Comment expliquer que les salaires français continuent de progresser malgré la crise ? <!-- --> | Atlantico.fr
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Les salaires en France ont constamment progressé depuis le début de la crise.
Les salaires en France ont constamment progressé depuis le début de la crise.
©Reuters

Paradoxe

Le Conseil d'analyse économique vient de publier les résultats d'une étude concernant les salaires en France. Contrairement à ce que l'on pourrait attendre, les salaires français n'ont cessé de progresser malgré la crise.

Gilles Saint-Paul

Gilles Saint-Paul

Gilles Saint-Paul est économiste et professeur à l'université Toulouse I.

Il est l'auteur du rapport du Conseil d'analyse économique (CAE) intitulé Immigration, qualifications et marché du travail sur l'impact économique de l'immigration en 2009.

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Atlantico : Une récente étude du Conseil d'analyse économique révèle que les salaires en France ont constamment progressé depuis le début de la crise. Quels sont les paramètres qui peuvent expliquer cette hausse ?

Gilles Saint-Paul : Ceci dénote que la formation des salaires en France est peu réactive à l'état du marché du travail. En principe, on s'attendrait à ce que la montée du chômage se traduise par de la modération salariale. Or, cet effet semble faible puisque les salaires continuent à progresser. Cela est dû à deux choses. D'une part, les négociations salariales entre syndicats et employeurs reflètent les intérêts de travailleurs typiquement relativement peu exposés au risque de perte d'emploi. Ils ont donc peu d'incitations à modérer leur position lorsque le chômage augmente. D'autre part, les chômeurs de longue durée subissent une perte de qualifications ce qui réduit leur employabilité, et bien souvent l'intensité de leur recherche d'emploi diminue, ce qui réduit la pression à la baisse sur les salaires qu'ils pourraient exercer.

Cette hausse des salaires malgré la crise est-elle propre à la France ? Y-a-t-il d'autres pays concernés en Europe ?

Ce problème de la déconnexion entre formation des salaires et état du marché du travail est typique des pays d'Europe du sud et il est particulièrement saillant en Espagne, ce qui n'est pas étranger à la très forte remontée du chômage qu'a connu ce pays pendant la crise.

Cette hausse des salaires en temps de crise est-elle une bonne ou une mauvaise nouvelle ? Quels peuvent être les risques d'une telle dynamique salariale ?

C'est une mauvaise nouvelle car elle traduit la mauvaise réactivité du marché du travail et son incapacité à absorber des excédents de main d'œuvre. Le risque est une prolongation de la durée de la crise et une reprise anémique et marquée par une décrue du chômage trop lente.

Devrait-on baisser les salaires en France ? Est-ce possible ?

Il est effectivement difficile politiquement de réduire les salaires et notamment le Smic, qui est sacralisé. Pourtant, à long-terme, les salaires ne peuvent être différents de la productivité, après déduction des diverses taxes et contributions assises sur le travail. Des politiques qui réduisent la productivité telles que les trente-cinq heures, ou des hausses de prélèvements fiscaux sur les salaires afin de financer un Etat providence trop généreux, se traduisent nécessairement par une baisse de pouvoir d'achat des salariés.

Il est frappant de voir que leurs représentants ne s'opposent pas à de telles politiques alors que par ailleurs ils défendent bec et ongles des rigidités salariales qui créent du chômage, alors qu'à long-terme les premières sont beaucoup plus néfastes pour leur niveau de vie que ne le serait un assouplissement des secondes. 

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