Comment protéger les écoles des irruptions violentes ?<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
France
Il y a quelques jours, un homme d'une cinquantaine d'années s'est suicidé devant une école.
Il y a quelques jours, un homme d'une cinquantaine d'années s'est suicidé devant une école.
©Charles Platiau / Reuters

Attention danger

Un homme se suicide devant une école, un adolescent menace d'une fusillade dans un lycée... Nos écoles sont-elles trop vulnérables ?

Google et Yahoo, internet

Camille Bedin

Camille Bedin est conseillère départementale des Hauts-de-Seine, canton Nanterre-Suresnes, et secrétaire nationale, membre du bureau exécutif des Républicains.

Voir la bio »

Atlantico : Il y a quelques jours, un homme d'une cinquantaine d'années s'est suicidé devant une école dans le 7e arrondissement de Paris. Cet événement soulève la problématique de la sécurité aux abords des écoles. Quels sont les dispositifs misent en place pour assurer la sécurité des écoles ? Qui est chargé de filtrer les entrées dans les établissements scolaires ?

Camille Bedin : Le drame survenu il y a quelques jours soulève la question de la sécurisation des établissements bien que, attention, ce cas relève d'une situation isolée. Il ne faut pas généraliser une telle situation. 
Les problèmes de sécurité à l'Ecole sont d'ordre plus général. Les faits récents qui doivent nous alerter sur la gravité de la violence à l'école sont : la hausse de la délinquance juvénile, les menaces à l'égard des professeurs et de tout ce qui ressemble à de l'autorité, des violences entre élèves, de la multiplication des phénomènes de bandes, etc... 

L'école n'est plus un sanctuaire, loin de là, elle fait écho et démultiplie ce qui se passe à l'extérieur (dans les familles, dans les "ghettos" urbains, etc...). Face à ce phénomène, il existe deux vecteurs principaux de sécurité: le premier est le plus traditionnel. Il s'agit du respect général de la discipline et de l'autorité, trop souvent oubliés. Le rôle du chef d'établissement est, à cet égard, essentiel. Le second est relativement récent: il s'agit des mesures préventives et de police qui ont été prises et qui peuvent être renforcées (équipes de policiers et de gendarmes qui peuvent intervenir, responsabilisation des parents, etc...).

Ces dispositifs sont-ils suffisants et efficaces ? Quels sont les points à renforcer ?

Nicolas Sarkozy avait brisé un tabou lorsqu'il avait parlé de faire entrer la police dans les établissements et, oui, il est indispensable d'avoir recours à ce genre de dispositif. Cela peut passer par la police nationale, la gendarmerie, ou la police municipale, mais aussi par les médiateurs, les psychologues ou les associations. La supervision des écoles et des alentours par la vidéoprotection est également nécessaire. Cependant, je vois deux points qu'il est urgent de renforcer :

- le premier concerne le pouvoir disciplinaire des chefs d'établissement : ils doivent pouvoir faire davantage de conseils de discipline et de renvois lorsque c'est nécessaire. Or aujourd'hui, cela n'arrive pas pour deux raisons : d'abord, les chefs d'établissement ne sont pas incités à sévir. En un mot, moins ils sévissent et mieux ils sont notés par leur hiérarchie (c'est l'omerta et la culture du silence qu'il faut briser). La deuxième raison est qu'il n'existe pas réellement de solution alternative pour l'élève. Par exemple, dans le 93, il existe l'équivalent d'un collège entier d'élèves qui va d'un établissement à l'autre, enchaînant les renvois et continuant de perturber la vie de l'établissement, peu importe celui dans lequel il se trouve. Il faut créer des établissements de réinsertion scolaire ou des internats disciplinaires. Ségolène Royal allait plus loin avec ses internats militaires : tout en exagérant, à son habitude, elle n'avait pas vraiment tord sur le principe ! 

- le second point à renforcer (et le Gouvernement fait exactement l'inverse!) c'est la responsabilisation des parents. L'Ecole ne peut être responsable de tout ! Les dispositifs tels que la loi Ciotti de responsabilisation des parents d'élèves absentéistes doivent être renforcés, et non supprimés ! Les familles doivent payer les conséquences des actes des enfants : par exemple, elles doivent rembourser les dégradations commises ! C'est la politique du carreau cassé : on ne lâche rien, du plus petit délit repéré et signalé au plus important. 

Est-il envisageable, comme aux Etats-Unis, d'installer des portiques de sécurité dans les écoles françaises ? Pourquoi ?

Je ne suis pas contre, par principe. Au contraire, s'ils peuvent être efficaces, pourquoi se l'interdire? Ils peuvent être installés de façon ponctuelle, en fonction des écoles et des situations. Par contre, ils ne sont qu'un des outils de la sécurisation. Ils doivent s'accompagner de pédagogie (expliquer aux élèves pourquoi) et, surtout, de la présence des adultes. 
Là où les adultes désertent, les jeunes prennent le pouvoir. Un portique ne remplacera jamais l'autorité d'un chef d'établissement, des parents ou d'une équipe enseignante.

Ce fait divers interroge également sur la place que doit occuper l’école dans la société. Celle-ci doit-elle s’ouvrir d’avantage ou au contraire redevenir un sanctuaire ?  

L'Ecole-sanctuaire est un mythe. Ce n'est pas elle qui m'intéresse. Ce qui m'intéresse, c'est l'Ecole de la République : apprendre à nouveau aux élèves à vivre ensemble et à respecter les règles qui nous permettent de vivre en harmonie.Pour cela, il faut que l'Ecole retrouve son sens : transmettre un savoir qui permet à tous de s'en sortir en fonction de son mérite. Sans cela, les jeunes ne savent même plus pourquoi ils vont à l'école. Il faut aussi que les règles soient respectées. Mais pour cela, l'Ecole ne doit pas être fermée au reste du monde, elle doit au contraire devenir une vie en communauté, associant les élèves, les enseignants, les parents, les associations, les entreprises,... autour d'un projet commun. C'est pour cela que je crois dans l'autonomie des établissements : chaque établissement doit vivre et agir autour de valeurs et d'un projet commun. C'est en apprenant à vivre au sein de cette micro-société que les élèves apprennent à vivre dans la société en général.

Le modèle français est largement basé sur la confiance, ce modèle est-il encore possible aujourd'hui ? 

La confiance est formidable, lorsqu'elle est associée à la responsabilité. Or, aujourd'hui, tout le monde se décharge de ses responsabilités : parents et enseignants, notamment, et expliquent sans arrêt que "c'est toujours de la faute des autres". Il est temps que chacun apprenne à travailler avec les autres et à respecter les autres. C'est le sens de l'autonomie de l'établissement autour d'un projet commun que choisissent les parents et les enseignants pour les enfants. C'est cela, la confiance.

Propos recueillis par Manon Hombourger


En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !