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Le pape est mort : chronique de l'autopsie de Jean-Paul Ier
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Bonnes feuilles

La mort du pape Albino Luciani fut-elle naturelle ? Certainement pas, affirme David Yallop. Extrait de "Le Pape doit mourir : Enquête sur la mort suspecte de Jean-Paul Ier" (2/2).

David Yallop

David Yallop

David Yallop est un journaliste d'investigation mondialement réputé. Les différentes versions de ce best-seller, In God’s Name, se sont venues à plus de 6 millions d’exemplaires à ce jour.

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Comment et pourquoi un rideau de ténèbres tomba-t-il sur l’Église catholique le 28 septembre 1978?

Le «pourquoi» a déjà été établi. Il y avait pléthore de mobiles. Le «comment» offrait aussi un nombre inquiétant de possibilités. Si Albino Luciani a été assassiné pour l’une des raisons déjà examinées, quelques constatations s’imposent.

1. Le meurtre devait être exécuté à la dérobée. Pour que se perpétue cet état de corruption qui existait avant l’élection de Luciani, il fallait que l’acte meurtrier reste caché. On ne pouvait tuer le pape de façon spectaculaire en lui tirant dessus en plein milieu de la place Saint-Pierre. Aucune attaque publique car elle donnerait inévitablement naissance à toute une enquête pour découvrir pourquoi on avait éliminé cet homme tranquille et saint. La mort subite devait être obtenue de telle sorte que soient réduites au minimum les questions du public et l’inquiétude soulevée.

2. La manière la plus efficace pour tuer le pape était le poison. Un poison qui, une fois administré, ne laisserait aucune trace externe. Mes recherches montrent qu’il existe plus de deux cents substances de cette nature qui permettent de mener à bien cette tâche. La digitaline en est une parmi ce grand nombre. Elle n’a pas de goût. Pas d’odeur. On peut l’ajouter à la nourriture, à la boisson ou à d’autres substances médicamenteuses sans que la victime nourrisse le moindre soupçon sur le fait qu’elle absorbe une dose fatale.

3. Quels que soient celui ou ceux qui projetaient de tuer le pape de cette manière, ils devaient avoir une connaissance précise, de l’intérieur, des procédures et habitudes du Vatican.

Il fallait qu’ils sachent que quelles que soient les traces qui pourraient demeurer après leur geste, il n’y aurait pas d’autopsie. À partir du moment où ils étaient assurés de ce seul fait, n’importe laquelle de ces deux cents substances pouvait être utilisée. Une substance comme la digitaline tuerait de telle manière qu’après un examen externe du corps les médecins du Vatican concluraient que la mort était due à une attaque cardiaque. Les conjurés devaient savoir qu’il n’y avait rien dans le droit canon ni dans les règles de l’Église qui commandait qu’on procède à une autopsie. En outre, ils devaient savoir que même si des soupçons naissaient au plus haut niveau au Vatican, il serait presque assuré que les fonctionnaires et les médecins du Vatican se contenteraient d’un examen élémentaire du corps. Si l’on administrait effectivement un poison comme la digitaline à un Luciani sans défense vers la fin de la soirée, on avait la certitude virtuelle que le pape se retirerait dans sa chambre pour la nuit. Il irait se coucher et tomberait dans son dernier sommeil. La mort surviendrait entre deux et six heures après l’absorption de la dose fatale. Le pape gardait à côté de son lit, sur sa table de nuit tout près de son vieux réveil, un flacon d’Effortil, médicament liquide qu’il prenait depuis quelques années pour soulager sa faible tension. Une dose fatale de digitaline, une demi-cuillère à café, serait indécelable une fois mélangée au médicament.

Les seuls autres médicaments que prenait le pape étaient des vitamines en pilules trois fois par jour à l’heure des repas et une série de piqûres pour le cortex surrénal, pour stimuler les glandes qui sécrètent l’adrénaline. Là aussi, il s’agissait d’agir sur la faible tension. Ces séries d’injections étaient faites deux fois l’an, au printemps et en automne. Le médicament utilisé variait, l’un d’eux étant souvent le Cortiplex. Soeur Vincenza pratiquait les injections. Luciani subissait une série de ces piqûres pendant son pontificat, ce qui explique la présence de Vincenza dans les appartements pontificaux. On aurait facilement pu trafiquer les substances à injecter, tout comme l’Effortil sur la table de chevet. On ne prenait aucune précaution particulière pour ranger ces médicaments. Pour quelqu’un songeant à tuer, leur accès n’aurait posé aucune difficulté. En fait, comme nous le démontrerons, l’accès à n’importe quel endroit des appartements pontificaux ne présentait aucun problème à quelqu’un décidé à mettre fin à la vie d’Albino Luciani.

Extrait "Le Pape doit mourir : Enquête sur la mort suspecte de Jean-Paul Ier", de David Yallop (Nouveau monde éditions), 2013. Pour acheter ce livre, cliquez ici.

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