Le graphique qui montre que l’Europe ne gagnerait pas grand chose à une baisse de l’euro<!-- --> | Atlantico.fr
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Le cours de l'euro a chuté après que le président de la Bundesbank ait déclaré que les taux d'intérêt de la BCE pourraient baisser.
Le cours de l'euro a chuté après que le président de la Bundesbank ait déclaré que les taux d'intérêt de la BCE pourraient baisser.
©Reuters

Vrai fausse bonne nouvelle ?

Le cours de l'euro a chuté après que le président de la Bundesbank ait déclaré que les taux d'intérêt de la BCE pourraient baisser si le contexte économique le justifiait.

Andrea Tuéni

Andrea Tuéni

Diplômé du Master en Finance de marché de Sup de Co Reims, Andrea Tuéni rejoint Saxo Banque en tant que Sales Trader il y a 2 ans.

Ce spécialiste des devises et matières premières est rapidement devenu un analyste reconnu par les médias financiers de référence (BFM, Reuters, Le Figaro,…) et participe au rayonnement de l’activité du département de Sales Trading de Saxo Banque France.

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Alors que l'Allemagne s'est toujours opposée à une politique monétaire expansionniste de la part de la Banque centrale européenne - comme le fait la Fed, la banque centrale américaine ou, plus récemment le Japon - Jens Weidmann, le très influent président de la Bundesbank qui, par ailleurs, est aussi l'un des membres les plus influents du bureau des gouverneurs de la BCE, s'est déclaré plutôt favorable à une baisse des taux directeurs européens si le contexte économique le justifiait. Si cette annonce pouvait laisser transparaître une évolution de la politique de fermeté allemande apte a rassurer les marchés, le cours de l'euro a pourtant chuté après cette annonce.


Source : Business Insider

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Atlantico : Jens Weidmann, le président de la Bundesbank et membre allemand du bureau des gouverneurs de la Banque centrale allemande, a déclaré que les taux d'intérêt de l'institution de Francfort pourraient baisser si le contexte économique le justifiait. Comment expliquer que ces propos aient entraîné une baisse de l'euro par rapport au dollar ?

Andréa Tuéni : Les propos de Jens Weidmann ont en effet été mal accueillis par les marchés. Malgré d’autres mauvaises nouvelles qui ont circulé sur les marchés avec notamment les rumeurs de dégradation de la note de l’Allemagne ou encore les derniers mauvais chiffres macroéconomiques, ce sont bien les propos inattendus du président de la Bundesbank qui ont fait plier l’euro. Ce dernier a laissé la porte ouverte à une baisse des taux de la BCE dans un avenir plus ou moins proche si la situation économique l’imposait. La baisse de l’euro qui s’en est suivie n’est pas surprenante. La conséquence directe d’une baisse des taux serait une réduction de l’attrait de la monnaie unique. En effet, l’euro dans une logique de carry trade (jouer la différence de taux d’intérêt entre deux devises) deviendrait moins rémunérateur et donc moins attirant. Le différentiel de rémunération entre les taux courts de la BCE et ceux de la Fed (quasi nuls) deviendrait de moins en moins favorable à l’euro.

Par ailleurs, rappelons les propos peu rassurants quant à la situation économique de la zone euro - Jens Weidmann a estimé que la reprise en zone euro prendrait des années - ne contribuent pas à rassurer. Ces déclarations prennent la forme d’une piqure de rappel sur la situation délicate de l’économie européenne. Il convient enfin de rappeler l’importance qu’accordent les marchés aux moindres déclarations de Weidmann. En effet, ce dernier, président de la Bundesbank mais aussi membre du bureau des gouverneurs de la BCE est un poids lourd qui jouit d’une aura importante. Ainsi, ses interventions sont suivies de près et les réactions se font rarement attendre sur les marchés.

Alors que l'Allemagne est le fer de lance de la rigueur budgétaire et a refusé jusqu'à présent tout assouplissement de la politique monétaire menée par la BCE, cette déclaration marque-t-elle une évolution de sa position ?

Le Président Weidmann a précisé qu’une baisse des taux n’aurait aucun impact économique favorable ce qui montre bien qu’il ne défend pas et ne croit pas en cette politique. Il a en revanche appelé les gouvernements à poursuivre leurs réformes structurelles.

Le modèle économique allemand repose sur une monnaie forte et une rigueur financière. Le niveau de compétitivité de l’Allemagne et les réformes structurelles mises en place depuis l’ère Schröder permettent aujourd’hui à l’Allemagne de mieux supporter un euro fort. Il est d’ailleurs la clé de son système de production actuelle. En effet, l’Allemagne importe des produits de base en-dehors de la zone euro (dans les pays de l’Est notamment) pour les transformer et les revendre ensuite sous ses marques, gage de qualité, en zone euro.

Son excédent commercial hors zone euro est très faible d’où un intérêt stratégique à défendre un euro fort. Au regard de ces observations, il semble peu probable de voir l’Allemagne renier son histoire économique et sa stratégie actuelle qui lui confère un avantage de taille.

La Banque du Japon - sous l'impulsion de Haruhiko Kuroda, son nouveau gouverneur - a renforcé sa politique monétaire expansionniste depuis plusieurs semaines afin de relancer l'économie nippone par les exportations et renouer avec un taux d'inflation de l'ordre de 2%. La zone euro peut-elle vraiment sortir de la crise sans changer sa politique monétaire notamment pour affaiblir l'euro ? Quels seraient les effets bénéfiques et, à contrario, les dangers inhérents à une baisse du cours de l'euro.

La politique monétaire actuellement menée par le Japon n’est pas vraiment enviable. Le Japon repousse une nouvelle fois à plus tard la mise en place de réformes structurelles. Le Japon avec une population vieillissante et un besoin important en matières premières doit faire face à une dette représentant plus de 240% du PIBLe Japon n’est donc pas vraiment un modèle pour la zone euro. L’Europe mais aussi les États-Unis ont depuis le début de la crise cherché à gagner du temps et ont repoussé à plu tard les mesures structurelles indispensables aujourd’hui. Les perspectives de croissance ne cessent de diminuer alors que les projections de déficit, quant à elles, augmentent. Les populations font part de leur mécontentement comme par exemple en Italie où le pays est englué dans une impasse politique suite aux dernières élections législatives.

Le débat ne devrait pas être centré sur une guerre des monnaies qui n’aboutira à rien mais sur les réformes à engager pour enrayer la crise. La mise en place de vraies mesures structurelles passe par une acceptation de la situation actuelle. L’injection massive de liquidité n’a pas fait ses preuves jusque-là.

L’euro est certes surévalué et seule l’Allemagne y trouve son compte. Tous les pays de la zone euro bénéficieraient d’un accès de faiblesse de l’euro notamment en termes d’exportations. Un euro plus faible permettrait de compenser une grande partie de la perte de compétitivité des économies européennes. Les défis qui attendent la zone euro avec de nouveaux plans de sauvetage à prévoir après celui de Chypre finiront par faire plier l’euro. Il sera alors peut-être enfin temps de lancer les réformes tant attendues et de plus en plus nécessaires.

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