Peut-on se fier au graphique qui montre que la Chine n’est plus un pays de production low cost ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Plus d'une entreprise européenne sur cinq implantée en Chine envisage de s'en détourner.
Plus d'une entreprise européenne sur cinq implantée en Chine envisage de s'en détourner.
©Reuters

La roue tourne

Les multinationales se détourneraient de plus en plus de la Chine pour installer leurs usines à bas coûts dans de nouveaux eldorados salariaux.

Antoine Brunet

Antoine Brunet

Antoine Brunet est économiste et président d’AB Marchés.

Il est l'auteur de La visée hégémonique de la Chine (avec Jean-Paul Guichard, L’Harmattan, 2011).

 

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Le site d’information économique Business Insider publiait la semaine dernière un tableau du rapport McVey montrant l'évolution des salaires dans les pays d'Asie à bas coûts. On peut observer que le coût du travail chinois augmente de manière beaucoup plus significative que chez ses voisins, il a doublé sur la période 2006-2010.

(c) BusinessInsider.com
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D’après Henry McVey, la  hausse des salaires est un phénomène structurel dû au fait que  la population de jeunes travailleurs âgés de 15-29 ans va diminuer à un rythme moyen de cinq millions par an entre aujourd'hui et 2030, principalement en raison de la seule politique de l'enfant mis en œuvre en 1979.

Atlantico : Quand on sait par ailleurs que plus d'une entreprise européenne sur cinq implantée en Chine envisage de s'en détourner, peut-on déduire de ce graphique, comme le fait le Business Insider, la fin de la main d’œuvre à faible coût en Chine ?

Antoine Brunet : Certes l’écart de compétitivité entre la Chine et les pays occidentaux s’est réduit  mais ce n’est pas ce facteur là qu’il faut mettre en avant pour justifier le désenchantement des multinationales à produire en Chine. Lors de leur implantation en Chine, les multinationales occidentales visaient deux choses : pouvoir produire à bas coûts pour ensuite exporter à des prix normaux sur les marchés occidentaux et conquérir des parts sur le marché intérieur chinois.

On peut expliquer ce désenchantement dans la période récente par les tensions sino-japonaises  et "l’épisode Apple".

A la fin de l’été 2012, lorsque en conséquence des disputes de territoire entre la Chine et le Japon à propos des îlots Senkaku, les autorités chinoises ont lancé des rumeurs sur Internet et sur la télévision d’État disant qu’il serait bon que les Chinois boycottent les produits japonais. Par conséquent, les entreprises japonaises ont vu leur ventes se réduire fortement en Chine. Personne n’imaginant que la Chine pouvait en arriver là. Ce premier épisode sert de leçon aux entreprises occidentales susceptibles de subir le même traitement. Les entreprises japonaises ont aussitôt décidé de réduire leur implantation en Chine préférant les Philippines et l’Asie du Sud.

Le deuxième épisode c’est le scandale Apple. Du jour au lendemain, l’entreprise américaine de téléphonie a subi une campagne de dénigrement sur les chaînes de télévision  chinoises, en particulier CCTV, qui pendant trois semaines ont émis des critiques vives et infondées contre Apple prétextant une différence de qualité du SAV des magasins Apple entre la Chine et l’Occident. Le but étant de porter préjudice à Apple et pour les entreprise chinoises, de reprendre des parts de marchés sur ce secteur. En définitive, le directeur général d’Apple a cédé et a été contraint de réaliser son autocritique de manière très officielle à la télévision nationale chinoise.

Ce contexte nauséabond justifie les réticences des multinationales à s’implanter en Chine. Ces deux épisodes relèvent d’une stratégie établie depuis maintenant un an : reconquérir le marché intérieur chinois au détriment des multinationales étrangères. La croissance chinoise ne doit plus être aussi dépendante des exportations occidentales mais soutenue par les entreprises sino-chinoise.

La classe moyenne chinoise se développe très rapidement, peut-elle atteindre le niveau d’une économie moderne ?

Certes on peut observer une augmentation soutenue de la classe moyenne  chinoise depuis le début des années 2000. Mais il ne faut pas oublier que la classe moyenne chinoise qui représente aujourd’hui 150 millions de personnes sur une population totale de 1,3 milliards est en grande partie membre du PCC et de l’administration de l'État communiste, il n’y a que très peu d'ouvrier communiste en Chine. On espère trop souvent que cette classe moyenne va remettre en cause l’hégémonie du PCC, c’est une funeste erreur car les membres du PCC coïncident largement avec le personnel du PCC.

Quelles sont alors les nouvelles destinations pour produire "low cost" ?

On parle souvent du Bangladesh, du Vietnam et plus largement d’une grande partie des pays du Sud-Est asiatique (Malaisie-Philippines). Parmi ces pays à bas coûts, il faut opérer une distinction car certains d'entre eux, notamment le Bangladesh, et dans une moindre mesure l’Inde, demeurent enclavés et ne bénéficie pas des  infrastructures nécessaires à l’installation de multinationales. Enfin au Brésil, les autorités ouvrent désormais leur marché intérieur aux multinationales uniquement sous réserve d’ouverture d’une chaîne de production.

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