en prendre à Delphine Batho qui est une fille timide qu’à Montebourg ; elle est la lampiste", relevait un député désolé. Les oreilles d’Arnaud Montebourg ont dû beaucoup siffler depuis cette annonce. Son nom est dans toutes les têtes ; ses déclarations font hurler la droite et ses camarades, mais Arnaud Montebourg fait figure d’intouchable en raison de son poids au sein du PS et de la sensibilité eurosceptique qu’il incarne. Et ça, à la veille d’une campagne européenne qui ne s’annonce pas sous les meilleurs auspices, c’est rudement plus utile que des élus Verts qui réclament "une véritable fiscalité écologique", avec notamment l’augmentation du prix du diesel.

Alors, quelle sera la future politique du gouvernement en matière d’environnement ? Sera-t-elle marquée par des "avancées plus fortes", comme le réclament les élus de la majorité, sans qu’ils précisent s’il s’agit d’un pas de plus vers la fermeture de la centrale nucléaire de Fessenheim ou d’un assouplissement de la recherche pour le  gaz et les huiles de schistes ? Va-t-elle générer une nouvelle économie verte, créatrice d’emplois ou simplement de nouvelles  taxes ? On aimerait bien savoir si François Hollande, au fond, ne pense pas tout bas ce que son prédécesseur avait déclaré un jour tout haut, à savoir que "l’écologie, ça commence à bien faire".

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