Le pape nomme un nouveau collège de cardinaux : tout sur les coulisses d'une mini-révolution<!-- --> | Atlantico.fr
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Le pape François s'entoure d'un nouveau collège de cardinaux.
Le pape François s'entoure d'un nouveau collège de cardinaux.
©Reuters

Nouvelle ère

Un mois après son élection, le pape François a annoncé la formation d'un conseil de huit cardinaux chargés de le conseiller pour gouverner et réformer l'administration centrale de l'Eglise. Son objectif ? En finir avec la cour papale et le centralisme romain.

Nicolas Diat

Nicolas Diat

Nicolas Diat est considéré comme un des meilleurs spécialistes du Vatican. 
 
"Un temps pour mourir" de Nicolas Diat
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Le pape François a constitué  samedi 13 avril un groupe de huit cardinaux de tous les continents pour rénover le gouvernement de l'Eglise. Quel sens donner à la création de ce collège de cardinaux ?

Tout d’abord  ce collège est la conséquence des discussions que les cardinaux avaient eues ensemble pendant les congrégations générales qui précédaient le conclave. C’est pendant ces jours de débats que des cardinaux très divers et de tendances multiples avaient exprimés l’idée que la charge pontificale étant très lourde et les cardinaux résidentiels peu présents à Rome, il pourrait être fructueux de créer une sorte de conseil autour du pape. Les discussions qui précédaient l’entrée en conclave fermé étaient revenues à plusieurs reprises sur cette idée que l’Eglise et le pape pourrait trouver un vrai profit à prendre conseil en amont des grandes décisions avec des cardinaux aux compétences et aux expériences différentes. A certains égards, c’est la définition même de la collégialité. Un mois  jour pour jour après l’élection, la secrétairerie d’Etat a donc rendu publique samedi dernier la création d’un organe de consultation qui permettra au pape de s’appuyer sur un collège de 8 cardinaux qui lui prodigueront des conseils. Le pape à d’ores et déjà donné une feuille de route à ces cardinaux. Ils se réuniront pour la première fois du 1 au 3 octobre pour commencer une réflexion sur la réforme de la Constitution apostolique Pastor Bonus promulguée par Jean Paul II en 1988 et qui régit l’organisation de la curie romaine. Il s’agit donc bien d’une première réforme de la curie c’est-à-dire d’une réforme du gouvernement de l’Eglise. La structuration de ce conseil de « huit sages » est extrêmement précise, c’est une forme de petite révolution puisque jamais aucun pape n’a eu, n’y même voulu, une telle structure.

Qui sont ces huit cardinaux et que sait-on du cardinal Maradiaga qui dirige ce collège spécial?

Il n’y a qu’un seul cardinal italien, le cardinal de curie Giuseppe Bertello, qui préside le Gouvernatorat, soit l’entité qui régit non pas le Saint-Siège mais l’Etat de la Cité du Vatican. C’est évidemment un symbole fort que cette seule présence d’un cardinal italien. Il s’agit d’une réponse particulièrement claire à l’italianisation du gouvernement de Benoit XVI, et plus encore aux critiques parfaitement justifiées contre le trop grand nombre de cardinaux de nationalité italienne, 27 sur 115 lors du dernier conclave, en sur-proportion flagrante par rapport à ce que représente la population catholique italienne dans le monde. Tous les continents sont représentés. Pour le continent européen, c’est un allemand, le cardinal Reinhard Marx de Munich. L’Asie est représenté par le cardinal Oswald Gracias de Bombay, l’Océanie par un australien, le cardinal de Sydney, George Pell. En ce qui concerne l’Afrique c’est le cardinal de Kinshasa Laurent Monsangwo. Enfin pour le continent américain, le cardinal de Boston, Sean O’Malley, et deux cardinaux latino-américains, Oscar Maradiaga du Honduras et l'archevêque émérite de Santiago du Chili, Francisco Javier Errazuriz. Le cardinal Maradiaga à un rôle prédominant en tant que coordinateur. A bien des égards, il sera celui qui aura la plus grande influence sur le pape François, qu’il connaît depuis de très nombreuses années. Au sein du CELAM, la conférence des évêques d’Amérique latine, Bergolio et Maradiaga ont toujours travaillé ensemble. Le cardinal de Tegucigalpa est une figure très attachante, promu évêque à 36 ans et crée cardinal par Jean-Paul II dont il était proche. Il a également  joué un rôle de tout premier plan dans l’élection de Bergoglio. Il n’est donc pas étonnant de le retrouver dans le collège des 8 cardinaux et qui plus est avec le statut de coordinateur.

Le pape François trouve-t-il un Vatican dans une situation pire que prévue ?

Un certain nombre des problèmes évoqués lors des congrégations générales qui précédaient le conclave ont permis à ce pape de se faire une idée très précise des débats qui agitaient l’Eglise ainsi que des problèmes du Saint-Siège. A l’évidence, depuis son élection, et selon plusieurs sources très informées, le Pape a pris connaissance d’un certain nombre de problèmes plus lourds et plus graves qu’il ne le pensait, en particulier à propos de la banque du Vatican. Ce qui est absolument certain, c’est qu’il y a chez Bergoglio une aversion profonde pour la corruption et tout ce qu’il ressemble de près ou de loin à un carriérisme qui se conclut en corruption. Par conséquent, il faut s’attendre à des réformes profondes, et c’est également la raison de la création de cette commission qui doit conseiller et protéger le pape. Car les réformes qu’il mènera dans les mois à venir seront des réformes lourdes qui ne se feront pas sans difficultés et qui vont heurter de plein fouet certains intérêts financiers très puissants. De ce point de vue, la commission agira comme une forme de « cordon sanitaire », une protection dont le pape aura vraiment besoin.

Que sait-on maintenant du contenu du rapport rendu à Benoit XVI après Vatileaks ?

C’est un rapport absolument secret. Très peu d’éléments ont fuités et c’est volontaire car le fait que ce rapport reste secret permettra au pape d’agir plus profondément.

Le Pape François est il contraint de se méfier d'une partie de l'administration du Vatican ?

C’est évident que certaines réformes, en particulier la réforme de la curie, du Gouvernatorat et du IOR, la banque du Vatican, vont remettre en cause des intérêts acquis, des positions établies et des corporatismes. Il parait incontestable que le pape François sera celui qui remettra en cause des intérêts plus ou moins frauduleux qui avait pu prospérer au cours des années, des systèmes parallèles qui avaient profité de la longue maladie de Jean-Paul II et du grand âge de Benoit XVI, lequel avait concentré son action sur d’autres sujets.

Pourquoi un nouveau Secrétaire d'Etat pour diriger la curie n'a t il pas encore été nommé ? Quand le sera t-il ? Quels candidats pressentis ?

Il y a chez le pape François la volonté de ne pas heurter de plein front la curie actuelle et en particulier la secrétairerie d’état. La création de cette commission est tout de même un signe, un mois après son élection, ce qui est très rapide, de sa volonté de réforme. Le prochain signal sera la nomination d’un nouveau Secrétaire d’Etat. Il est certain que le pape continue à beaucoup consulter, ce qui est d’ores et déjà une de ses méthodes de gouvernement, rompant avec la prise de décision plus solitaire des deux papes précédent. Il est difficile de se prononcer sur la date de cette nomination, très attendue par tous les prélats du Saint-Siège. Personnellement, je pense que la nomination s’effectuera avant l’été. Le pape François semble incliné vers un profil de diplomate technique pour établir une collaboration fructueuse avec la commission des cardinaux. Certaines sources parlent avec insistance du cardinal Santos Abril y Castello, ancien nonce en Argentine et actuel Archiprêtre de la basilique romaine de Sainte-Marie Majeure, à qui le pape François voue une grande confiance.

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