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Ni bandits, ni terroristes : pourquoi des manifestants anti-mariage homosexuel ont-ils été gardés à vue 48h ?
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Douze personnes ont été placées en garde à vue hier mercredi pour "violence" à la suite des incidents après la manifestation parisienne des opposants au mariage homosexuel.

Philippe De Veulle

Philippe De Veulle

Avocat au Barreau de Paris, Philippe de Veulle est diplômé du Centre d'Etudes Diplomatiques et Stratégiques (CEDS) – filière Collège interarmées de défense –, titulaire d'un Master (DEA) en économie et développement de l'Université Paris Descartes et auditeur de la 20ème session de l'Institut National des Hautes Etudes de la Sécurité et de la Justice (INHESJ). Il est également auditeur à la 66 e session nationale de l'IHEDN

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Atlantico : Vous avez, lors des récentes manifestations anti-mariage homosexuel, été le témoin, en tant qu’avocat, d’une garde à vue que vous estimez abusive. Pour quelles raisons ?

Maître Philippe de Veulle : J’ai en effet été désigné par la famille d’un jeune homme de 18 ans et demi pour l’assister dans sa garde à vue. Une garde à vue faisait suite à son interpellation par des CRS alors qu’il quittait la manifestation. Douze personnes étaient ainsi gardées à vue au commissariat d’enquête judiciaire de la rue Riquet dans le XIXème arrondissement de Paris pour les mêmes motifs.Il ne s’agissait pas du tout d’extrémistes avec le crâne rasé. C’était plutôt bon enfant. Certains chantaient et le personnel de police était plutôt bienveillant à leur égard.

Rien à voir en revanche avec la façon dont ils ont été interpellés par les CRS alors même qu’ils étaient pour la plupart en train de quitter la manifestation, qu’ils ne commettaient aucun dégât, aucune dégradation et ne proféraient aucune injure. Les forces de l’ordre ont simplement procédé à du "manifestant picking".

Et alors qu’elle se limite généralement à 24h, la garde à vue de ces personnes a duré 48h. Orgarder à vue plus de 48h des jeunes exprimant une opinion dans le cadre d’une manifestation, n’est pas justifié. Ce type de garde à vue s’applique normalement aux cas de grand banditisme, de terrorisme ou lorsque la vie d’une personne est en danger – nous en étions loin. En tant qu’avocat, je suis surpris de cette disproportion.

Comment alors expliquer que les choses aient pu se dérouler de cette façon ?

On ne peut pas exclure, et là c’est le citoyen et non l’avocat qui parle, qu’il y ait eu des ordres de la part du Parquet, du Préfet, pour garder ces jeunes à vue afin d’exercer sur eux une pression susceptible d’avoir un effet dissuasif auprès des autres. J’estime que nous avons été confrontés à un acte politique plus que judiciaire et c’est proprement scandaleux. Sous Nicolas Sarkozy, ces méthodes d’intimidation des manifestants n’avaient pas cours.

Le gouvernement en place tente de minimiser le nombre de manifestants mais aussi cette vague populaire et familiale qui marque son opposition au mariage pour tous en faisant prolonger des gardes à vues qui sont injustifiées. C’est quand même une privation de liberté fondamentale dont il est question.

Quelles suites pourraient être données à ces gardes à vue ?

Je ne sais pas quelles suites le Parquet entend leur donner. Mais il n’y a pas eu de comparution immédiate et je ne vois pas quelles pourraient être les charges. Nous sommes là bien plus face à des victimes qu’à des accusés.

Je me réserve pour ma part le droit de poursuivre monsieur le Préfet de police de Paris pour abus de droit ou éventuellement violence sur personne. Je ne le ferais néanmoins que si mon client me le demande et avec des éléments matériels probants.

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