Et les syndicats ? Et les associations ? Et les fonctionnaires ? Moraliser la vie publique, oui mais laquelle ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Et si le champ de moralisation touchait de façon plus indistincte les syndicats, les associations, les fonctionnaires et les médias...
Et si le champ de moralisation touchait de façon plus indistincte les syndicats, les associations, les fonctionnaires et les médias...
©Reuters

Nuances

La campagne de "moralisation" lancée par François Hollande, au-delà de sa potentielle efficacité, souffre déjà d'un (important) problème de définition. Décryptage

À l’issue du conseil des ministres de mercredi, le Président de la République a dévoilé les grandes lignes du projet de loi de moralisation de la vie publique qui sera examiné au Parlement à partir du 24 avril prochain. Ces mesures, qui s’inspirent du rapport de la commission de rénovation et de déontologie de la vie publique présidée par l’ancien premier ministre Lionel Jospin, ont pour but d’éteindre la polémique, huit jours après les aveux de Jérôme Cahuzac.

Avant d’aller plus loin, il convient de prendre les précautions d’usages. Elles sont au nombre de trois. D’abord, la moralisation de la vie publique est un débat qui, selon toute logique, devrait dépasser le clivage entre la gauche et la droite. Il suffit, pour s’en convaincre, de voir chaque camp se montrer du doigt. Ensuite, l’affaire Cahuzac ne doit pas jeter l’opprobre sur des milliers d’élus qui ne comptent ni leur temps, ni leur énergie, pour assumer leur mandat, souvent dans des conditions difficiles. Peu de gens connaissent le quotidien d’un maire de banlieue ou d’un élu de commune rurale. L’ayant éprouvé, rares sont ceux qui accepteraient d’exercer leur fonction. Enfin, ces mesures ne doivent pas faire oublier les progrès qui ont été accomplis par les majorités successives, notamment dans le domaine du financement de la vie politique.

Les mesures qui ont été annoncées – publication des déclarations de patrimoine des membres du Gouvernement et du Parlement, création d’une haute autorité chargée d’en contrôler la sincérité, application du non-cumul des mandats, création d’un parquet financier et d’un office central de lutte contre la fraude et la corruption,…- n’appellent pas de commentaires. Certains les jugeront insuffisantes. D’autres, irréalistes. Le débat parlementaire permettra de les compléter et de les affiner. L’ennui avec les mesures destinées à répondre à une actualité brûlante, est qu’elles sont circonscrites au sujet du jour, en l’espèce : la fraude fiscale, le patrimoine des élus, le contrôle de sincérité. Elles donnent le sentiment de régler un problème alors qu’elles ne font que l’effleurer.

De quelle vie publique parle-t-on ? De la vie politique et parlementaire ? De la vie publique au sens large ? Quels sont les publics visés ? Les élus ? Ou l’ensemble des personnes, entreprises et organismes qui participent, de façon directe ou indirecte, à la vie publique ? Si on retient cette acception, le champ de la moralisation devient plus large pour concerner de façon indistincte, les fonctionnaires, les conseillers ministériels, les assistants parlementaires, les médias, les syndicats, les associations recevant des subventions publiques, les délégations de service public. Par ailleurs, pourquoi se limiter au seul patrimoine qui, par le jeu des donations, est un indicateur certes intéressant mais incomplet ? La logique retenue conduit à un curieux paradoxe : aux yeux de la moralité, mieux vaut être un corrompu dépensier qu’un honnête économe. Quel sort réserver aux conflits d’intérêts structurels que sont la possibilité pour un fonctionnaire élu de réintégrer son corps d’origine après une défaite électorale ou la pratique du pantouflage ? Que faire des cercles de réflexion et autres « associations des amis de » qui ont pour but de sensibiliser, sans règle ni contrôle, les décideurs à la situation de leurs membres ?

Il ne s’agit ni de fliquer, ni de lancer une chasse aux sorcières mais plutôt de réduire au maximum cette zone grise, faite de tolérance et de non-dits, qui offre la possibilité à quelques uns de jeter le discrédit sur tous les autres. L’affaire Cahuzac sera peut-être une occasion supplémentaire de démontrer qu’à défaut de changer les natures, il est possible d’encadrer les pratiques. Encore faut-il convaincre le Parlement de voter les règles qui lui sont destinées. Charité bien ordonnée ne commence-t-elle pas par elle-même  ?

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