Votre enfant vous colle ? Comment faire pour qu’il vous lâche les baskets

Le parentage ludique propose une autre approche de la dépendance excessive : inverser les rôles et coller à votre enfant comme si votre vie à vous en dépendait. Les enfants collants ont l’habitude qu’on les rembarre, ce qu’ils appréhendent. Il se peut que leur attitude nous fasse plaisir, au départ, mais nous finissons par nous en lasser, en général avant eux. Du coup, une fois approchés ils redoutent déjà la séparation à venir, au point, d’ailleurs, qu’ils en oublient de profiter de notre présence. Leur coller aux basques leur permet de décider quand ils nous repousseront ; ce qui les aide à se concentrer sur notre proximité plutôt que sur la séparation prochaine. La méthode porte ses fruits plus tôt qu’on ne pourrait le croire, surtout si nous en rajoutons en prétendant aimer nos enfants au point de ne plus tolérer qu’ils s’éloignent d’un pas. Une inversion des rôles diminuera leur besoin de nous retenir. Ils se détacheront dès lors plus rapidement.

Je m’en suis aperçu par hasard, alors que je me heurtais à des difficultés à l’heure de mettre ma fille au lit. Petite, elle voulait que je m’allonge auprès d’elle jusqu’à ce qu’elle s’endorme. Dès que je me levais, elle se réveillait et réclamait que je reste. Mes nerfs menaçaient de lâcher. Je finis par comprendre que l’anticipation de mon départ l’empêchait de se détendre. J’avais beau attendre une éternité après qu’elle se fut assoupie, elle se réveillait pour me prendre sur le fait, sitôt que je m’éloignais. Je pris le pli de m’en aller plus tôt, avant qu’elle s’endorme pour de bon, sous le prétexte d’enfiler mon pyjama, en lui promettant de revenir. Si elle ne dormait pas encore, ajoutais-je, je m’allongerais auprès d’elle. Sinon, je l’embrasserais et la borderais. Presque toujours, elle s’endormait avant que je quitte la pièce. Les rares fois où elle ne s’était pas encore assoupie à mon retour, il suffisait que je l’embrasse pour qu’elle se tourne sur le côté et sombre dans un paisible sommeil – enfin détendue. Au lieu de guetter la séparation, elle comptait à présent sur mon retour ; ce qui l’autorisait à se détendre et donc à s’assoupir. En y réfléchissant, je me rendis compte que les enfants collants anticipent avec anxiété notre départ, qu’ils redoutent. Alors que, lorsque nous nous accrochons à eux, ce sont eux qui décident quand se détacher de nous.

De nombreux conflits surgissent parce qu’un enfant refuse de faire seul ce dont nous l’estimons pourtant capable (s’habiller, mettre la table sans qu’il faille le houspiller ou terminer ses devoirs). Nous estimons normal qu’il s’en charge, puisque c’est dans ses cordes. Un enfant qui vient de faire un pas vers l’indépendance a cependant besoin de plus et non pas de moins de contact. Il a besoin de compenser son détachement progressif par une proximité accrue, qui consolidera sa confiance en ses aptitudes, de manière à ce qu’il puisse franchir l’étape suivante de son développement. Il est donc nécessaire que l’enfant soumis à des attentes ou des responsabilités croissantes bénéficie d’un temps de jeu prolongé avec les parents.

 Extrait de "Qui veut jouer avec moi" (JC Lattès éditions), 2013. Pour acheter ce livre, cliquez ici.