Ces raisons qui poussent les retraités à reprendre un emploi

Atlantico : Le critère économique est-il le seul qui encourage les retraités à retrouver un emploi ? Quelles peuvent être leurs autres motivations ?

François Humbert : Oui dans une grande partie des cas le facteur financier prévaut. Car nombreux sont les retraités obligés de travailler pour combler leur faible pension de retraite. Il existe néanmoins d’autres facteurs qui rentrent en compte.

De nombreux retraités conservent une activité professionnelle pour s’occuper intellectuellement et même les retraités qui bénéficient d’une pension de retraite confortable. Ils n’arrivent pas à concevoir leur retraite de manière inactive.

Enfin j’observe également qu’un certain nombre d’entre eux souhaitent  être et se sentir "utile".

Les actifs en fin de carrière ont-ils tendance à se faire une idée fausse de la retraite, à l'idéaliser ?

Effectivement, les retraités actuels sont "sauvés" mais en ce qui concerne les quinquagénaires actifs, futur retraités, il est vrai qu’ils se font une fausse idée de ce qui va leur arriver. Il est clair que pour l’heure leurs retraites ne sont pas financées. Peu d’entre eux ont anticipé les choses et épargné durant leur carrière. Ils idéalisent leur retraite dans le sens où les actifs en fin de carrière imaginent avoir une retraite agréable et confortable ce qui est de moins en moins le cas aujourd’hui pour une grande partie des retraités. Néanmoins  cette vision de la retraite paisible et confortable se dissipe de plus en plus car les débats consécutifs sur les réformes des retraites ont fait prendre conscience des difficultés qui se dessinent pour eux à l’heure de la retraite.

S'agit-il d'un phénomène récent ? Si oui, pour quelles raisons ? Quel a pu par ailleurs être l’impact de l’assouplissement du cumul emploi-retraite en 2009 ?

Ce phénomène est récent en ce qui concerne la France. Il existe beaucoup de raisons. Il est incontestable que la crise y est pour quelque chose. Les retraités se rendent compte que leur taux de retraite ne sont pas ceux qu’ils envisageaient. D'une manière globale les besoins financiers des retraités augmentent. On peut citer le coût de la vie qui grimpe : les factures d’énergie, les assurances, les prix de l’immobilier…Au bout d’un moment les budgets des retraités ne suffisent plus. Ces derniers cherchent donc à améliorer leur quotidien et la solution est reprendre un emploi. Dans le passé les retraités n’avaient pas ces problèmes.

De plus l’espérance de vie augmentant, les "jeunes" retraités sont encore tout à fait apte à poursuivre une activité professionnelle. Personnellement j’ai fait un bilan de retraite et lorsque je vois la pension dont je bénéficierai je me pose de sérieuse questions.

L’assouplissement du cumul emploi-retraite est une bonne mesure, qui va dans le sens des retraités mais son influence est, à mes yeux, peu perceptible et n’a pas créer d’élan pour décider les retraités à poursuivre leur carrière.

Qu’en est-il des retraités dans les pays européens ? Et dans les autres pays développés ?

Je travaille avec beaucoup de pays européens en particulier des pays d’Europe du Nord comme la Suède ou la Finlande qui cherchent à employer des retraités. Ils recherchent des profils de personnes compétentes et stables. Des retraités de 62, 64 ans n’ont aucun problème pour trouver un emploi et même pour des postes avec des salaires de base. Cela ne pose aucun problème. En France à partir de 55 ans les seniors sont mis "au placard". C’est un problème de culture.