Comment Warren Buffett est devenu une super star (et comment les patrons français pourraient s'en inspirer)<!-- --> | Atlantico.fr
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Warren Buffet investit généralement pour devenir un actionnaire-propriétaire.
Warren Buffet investit généralement pour devenir un actionnaire-propriétaire.
©Reuters

Idéal

Warren Buffett, 82 ans, vient de lancer son compte Twitter qui a attiré 267 000 abonnés en moins de vingt heures. Pourquoi la quatrième fortune mondiale, à l'aspect austère et au comportement patriarcal, fascine-t-elle autant ?

Didier  Coutton

Didier Coutton

Didier Coutton est docteur en Sciences de gestion. Il a traduit en français le livre de Warren Buffet Les écrits de Warren Buffet : les seuls conseils donnés par Warren Buffet aux investisseurs et aux managers chez Valor

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Atlantico : Soi-disant parti de rien et ayant bâti son empire, Warren Buffettt est-il l'authentique self made man que l'on aime à dépeindre ? Ou bien l'histoire de sa fortune est-elle plus compliquée que ce tableau idyllique laisse penser ?

Didier Coutton : Warren Buffettt est issu d’une famille bourgeoise, sans être riche. Son père, avant de connaître une courte carrière politique en tant que représentant au Congrès, fut courtier en bourse, ce qui lui donna sans doute le goût pour l’investissement. C’est probablement dans l’épicerie tenue par des membres de sa famille ou dans les petits boulots (vendeur de journaux ou loueur de flippers) qu’il a acquis le sens du commerce. C’est en vivant depuis toujours sur les terres agricoles du centre des Etats-Unis qu’il a su rester les pieds sur terre et conserver un bon sens "paysan". Ses parents ne l’ont pas vraiment aidé financièrement et il a bâti sa fortune tout seul, en commençant à investir… à 12 ans.

Pourquoi Warren Buffettt, au-delà de son statut de quatrième homme le plus riche du monde, fascine-t-il tant les observateurs économiques et le grand public en général ? Quel est le secret du "buzz" qu'il entretient ?

Si Warren Buffettt est aujourd’hui adulé – on peut le dire d’une personne qui sait remplir un stade de 70 000 places pendant 8 heures pour l’assemblée générale de sa société – cela n’a pas toujours été le cas. En effet, à la fin des années 1990 et pendant la bulle Internet, alors que les marchés financiers bondissaient de records en records, sa société holding – Berkshire Hathaway – composée de filiales et de participations dans des sociétés de l’ancienne économie patinait. Inutile de dire que Warren Buffett était la risée des partisans de la "nouvelle économie" ! Depuis, il a su montrer que les principes financiers qu’il utilise depuis plus de 60 ans sont toujours d’actualité. Il est admiré, car il se tient à des principes que ses homologues, avides de succès rapides, ne savent pas pratiquer sur la durée. Il est à l’image d’une personne svelte et sportive, qui prend quotidiennement soin de son corps, face aux adeptes des régimes minceur, désireux d’un résultat rapide, mais qui ne dure pas.

Sa sagesse et ses mots d’humour font fureur et il a aujourd’hui partagé tous les secrets de sa réussite. Le premier est que pour s’enrichir, il suffit de ne pas s’appauvrir, autrement dit, il ne faut pas chercher à faire un "coup", il vaut mieux "gagner petit", mais souvent. Le second est qu’il faut être patient et considérer  le temps comme le meilleur ami de l’investisseur.

Le milliardaire s'est spécialisé depuis longtemps dans l'acquisition d'entreprises à la rentabilité sur le long terme, en n'hésitant pas à revenir vers l'industrie quant tout le monde ne jure que sur la finance (rachat de Heinz par exemple), et vit lui même de manière austère, du moins à l'échelle d'un milliardaire. Cette attitude "à l'ancienne" est-elle le secret de sa réussite ? Fait-elle des émules aux États-Unis ou ailleurs dans le monde ?

A la différence d’un financier, Warren Buffett est d’abord un entrepreneur et un dirigeant d’entreprise. L’un de ses plus gros échec a d’ailleurs été la reprise d’une société textile (Berkshire) qu’il a dû liquider la mort dans l’âme. Il pratique, ce que l’on appellerait en France un capitalisme familial. Il investit pour devenir un actionnaire-propriétaire, le plus souvent impliqué dans la gestion, et non un actionnaire-colocataire, comme le sont la plupart des fonds d’investissement. Comme il le dit, il n’achète pas du papier (une action), mais une entreprise (des murs, un savoir-faire,…). Sa stratégie d’investissement et d’acquisition est à l’opposé de celle des fonds de private equity, qui ont une logique purement financière. Il fait effectivement des émules, dans les conversations de salon, mais certainement pas assez dans la réalité, car s’il prône la patience et la constance, les marchés financiers lui préfèrent la rapidité et la volatilité. Warren Buffett est un austère, pas marrant. La finance est "bling-bling" et fun. Ce sont encore deux visions financières éloignées.

Que peuvent apprendre les patrons français de la réussite d'un Buffett ? Son histoire pourrait elle etre transposable en France, ou bien son parcours est-il trop lié à l'"American dream" pour être transposable dans l'Hexagone ?

A mon avis, l’histoire financière retiendra la richesse, mais aussi la philanthropie de Warren Buffett qui va céder son portefeuille d’actions à la fondation de Bill et Melinda Gates à sa mort. Le monde du management retiendra l’éclairage de Warren Buffett sur la gouvernance des entreprises. Sa clairvoyance managériale pourrait inciter les dirigeants de sociétés par actions à modifier leur organisation, leur principes en vue d’utiliser la finance comme un outil d’allocation des ressources et non comme une fin en soi.

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