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Bien plus fort que "Non, mais allô quoi !" : connaissez-vous l’expression que nous répétons en boucle et qui forge l’image des Français à l’étranger ?
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Cliché

Et si l'image de la France à l'étranger se résumait en trois petits mots ? C'est en tout cas ce qui, hors de nos frontières, identifient immédiatement les Français.

Johanne Akpossan - Confiac

Johanne Akpossan - Confiac

Johanne Akpossan-Confiac est linguiste socio-phonéticienne et enseigne la linguistique depuis 2004 dans les universités parisiennes (Paris 3 et Paris 5). Elle s’intéresse en particulier aux situations de contacts linguistiques et aux variétés du français. Elle est la première à analyser les interjections formées des segments « an » et/ou « han » dans le parler guadeloupéen. Ses résultats ont été publiés dans la revue « Nouveaux Cahiers de Linguistique Française ».

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Atlantico : "Oh là là"... Cette interjection est à l'étranger, notamment dans le monde anglo-saxon, l'un des symboles de la France. Les Français y recourent-ils si souvent ? Quelles sont ses différentes utilisations dans notre langue ?

Johanne Apkossan-Confiac : De manière générale, il faut considérer que les interjections sont très fréquentes en français et qu’elles apparaissent très tôt dans le langage de l’enfant (par imitation de l’adulte). Cela va du « chut ! » que l’adulte dira spontanément au bébé qui babille trop fort dans un lieu public au « aïe !» qu’il pourra entendre ses parents attendris dire quand il tombera alors qu’il essaie de faire ses premiers pas.

L’interjection « oh là là », elle, surviendra dans des contextes variés : tantôt positif, tantôt négatif. Son sens sera véhiculé par la prosodie qu’on lui affectera : une intonation montante (ex : l’émerveillement), ou descendante (ex : la compassion), un débit lent (ex : la déception) ou rapide (ex : la joie), un allongement du dernier « là » (ex : l’agacement), une réduction du groupe « là là » (« oh là » qui rend bien compte du fait que le locuteur se trouve face à une situation qui le laisse coi) ou à l’inverse, une duplication du groupe « là là » (« oh là là là là » qui accroit l’intensité de l’émotion), etc.

Ces exemples montrent combien la richesse prosodique de « oh là là » est importante; ce qui permet d’y recourir dans des situations très différentes.

Dit-on "Oh là là" pour les mêmes raisons dans toutes les langues ? Quelles sont les différentes utilisations de cette interjection à travers les pays ?

Il faut d’abord se souvenir que l’interjection « oh là là » ne se retrouve pas seulement dans le français « standard  métropolitain » mais aussi dans de multiples variétés du français. Par exemple, on peut l’entendre dans une variété stylistique où toutes les voyelles sont postériorisées « ouh lo lo » avec une voix craquée pour s’adresser à un enfant ou avec une voix soufflée quand le locuteur est soucieux.

On a aussi cette interjection dans des variétés régionales du français où « oh là là » a des significations particulières en plus de celles qu’elle partage avec le français « standard métropolitain ». Par exemple, en français régional de la Guadeloupe,  quand « oh » et « là là » sont chacun produit avec un fort allongement cela traduit le dédain du locuteur (accompagné de la mimique adéquate bien sûr !).

On peut aussi trouver l’interjection « oh là là » dans une autre langue romane comme le portugais où la duplication du groupe « là là » est courante et rajoute à l’expressivité.

« Oh là là » peut s’entendre dans d’autres langues mais bien souvent, il ne s’agirait que d’un emprunt au français. C’est ainsi que cette expression aurait même été entendue en hongrois pour signifier « wouah ! c’est incroyable ! ».

En tout cas, il semblerait que « oh là là » revête, dans toutes les langues dans lesquelles il apparait, au moins le sens de « l’émerveillement ». De plus, quelle que soit la langue dans laquelle il est employé, « oh là là » sert à renforcer le sens d’un énoncé et/ou à mieux faire passer ses émotions.

Comment dès lors expliquer qu'elle soit plus facilement associée à la langue française ?

Je ne pourrais pas apporter une réponse catégorique à cette question car pour cela il aurait fallu faire une enquête d’opinion. J’émettrais seulement une hypothèse que je me propose d’illustrer par une comparaison entre la gente féminine et masculine.

Tout le monde dira avec conviction que, dans une relation amoureuse, les « je t’aime » sont le plus souvent dits par les femmes. On associera ainsi plus volontiers les « je t’aime » aux femmes, non pas parce que les hommes ne le disent jamais mais parce qu’ils ont tendance à le dire moins souvent. Ce serait ainsi la fréquence d’utilisation qui expliquerait la fréquence d’association. De la même manière, il faut se rappeler qu’en dehors des frontières de la France hexagonale, se trouvent aux quatre coins du monde de nombreuses communautés francophones (beaucoup plus nombreuses que ne le sont les communautés lusophones – pour reprendre l’exemple précité –) pour lesquelles « oh là là » constitue une routine langagière.


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